S'exprimant sur le refus de la Pologne de réviser la directive européenne sur les travailleurs détachés, le président de la République s'en est pris très vivement aux orientations du gouvernement polonais lors d'un point de presse conjoint avec le président bulgare. Condamnant "une nouvelle erreur" d'un pays qui se met "en marge" de l'Europe, qui "a décidé de s'isoler", affirmant que "l'Europe s'est construite sur des libertés publiques qu’enfreint aujourd'hui la Pologne", il a conclu que "le peuple polonais mérite mieux que cela".
Il n'est pas question ici de défendre le gouvernement en place à Varsovie ni la directive des travailleurs détachés dans son état actuel, mais M. Macron est bien mal placé pour formuler ces critiques.
Remarquons tout d'abord que la Pologne est une cible facile. Entendra-t-on prochainement le président de la République déclarer que le peuple saoudien ou le peuple chinois "méritent mieux que cela" ? Bien sûr que non !
Ensuite, il y a de quoi s’étouffer en l'entendant donner des leçons sur les libertés publiques. Dans quel pays le gouvernement entend-il transposer dans le droit commun les dispositions de l’état d'urgence ? Dans quel pays des manifestants sont-ils victimes de grenades offensives lancées par la police (voir ici) ? Dans quel pays les réfugiés font-ils l'objet "d'atteintes aux droits fondamentaux d'une exceptionnelle et inédite gravité" (voir le communiqué du Défenseur des droits). C'est en France, sous la présidence de M. Macron, et pas en Pologne.
Sur le fond de l'affaire, il faudrait peut-être rappeler à M. Macron que s'il y a des travailleurs détachés en France, c'est qu'il y a des entreprises qui les emploient ou plutôt qui les exploitent. A-t-on jamais entendu de sa part une seule critique sur ces entreprises ? Bien sûr que non !
L’écouter fustiger les pays "qui font la promotion du moindre droit social" ne manque pas non plus de piquant alors que son gouvernement prépare le démantèlement du droit du travail en France ! Il parait que M. Macron souhaiterait s'attaquer à la fraude en mettant en place un système de sanctions en cas d'abus. "En même temps", sa ministre du travail prépare une nouvelle réduction des effectifs de l'inspection du travail (voir ici). Cherchez l'erreur...
Ces rodomontades dans les pays d'Europe Centrale sont à l'image du reste de la politique de M. Macron: de la pure communication pour masquer la politique économique et sociale la plus réactionnaire depuis les années 30.