Mathieu Brichard (avatar)

Mathieu Brichard

Prof et militant de l'ultra-gauche libertaire

Abonné·e de Mediapart

6 Billets

0 Édition

Billet de blog 27 décembre 2022

Mathieu Brichard (avatar)

Mathieu Brichard

Prof et militant de l'ultra-gauche libertaire

Abonné·e de Mediapart

Reconnaître le fascisme avec Umberto Eco

Une fois encore, Violette Vénère se propose d'examiner la situation de la France en 2022, cette fois-ci à la lumière du livre d’Umberto Eco et des 14 aspects de ce qu’il appelle le fascisme éternel, l’Ur-fascisme. On comparera le macronisme et le fascisme matriciel que théorise Eco, en étayant le propos par des réflexions plus générales sur le climat politique et médiatique français.

Mathieu Brichard (avatar)

Mathieu Brichard

Prof et militant de l'ultra-gauche libertaire

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Reconnaître le fascisme avec Umberto Eco

Comme je l'avais fait il y a déjà quelques mois, j'ouvre à nouveau cet espace de blog à Violette Vénère, pour un long article de réflexion qui ne pouvait trouver sa place sur Twitter.

La question de savoir si nous vivons ou non dans un pays ou dans une période fasciste divise régulièrement dans les discussions sur les réseaux sociaux. Les positions, qui sont parfois aussi des postures, sont généralement au nombre de deux, et se heurtent assez frontalement : d’un côté les alarmistes dénoncent un état de fascisation très avancé, l’imminence de la conquête du pouvoir par l’extrême-droite, et puisqu’un tribunal a jugé qu’il n’est pas diffamatoire de qualifier Marine Le Pen de fasciste, ils ont beau jeu d’affirmer que nous sommes au bord d’un basculement. De l’autre les rassuristes pointent l’exagération des premiers en s’appuyant sur une définition historique du fascisme, qui, il faut bien l’admettre, ne colle pas à la réalité actuelle. Les alarmistes reprochent aux rassuristes leur aveuglement, qui ferait d’eux les « idiots utiles » de la fascisation, les rassuristes quant à eux, piochent dans le vocabulaire misogyne pour stigmatiser l’hystérie supposée des alarmistes, et lorsqu’ils ont en face d’eux des antifas actifs sur le terrain, engagés physiquement, ils n’hésitent pas à leur mettre sur le dos la radicalisation de la police et des méthodes de maintien de l’ordre, arguant que c’est de la faute du Black Bloc si chaque manifestation dégénère et qu’il y a des blessés. Les rassuristes se présentent volontiers comme raisonnables, capables de faire la part des choses, tandis que les alarmistes tentent désespérément de les réveiller de leur torpeur complice, voire criminelle. Une fois les invectives lancées, on se fâche sinon entre camarades, du moins entre gens censés être du même bord politique.

Je ne prétends pas avoir échappé à l’agacement ni aux formules coup de poing quand j’ai eu maille à partir avec des rassuristes, aussi bien que lorsque j’ai pu lancer à à la figure d’alarmistes à mes yeux caricaturaux mon ascendance espagnole et mon grand-père réfugié en 39 à 15 ans, enfermé dans les camps de concentration français (oui, je les appelle comme ça maintenant, je vous conseille à ce sujet la lecture de la bande dessinée L’art de voler) puis combattant contre le nazisme, comme si cela faisait de moi un meilleur connaisseur du fascisme et me rendait plus légitime à dire que non nous n’étions pas sous un régime fasciste (pas encore du moins). Comme si l’héritage du sang pouvait être un gage de lucidité ou de quoi que ce soit d’autre.

Je n’ai donc pas la prétention de livrer un point de vue définitif mais plutôt des réflexions à chaud : je n’échapperai sans doute pas aux approximations qui peuvent être inhérentes à ce genre d’exercices. Jetez moi la pierre si c’est le cas, mais attendez vous à recevoir un pavé en retour.

Le matin du 23 décembre j’avais décidé de faire un fil twitter consacré au petit livre Reconnaître le fascisme d’Umberto Eco (Grasset), paru pour la première fois en 1997, que j’étais en train de lire. Le même jour, quelques heures plus tard, un attentat terroriste faisait trois morts à Paris : trois militants kurdes.

L’auteur de l’attentat avait déjà attaqué, armé d’un sabre, un camp de migrants, en 2021. Relâché après une peine de prison , il n’avait fait l’objet d’aucun suivi de la part des services de renseignement. Quand on sait que le ministère de l’intérieur a dépensé des millions d’euros en écoutes téléphoniques, fichage, pour surveiller les militants anti-nucléaires de Bure, opposés au projet Cigéo, on croit rêver. Le harcèlement de militants écologistes et l’incurie qui permet à un agresseur raciste de récidiver participent d’une même gangrène des rouages de l’État. Cette gangrène, c’est le fascisme, ou en tout cas quelque chose qui y ressemble beaucoup.

Il est indispensable de rationaliser tout cela : au-delà du cliché qui veut qu’on ne puisse pas bien combattre ce que l’on ne comprend pas – mes motivations sont en partie stratégiques, on se comprend mieux entre militants lorsque l’on s’est mis d’accord sur ce dont on parle.

Je vais donc examiner la situation de la France en 2022 à la lumière du livre d’Umberto Eco et des 14 aspects de ce qu’il appelle le fascisme éternel, l’Ur-fascisme (Ur désigne l’origine, la source, en allemand). Je me livrerai évidemment à une comparaison entre le macronisme et le fascisme matriciel que théorise Eco, mais aussi à des réflexions plus générales sur le climat politique français, car certaines caractéristiques de l’Ur-fascisme débordent le cadre du pouvoir exécutif macroniste, et relèvent d’un état général de la société.

Après une mise en contexte où il raconte sa première expérience du fascisme, en 1942 en Italie, Eco entreprend de montrer que sous ses différents avatars autoritaires, réactionnaires, totalitaires même, subsistent des caractéristiques fondamentales du fascisme : « On peut jouer au fascisme de mille façons sans que jamais le nom du jeu ne change ».

Pour Eco, « Si l’on se réfère aux gouvernements totalitaires ayant dominé l’Europe avant la Seconde Guerre mondiale, on peut affirmer sans crainte qu’il serait difficile de les voir revenir sous la même forme dans des circonstances historiques différentes. » Si demain Marine Le Pen était élue présidente, elle ne ferait pas bâtir immédiatement des camps d’extermination pour y mettre les noirs, les arabes, les juifs, les personnes LGBTQIAA, les roms, les communistes ou ce qu’il en reste, ou même les antifas. Pourtant l’histoire a montré que c’était possible, et dans la famille Le Pen, le père, tortionnaire en Algérie, a tout de même affirmé que les chambres à gaz n’étaient qu’un détail dans l’histoire de la Seconde Guerre Mondiale. Le problème n’est donc pas idéologique : le Pen, ou Zemmour, aimerait bien sans doute exterminer , mais non seulement elle ne peut plus le dire – Zemmour lui-même a été condamné et sa procédure rejetée par la cour Européenne des droits de l’homme qu’il avait saisie – mais elle ne pourrait le faire sans un contexte de fascisation généralisée à l’échelle de l’Europe : la mondialisation de l’information fait qu’on ne peut plus commettre un génocide tranquillement dans son coin sans que les voisins frontaliers s’en mêlent : il faudrait donc que Marine Le Pen attende que toute l’Europe bascule pleinement dans le fascisme pour pouvoir réaliser son fantasme de suprémaciste blanche. Aucun politicien en 2022 ne pourrait conquérir le pouvoir en ayant pour programme l’extermination des Juifs : si presque personne n’a cru qu’Hitler envisagerait sérieusement d’appliquer les volontés exprimées dans Mein Kampf, que presque personne n’avait lu, il en irait aujourd’hui autrement. La dédiabolisation du parti de son père entreprise par Marine Le Pen participe de ce voilement des intentions, et jette en tout cas un voile de doute sur la capacité et la volonté du Rassemblement National d’accéder au pouvoir mais aussi, une fois au pouvoir, d’y faire ce que fantasment ses troupes néonazies les plus violentes, celles à qui l’on a demandé de se faire discrètes.

Le Rassemblement national vit dans cette contradiction : ses militants répètent des éléments de langage qui prétendent que le RN n’est pas le FN, que c’est un nouveau parti… mais de l’autre côté ce même RN a tenu en novembre 2022 son dix-huitième congrès, revendiquant 50 ans d’existence.

Pour Umberto Eco, ce syncrétisme idéologique, ou le caractère fuzzy (flou) est justement un des éléments propres au fascisme, qui ne s’embarrasse pas de cohérence rationnelle.

Le fascisme n’est donc pas nécessairement totalitaire. Eco rappelle par exemple les contradictions du fascisme italien : il réunissait « la monarchie et la révolution, l’armée royale et la milice personnelle de Mussolini » alors qu’Hitler a fait éliminer les SA dès 1934 ; il réunissait encore « les privilèges accordés à l’église, et une éducation étatique exaltant la violence, le contrôle absolu de l’État et le libre marché ». La soi-disant révolution fasciste était financée par des propriétaires terriens ultra-conservateurs. Concernant le contexte culturel de la naissance du fascisme, Eco rappelle que « les premiers futuristes italiens étaient nationalistes, ils encouragèrent pour des raisons esthétiques la participation italienne à la Première Guerre Mondiale, ils célébrèrent la vitesse, la violence, le risque, et, d’une certaine manière, ces aspects parurent proches du culte fasciste de la jeunesse. »

Aussi incohérent idéologiquement qu’il l’était, le fascisme restait, par delà cette dislocation « fermement enchâssé dans certains archétypes » émotionnels sur lesquels nous reviendrons.

Eco postule donc ceci : il n’y a qu’un seul nazisme, mais une infinité de possibilités de fascismes ?

Comment ?

Eco répond à cette question avec le petit tableau suivant :

1              2          3      4

abc         bcd     cde    def

Ces quatre groupes politiques dans quatre pays différents peuvent être chacun une version du fascisme : si le 4 n’a objectivement aucun point commun véritable avec le 1, la parenté entre 1, 2 et 3, et la parenté entre 4, 3 et 2 crée entre 1 et 4 un « air de famille ». Une « transitivité illusoire » par continuité de la série, en dépit de la dissemblance.

Les caractéristiques de ce qu’il appelle l’Ur-fascisme (Ur est un préfixe marquant l’origine en allemand) sont ici symbolisées par des lettres de a à f. Ces caractéristique sont, selon Eco, au nombre de 14 et nous allons les examiner dans l’ordre pour essayer de mesurer à quel point le macronisme s’y rattache, et comment la situation de la France en 2022 peut être soumise à cette grille de lecture.

1) Culte de la tradition :

Macron a souvent confessé sa fascination pour la royauté : « Il y a dans le processus démocratique et dans son fonctionnement un absent. Dans la politique française, cet absent est la figure du roi, dont je pense fondamentalement que le peuple français n’a pas voulu la mort[…] » Cette réflexion provient d’une interview donnée en 2015.

On sait par ailleurs qu’il voue une grande admiration à Napoléon, mais il a aussi décidé, alors que plus aucun président ne le faisait, de rendre hommage à Pétain, qualifié de « grand soldat » de la guerre de 1914-18. Comme tout homme politique, il tend à privilégier une vision de l’histoire qui sert son ambition. Sa particularité tient aux contradictions internes de cette vision.

Emmanuel Macron pousse à l’extrême les contradictions : d’un côté une volonté affichée, au début de son premier quinquennat, de modernité à outrance qui ferait de la France une start-up nation. De l’autre, celle de ressusciter la tradition des chasses présidentielles, une tradition royale remontant à François Ier. Ce culte de la tradition se heurte parfois à l’ego démesuré du personnage : le couple présidentiel investit régulièrement Versailles (par exemple après la victoire de la France contre le Maroc) mais veut faire démolir les jardins des employés de Versailles car « les allées et venues du personnel dérangeraient la tranquillité » des Macron. Il passe ses vacances, comme le font traditionnellement les couples présidentiels, au fort de Brégançon, mais y fait construire une piscine. On,pourrait multiplier les exemples.

Ce syncrétisme d’Emmanuel Macron a au moins deux fonctions : la première fonction est de dissimuler les actes sous les paroles. Le président multiplie les annonces trompeuses. La lutte contre les violences faites aux femmes est par exemple proclamée grande cause du quinquennat. Mais la principale mesure déployée dans cette lutte est la création d’un numéro de téléphone gratuit. Le milliard d’euros réclamé par les associations ne sera jamais accordé. Pire : le président ne met pas à l’écart des ministres accusés de viols, de chantage sexuel. Le fameux « en même temps » qu’on a présenté ici ou là comme un héritage philosophique hégélien, Macron ayant été un temps le secrétaire de Paul Ricoeur, est d’abord un écran de fumée. Macron n’est pas un penseur, mais un communicant. Il applique à la lettre le principe selon lequel on doit mélanger le mensonge avec la vérité pour le faire accepter, et la synthèse des deux se traduit par ce « en même temps ». Evidemment, la vérité est toujours mise au service du mensonge, jamais l’inverse. C’est pourquoi dans le macronisme, les mots n’ont plus de prise sur les choses, sur le réel : Elisabeth Borne, après avoir utilisé à dix reprises le 49.3, peut, sous les rires incrédules de l’opposition, se glorifier d’un dialogue fructueux avec le parlement. Elle-même en rit, ce qui paraît incroyable tant elle a ordinairement une tête de gardien de prison.

2. Le traditionalisme implique un refus du modernisme.

Cela semble assez logique. Mais dans les faits, qu’en est-il ?

Macron opte, dans la planification de la transition écologique, pour un modèle de réindustrialisation plutôt que pour le scénario de sobriété proposé par RTE, affiche un amour immodéré pour les armes modernes : avions de chasse, sous-marins qui lui donnent l’occasion de se déguiser, il utilise Twitter pour parler de cryptographie post-quantique. Il se donne l’air moderne.  https://www.futura-sciences.com/tech/actualites/cybersecurite-quest-ce-cryptographie-post-quantique-parle-president-emmanuel-macron-102109/

Mais le rapport du macronisme à la technologie est un rapport idolâtre : ceux qui contestent, sur des bases scientifiques, le modèle d’une croissance infinie, sont renvoyés dans le champ de l’irrationnel : Macron les traite d’amish (du nom d’une secte religieuse américaine refusant toute technologie moderne, dont le mode de vie est figé à un stade correspondant à la fin du XIXeme siècle, sans l’énergie de la vapeur, des hydrocarbures ou de l’électricité). Il marque ainsi son refus de dialoguer avec les écologistes radicaux selon des termes rationnels, en comparant des modèles. Le macronisme est d’abord une croyance.

L’irrationalisme est aussi du côté de ses partisans : il y a bien sûr, dans l’appareil macroniste, les cyniques qui participent à l’exercice du pouvoir et sont parfaitement conscients de mener une politique de classe, une politique économique néo-conservatrice qui opère en même temps un transfert massif d’argent public vers les plus riches et une restriction austéritaire sans précédent des services publics et des prestations sociales à destination des plus pauvres. Mais hormis la minorité d’acteurs politiques tous issus du même giron (la même promotion de l’ENA, les mêmes passages obligés dans les cabinets de conseil comme McKinsey, qui font figure de rite initiatique), les sympathisants macronistes frappent l’observateur par l’irrationalisme complet de leur adhésion.

Macron joue pleinement de cet irrationalisme de son électorat : on se rappelle les meetings dont les applaudissements étaient organisés par une équipe de jeunes réunis sur un fil telegram. ; on se rappelle les vociférations du candidat Macron qui se brisait à moitié la voix : les photos de sa communication mettaient en avant cette énergie hyper-virile largement moquée par ses adversaires sur les réseaux sociaux : la phrase-mantra « c’est notre projeeeeeeeeeeet » est devenue un meme sur internet et a donné lieu à d’innombrables détournements humoristiques.

La nostalgie du roi dont a plusieurs fois parlé Emmanuel Macron participe d’un irrationalisme qui voudrait enjamber la révolution française et le siècle des Lumières.

3 le culte de l’action pour l’action

Le président Macron aime se mettre en scène en action, peu importe l’utilité de cette action : voler en avion de chasse en temps de paix, en tant que passager, n’accomplit politiquement rien. Il s’agit d’une démonstration de virilité, domaine dans lequel Macron cherche à rivaliser avec Vlamdimir Poutine torse nu sur un cheval, ou Zelensky croisant les bras pour faire saillir ses biceps dans un t-shirt moulant.

Le macronisme cultive l’action sans s’embarrasser de l’image d’intellectuel que le président a pu d’abord donner : il s’attaque aux universités, que le ministre de l’éducation nationale J-M. Blanquer et la ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche vont qualifier de repaires d’islamo-gauchistes (mot-valise inventé par la fachosphère et dont le CNRS. Le reproche n’est pas nouveau, les universités étaient déjà soupçonnées par les fascistes italiens d’être des repaires de communistes.

https://www.cnrs.fr/fr/l-islamogauchisme-nest-pas-une-realite-scientifique

https://www.huffingtonpost.fr/politique/article/islamo-gauchisme-une-etude-du-cnrs-pointe-un-piege-pour-le-gouvernement_176914.html

Le terme islamo-gauchisme, qui ne recouvre aucune réalité rationnelle, est un déclencheur émotionnel : il sert à valider de manière synthétique deux haines de la France réactionnaire, la haine contre les arabes (l’islamophobie est le faux-nez du racisme) et la haine contre la gauche et son idéal de justice sociale. Le terme a pour effet de faire accepter à ceux qui détestent la gauche qu’ils doivent aussi détester les musulmans, et à ceux qui détestent les musulmans l’idée que la gauche est leur alliée contre la laïcité ou contre les prétendues racines chrétiennes de la France. Il fait fusionner deux groupes réactionnaires : les catholiques et les alliés qu’ils ont pu trouver dans certains laïcards hypocrites (Printemps Républicain), et les anticommunistes par pur réflexe (qui font mine de voir dans la NUPES Staline, Pol Pot, et Mao Zedong ressuscités).

En s’attaquant ainsi à une de ses propres branches, puisque les Universités relèvent du service public, le gouvernement cultive une rhétorique de l’ennemi intérieur chère aux régimes fascistes, en même temps qu’un anti-intellectualisme qui nourrit la droite depuis longtemps : la plaisanterie sur les sociologues dont le diplôme bac + 5 ne leur ouvrirait comme perspective que celle de bosser au McDo, plaisanterie dont on pourrait croire qu’elle est la seule blague de la droite tant elle est inlassablement répétée sur les réseaux sociaux, est un héritage culturel précieux qui doit se transmettre aux repas de noël et de Pâques, mais aussi un indicateur de la méfiance à l’égard des sciences humaines en général, taxées d’inutilité. Les intellectuels que se choisit la droite ne sont d’ailleurs souvent pas des universitaires ou des universitaires ayant renoncé aux critères de validation de la confrontation à leurs pairs.

Ils établissent un système de cooptation éditoriale parallèle à celui de l’université. Illustration : lorsque Michel Onfray publie son second livre, en 1989, c’est Jean-Paul Enthoven qui lui ouvre les portes de Grasset, le père donc, de Raphaël Enthoven. Onfray intègre deux ans plus tard, en 1991, le comité de rédaction de la revue La règle du jeu, que vient de créer Bernard-Henri Lévy. La haine des intellectuels transpire paradoxalement des écrits de ces têtes sinon pensantes, du moins écrivantes, de la droite fascisante. BHL, dont les chemises blanches sont devenues légendaires, se met en scène, comme Emmanuel Macron, dans l’action, d’une façon ridicule, à grand renfort de montages et de mensonges. Comme on voit, l’irrationalisme et le culte de l’action se rejoignent dans la bouffonnerie spectaculaire. Coucou Guy Debord.

4. L’interdiction de la critique.

Parce qu’il est irrationaliste et syncrétique, le Macronisme ne peut tolérer la critique. Toute critique révèlerait en effet son irrationalisme mais aussi ses contradictions internes. C’est la raison pour laquelle les députés de La République en Marche ne pouvaient, pendant le premier quinquennat, prendre le risque de voter contre les propositions de loi du gouvernement. C’est la raison pour laquelle, d’une manière encore plus autoritaire, anti-parlementaire et sectaire, Macron a cherché à faire signer aux candidats aux législatives de juin 2022 un engagement solennel à toujours voter les projets de loi de l’exécutif, sous peine d’exclusion.

Comme dit Eco, « le désaccord est trahison ».

Le culte du chef est le corollaire de cette interdiction de la critique : dans une interprétation hyper-présidentielle de la constitution de 1958, Emmanuel Macron est l’arbitre ultime, mais aussi le personnage principal du récit politique.

La nomination de Pap N’Diaye, de ce point de vue, constitue un objet d’analyse intéressant : cette nomination a surpris à droite comme à gauche, elle a déchaîné la colère de l’extrême-droite. Pap N’Diaye était en effet connu pour être un universitaire, un intellectuel (ce qu’abhorre l’extrême-droite), mais de plus un intellectuel dont le parcours de recherche, sur la condition noire, faisait craindre à la droite, classique et extrême, la déconstruction de l’histoire de France, la propagation du décolonialisme, etc.

https://www.challenges.fr/election-presidentielle-2017/editoriaux/pap-ndiaye-mais-pourquoi-tant-de-haine_814146

Mais le nouveau ministre va au contraire s’employer à trahir tout ce qu’il représentait pour se couler dans le moule du macronisme, avec une étonnante servilité. Nul doute que cette loyauté sans faille lui a été présentée comme la condition sine qua non de sa nomination, une loyauté qui touche à la servilité : on a vu comme Macron s’était substitué à son nouveau ministre de l’éducation nationale, réduit au rôle de plante verte, lors de la présentation de la réforme des lycées professionnels. Après un passage de relais, Pap N’Diaye semble désormais sous la tutelle de Brigitte Macron, qui n’a aucune prérogative officielle, n’a jamais été élue par personne, mais exerce désormais le contrôle sur le ministère de l’éducation nationale. Il s’est déjà renié trois fois, au moins.

5. Le désaccord est signe de diversité. L’Ur-fascisme est raciste par définition.

Le macronisme est raciste. À titre individuel, on se rappelle la plaisanterie de mauvais goût de Macron sur les embarcations de fortune des comoriens.

https://www.courrierinternational.com/article/polemique-aux-comores-la-blague-de-macron-ne-passe-pas

Je ne développe pas : que Macron soit ou non authentiquement raciste ou qu’il reproduise les préjugés de sa classe, il est indéniable que l’institution policière, elle, le soit, ce qui fait qu’il existe en France un racisme d’État. J’y consacrerai peut-être un billet un jour.

6. l’ur-fascisme naît de la frustration individuelle ou sociale

Le macronisme dispose d’une base électorale assez faible : il est d’abord résolument anti-pauvre : on se rappelle de la déclaration du président sur les « gens qui réussissent » et les « gens qui ne sont rien » qui se croisent à la Gare du Nord. Mépris de classe encore lorsque le président répond à un chômeur qu’il n’a qu’à traverser la rue pour trouver du travail. Réduction du montant de l’allocation chômage, réduction de la durée d’indemnisation, augmentation du temps travaillé minimum nécessaire pour déclencher les droits : Macron ne cherche de toute évidence pas l’appui des plus précaires ni des classes populaires en tant que telles. L’irrationalisme de son électorat amène des individus à voter pour un président dont le programme mène littéralement à leur appauvrissement, à la dégradation de leurs conditions de travail. C’est ainsi qu’il y a des enseignants macronistes (sujet que j’ai abordé dans un autre billet de blog, Anatomie du con).

Néanmoins, il est évident que le discours macroniste sur les prestations sociales qui coûtent un pognon de dingue, les chômeurs qui seraient des fainéants, s’adresse bien aux « classes moyennes frustrées, défavorisées par la crise économique ou une humiliation politique, épouvantées par la pression de groupes sociaux inférieurs. »

Dans le macronisme, c’est Darmanin qui est chargé d’agiter le spectre de l’immigration, mais sans véritablement d’attaque frontale qui anéantirait la rhétorique du front républicain, du barrage au FN.  C’est donc sur le terrain de la lutte contre l’islamisme que Darmanin joué la compétition avec Marine Le Pen en la qualifiant de molle :

https://www.bfmtv.com/politique/marine-le-pen-molle-les-propos-de-gerald-darmanin-sement-l-embarras-au-sein-de-la-rem_AN-202102150325.html

Avec le projet de loi visant à créer des titres de séjour pour les métiers dits « en tensions » (comprendre les boulots de merde ou tellement mal payés qu’il est impossible d’en vivre), Darmanin entend bien faire comprendre qu’il y a des étrangers désirables, c’est-à-dire que tous les autres sont indésirables. Doctrine Darmanin : tout étranger est indésirable jusqu’à ce qu’il accepte un boulot de merde mal payé.

N’oublions pas que lors de son déplacement à Nantes, Darmanin a présenté les moyens supplémentaires de police mais aussi l’ouverture d’un Centre de Rétention Administrative (prison pour personnes dont le seul délit est d’être des migrants)

https://www.20minutes.fr/societe/4003766-20221004-nantes-rolland-darmanin-accord-policiers-cameras-supplementaires

https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/nantes-44000/migrants-gerald-darmanin-annonce-un-centre-de-retention-administratif-en-loire-atlantique-c2d8779a-440b-11ed-9f8f-3a4ea2d19641

La concomitance de ces deux annonces tend à lier délinquance et immigration dans l’imaginaire collectif. Le macronisme s’appuie ainsi sur le racisme ordinaire pour justifier sa politique autoritaire, la constitution d’un état policier.

7 Le nationalisme

L’obsession de la grandeur de la France est le corollaire de la politique anti-sociale du macronisme : Emmanuel Macron ne pourrait passer son temps à insulter les Français en les traitant de gaulois réfractaires, « fainéants », « cyniques », « jaloux », « égoïstes » et « pessimistes», de stigmatiser une part de la population en déclarant qu’il a très envie de les emmerder, il ne pourrait continuellement diminuer leurs droits s’il n’exaltait pas en retour le sentiment national : « vous êtes pauvres, je détruis le système de protection sociale, je détruis l’école publique et l’hôpital, mais au moins vous êtes français et c’est votre fierté ». Voilà à peu près l’équation macroniste : on comprend dès lors que le président surinvestisse les événements sportifs internationaux, grandes occasions de faire oublier qu’il est en réalité au service des plus riches.

Après la coupe du monde de 2022, Elisabeth Borne s’est vu offrir un maillot de l’équipe de France floqué 49.3, en célébration de l’utilisation répétée (dix fois en quelques mois) de l’article 49.3 de la constitution qui permet à l’exécutif de faire adopter des lois sans consulter le parlement : sous couvert d’humour, les puissants reconnaissent tout de même que le sport favori du macronisme est le déni de démocratie, fût-elle délégative et parlementaire : le nationalisme se nourrit de l’éthique compétitive, devenue modèle de la nouvelle aristocratie républicaine, qui en fait d’aristocratie, est surtout le gouvernement non des meilleurs mais des médiocres. Soucieux d’affirmer sa familiarité avec tout ce que le processus de starification a produit de champions, Emmanuel Macron, n’hésite pas, comme il s’était substitué à son propre ministre de l’éducation, à se substituer au séleectionneur de l’équipe de France de football, Didier Deschamps, prononçant dans les vestiaires, où il y encore quelques décennies, les caméras ne pénétraient pas, le discours d’après défaite, apanage traditionnel de l’entraîneur.

L’exaltation de la nation et des valeurs viriles explique aussi le comportement du président pendant le match, dont les clichés ont circulé : debout, levant les bras, le président se met en scène comme le supporter numéro un de l’équipe de France : il a d’ailleurs fait le voyage jusqu’au Qatar par deux fois pour assister aux matches : le bilan carbone contraste avec la fin de ‘labondance dont il parlait ;.. Son intrusion sur le terrain pour se faire filmer en train de consoler Kylian Mbappé d’une manière insistante et sans respecter le droit au consentement du joueur qui évite systématiquement son regard, participe de la théatralisation du politique-sport-spectacle, poussant à l’extrême une tendance initiée par Sarkozy. On voit aussi une fois de plus que le respect des traditions revendiqué par le macronisme entre en contradiction avec l’hyper personnalisation du pouvoir, mais sans que cela provoque de conflit.

Le corollaire du nationalisme est en principe, selon Umberto Eco, « l’obsession du complot, si possible international ». Cependant, le macronisme, on l’a vu est double. Au sommet de la pyramide, il s’agit d’un mouvement de classe : il est l’outil d’accession au pouvoir étatique des intérêts privés, et les acteurs principaux du macronisme sont des riches au service des riches (dix-neuf ministres sont millionaires) : cependant, pour masquer cette appropriation prédatrice de la puissance publique pour la mettre au service d’intérêts privés, pour justifier une politique d’accroissement des inégalités, pour vendre en somme ce hold-up, le faire accepter, il fallait un narratif, une stratégie marketing, et c’est là que vient s’articuler la version macroniste du nationalisme, c’est-à-dire un nationalisme européiste, qui prône la compétition économique entre pays européens en même temps que la convergence culturelle, ce qui permet au macronisme de se démarquer des internationalistes de la gauche, et des nationalistes anti-européens de l’extrême-droite.

Une particularité du macronisme qui le distingue de l’Ur-fascisme : il ne cherche pas à devenir un mouvement de masse ; loin de vouloir mobiliser les foules, embrigader, enrégimenter l’ensemble de la société, il cherche plutôt à profiter de son apathie, de l’épuisement de l’opposition.

Sa petite tentative pour fonder un mouvement de jeunesse sur le modèle des jeunesses fascistes ou hitlériennes, le SNU, dont le budget a été prélevé sur celui de l’Education nationale, ne prend pas : sa destination véritable est peut-être en réalité de former les futurs cadres macronistes, et non d’intégrer tous les jeunes dans une grande entreprise de lavage de cerveaux.

8. Les disciples doivent se sentir humiliés par la richesse ostentatoire et la force de l’ennemi.

Eco raconte comment, enfant, on lui présentait les Anglais comme « le peuple aux cinq repas », et les juifs comme riches et s’aidant mutuellement à l’échelle internationale. La haine raciale et la haine de classe allaient de pair.

Ici on voit que le macronisme reste un mouvement classiste avant d’être nationaliste, car l’ennemi intérieur désigné c’est le fainéant, le chômeur. Cependant, dans sa guerre contre les pauvres, le nationalisme raciste n’est pas complètement absent puisqu’on sait que les personnes racisées sont généralement plus exposées au chômage, à la précarité.

Surtout, comme on l’a vu plus haut, le macronisme, ne parvenant plus à faire illusion auprès d’un électorat qui le croyait et se croyait de gauche – les hollandistes – a dû séduire une partie de l’électorat de la droite dure, et a multiplié les prises de position droitières : si dans le macronisme, le racisme ne s’affiche pas ouvertement dans la perspective d’une hiérarchie des peuples, une rhétroqie du choc des civilisations qui reste propre à l’extrême-droite, il a lâché la bride à Darmanin, chargé de sonder la compatibilité du macronisme avec LR ou le RN, et de siphonner des voix parmi leurs électeurs les moins radicaux. Avec Darmanin, ou Blanquer , le macronisme entre dans le spectre des extrême-droites française, mais avec le détour d’un parti de l’ordre. Les macronistes n’aiment pas les arabes et les noirs parce qu’ils sont noirs ou arabes, non, Dieu les en garde : les macronistes n’aiment pas les noirs et les arabes parce que les noirs et les arabes sont des délinquants. S’il n’est pas proféré ouvertement, le raisonnement est identique à celui de Zemmour (qui a été condamné pour cela).

https://www.lefigaro.fr/politique/darmanin-revele-que-55-des-delinquants-interpelles-a-marseille-sont-etrangers-20220821

https://www.huffingtonpost.fr/politique/article/etrangers-et-insecurite-d-ou-viennent-les-chiffres-de-macron-et-darmanin-pour-justifier-le-nouveau-projet-immigration_209698.html

https://www.20minutes.fr/societe/3178743-20211127-immigration-reconduites-frontiere-etrangers-situation-irreguliere-chiffres-approximatifs-gerald-darmanin

La reconduction aux frontières des étrangers délinquants est une cérémonie du bouc émissaire qui montre la fermeté du gouvernement et venge les humiliés qui croient que les maux de la France et les leurs en particuliers viennent de l’immigration.

Les associations qui opèrent sur le terrain ont pu souligner à quel point l’accueil réservé aux réfugiés ukrainiens, blancs, différait de celui expérimenté par les afghans, les soudanais, etc. Si l’on ajoute à cela le comportement de la police qui déchire les tentes de migrants en pleine nuit, se conduit dans les banlieues comme une armée coloniale, on ne peut nier l’existence en France d’un racisme d’État : la distinction avec l’ur-fascisme est cependant de taille car ce racisme d’état fait l’objet de dénégation de la part de ceux-là même qui l’organisent et le promeuvent.

9. « Pour l’Ur-fascisme, il n’y a pas de lutte pour la vie, mais plutôt une vie pour la lutte. Le pacifisme est alors une collusion avec l’ennemi ; le pacifisme est mauvais car la vie est une guerre permanente. »

Le macronisme ne s’approprie pas pleinement ces postulats du fascisme : il joue néanmoins avec la rhétorique guerrière. Le discours du président au moment de la crise du Covid, qui martelait en anaphore « Nous sommes en guerre », la prédilection du président pour les uniformes (il a encore récemment revêtu celui des marins sur le porte-avions Clémenceau), sont des marqueurs de l’Ur-fascisme, mais ils opèrent à un niveau d’intensité relativement faible : même dans son soutien à l’Ukraine dans sa guerre contre la Russie, le macronisme ne déploie ni les discours ni les moyens qu’un régime pleinement fasciste ou totalitaire aurait engagés. Si le macronisme est belliqueux, sa guerre est surtout sociale.

10. « L’élitisme est un aspect type de l’idéologie réactionnaire en tant que fondamentalement aristocratique. Au cours de l’histoire, tous les élitismes aristocratiques et militaristes ont impliqué un mépris pour les faibles. L’Ur-fascisme ne peut éviter de prêcher l’élitisme populaire. Tout citoyen appartient au peuple le meilleur du monde, les membres du parti sont les citoyens les meilleurs, tout citoyen peut (ou devrait) devenir membre du parti. »

On voit ici en quoi le macronisme se distingue de l’Ur-fascisme : il repose sur une tromperie qui amène fréquemment les opposants à Macron à qualifier le mouvement de secte, à parler de « macronidés », pointant l’irrationalisme d’une grande partie de l’électorat macroniste qui élit des dirigeants qui vont littéralement faire empirer leur sort. Dans le macronisme, l’idéologie des cadres n’est en effet pas la même que l’idéologie des électeurs : il n’y a pas d’élitisme populaire dans le macronisme, qui repose, encore une fois, sur une hiérarchie classiste qui cherche à se masquer. Les macronistes ne font pas l’éloge de la supériorité du parti, ni de la supériorité des ministres de La République en Marche ou de ses députés dont la médiocrité, la bêtise, la malhonnêteté intellectuelle éclatent au grand jour ; le seul être supérieur de la Macronie, c’est Macron. Les ministres n’ont de valeur que parce que Macron les a choisis, leur fait confiance. Et le vivier étant épuisé, la constitution du gouvernement Borne après les législatives a pris longtemps : la stupidité des dirigeants ne saurait devenir trop visible, il faut donc tout de même qu’ils soient capables de faire une phrase complexe en public, ce que la pauvre Muriel Pénicaud par exemple, avait bien du mal à accomplir.

11. « Chacun est éduqué pour devenir un héros. »

On voit à nouveau l’écart fondamental entre le macronisme et l’Ur-fascisme conceptualisé par Umberto Eco : comme il ne s’organise pas en mouvement de masse, le macronisme n’a besoin de mobiliser les masses qu’en période électorale, et encore y parvient-il assez peu. Le macronisme ne suscite l’enthousiasme que d’une poignée de militants, comme en témoignent les rues vides où Macron défilait après sa victoire à la présidentielle : même mise en scène que dans les dictatures fascistes, mais sans les masses.

Le seul héroïsme qui soit mis en scène est donc celui de Macron : le macronisme ne prône pas l’imitation de Macron lui-même. Si la vie et le parcours de Macron devaient faire école, les hommes devraient épouser leur professeure de français de vingt ans plus âgée, entrer à la banque Rotschild et ne pas faire d’enfant : on voit bien que le Macron réel ne peut inspirer l’imitation. En outre, le macronisme ne veut pas la richesse pour tous, l’évasion fiscale pour tous : il faut bien que quelqu’un travaille, pour que les riches s’enrichissent sans travailler. Le macronisme n’éduque donc pas les individus à être des héros, mais à être des larbins, des soumis, des admirateurs béats et non des imitateurs, à ne pas s’émanciper ou s’élever socialement : il n’y a pas dans le macronisme de narratif où des pauvres, adhérant à l’idéologie du régime, deviennent ministres, ou députés ; mais au contraire le macronisme invite à toujours davantage s’enchaîner au système de production et de consommation.

Pire, la politique éducative du macronisme renforce les inégalités, détruit le service public et transfère directement de l’argent du public vers le privé tandis que dans le public, l’état supprime des postes continuellement. Le résultat ne s’est pas fait attendre, l’enseignement privé voit croître le nombre de ses élèves. Le mythe de la méritocratie ne trompe plus que les fanatiques.

12. « Puisque la guerre permanente et l’héroïsme sont des jeux difficiles à jouer, l’Ur-fasciste transfère sa volonté de puissance sur des questions sexuelles. »

Le macronisme a proclamé la lutte contre les violences faites aux femmes grande cause du premier quinquennat, mais rien n’a été fait en réalité. Le machisme se porte bien en Macronie, comme l’ont montré les affaires Abad et Darmanin : ce dernier est toujours ministre de l’intérieur.

https://www.mediapart.fr/journal/france/dossier/laffaire-gerald-darmanin

Je pourrais développer la manière dont le régime fait la promotion d’un imaginaire viriliste, mais l’entreprise serait longue et très vaste. Une autre fois.

13. « L’Ur-fascisme se fonde sur un populisme qualitatif. »

Dans une démocratie, les citoyens, tous égaux, pèsent en principe politiquement par leur nombre, de manière quantitative. « Pour l’Ur-fascisme, les individus en tant que tels n’ont pas de droits, et le « peuple » est conçu comme une qualité, une entité monolithique exprimant la volonté commune.». Emmanuel Macron ne représente pas une majorité de français : en fait, son score au premier tour des présidentielles et l’abstention en font le deuxième président le plus mal élu de la Ve République : il faut aller chercher Pompidou en 1969 pour trouver un président qui soit élu avec un aussi bas pourcentage des inscrits. Et Pompidou n’avait pas en face de lui un candidat d’extrême-droite.

https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2022/04/25/emmanuel-macron-est-il-le-plus-mal-elu-des-presidents-de-la-ve-republique_6123584_4355770.html

Si l’on compare le score de Macron face à Marine Le Pen avec celui de Jacques Chirac face à Le Pen père, deux lectures au moins sont possibles : soit on en conclut à la montée spectaculaire de l’extrême-droite en France (ce qui apparaissait après tout au premier tour, puisqu’en cumulant les scores de Le Pen et de Zemmour on obtenait tout de même 30 % des suffrages exprimés), soit on en conclut la faiblesse extrême de la base électorale macroniste, au point qu’il ne bénéficie que de peu de reports de voix venues de la droite classique en cours de radicalisation, ou de la gauche républicaine.

La légitimité pseudo démocratique ne cesse d’être brandie par les militants macronistes : il a été élu, tout ce qu’il fait reflète donc la volonté du peuple. Ce mythe circule partout, justifiant même la confiscation par l’exécutif du pouvoir législatif, au mépris du principe constitutionnel. Dans un pays où l’abstention aux élections est très élevée, le peuple peut cependant redevenir ou du moins tenter de redevenir acteur politique, comme l’ont démontré le mouvement Nuit Debout né en mars 2016 (malgré sa composante sociologique trop homogène) et plus encore le mouvement des Gilets Jaunes né en novembre 2018. Ces deux mouvements populaires ont été violemment réprimés : le seul peuple qu’admet le régime macroniste est donc, comme l’indique Umberto Eco, une « fiction théâtrale ». Il poursuit : « Pour avoir un bon exemple de populisme qualitatif, il n’est plus besoin de Piazza Venezia ou du Stade de Nuremberg [lieux des grands rassemblements fascistes et nazis]. Notre avenir voit se profiler un populisme qualitatif télé ou Internet, où la réponse émotive d’un groupe sélectionné de citoyens peut-être présentée et acceptée comme « la voix du peuple ». »

Umberto Eco écrit cela en 1997, soit il y a tout juste vingt-cinq ans : nous avons aujourd’hui des exemples d’un exécutif qui légifère en urgence en réponse à la réaction émotionnelle savamment orchestrée d’un public télévisé : les chaînes d’extrême-droite se sont emparées du sujet du squat de résidences secondaires, un phénomène rare, en ont fait un scandale, et ont ainsi contraint ou un l’exécutif à adopter une législation plus répressive. J’ai dit contraint, mais bien évidemment, le ministre Darmanin était ravi de trouver là un prétexte pour combattre le droit au logement et défendre les intérêts des plus riches, et les peines encourues n’ont depuis cessé de s’alourdir : l’émission populiste et raciste de Cyril Hanouna, Touche Pas à mon Poste (parodie cynique du slogan antiraciste des années 80, « Touche pas à mon pote »), dont les téléspectateurs ont en moyenne 52 ans, a accueilli sur son plateau Laurent, venu raconter que lui et sa compagne avaient acheté une maison dans l’Essonne sans savoir qu’elle était squattée. En 48h, le gouvernement réagit : deux ministres s’expriment publiquement, le préfet intervient.

https://www.radiofrance.fr/franceinter/maison-squattee-en-essonne-itineraire-d-une-fake-news-qui-a-chemine-jusqu-au-gouvernement-3422103

Il s’avère par la suite que le couple savait que la maison était habitée par une famille qui croyait l’avoir achetée, et qu’ils sont eux-mêmes proches des milieux d’extrême-droite, qui vont tenter de les expulser alors même que réaliser soi-même une expulsion est un délit passible d’une lourde amende. Dans cette séquence, le peuple c’est le million de spectateurs de TPMP.

Toujours dans la même veine, Umberto Eco continue : « En raison de son populisme qualitatif, l’Ur-fascisme doit s’opposer aux gouvernements parlementaires « putrides ». »

L’antiparlementarisme est un trait commun au macronisme et à l’extrême-droite : j’ai déjà évoqué la volonté du président d’imposer aux parlementaires de sa majorité une loyauté aveugle, je n’y reviens donc pas. Je vais plutôt rappeler la séquence absolument stupéfiante qui a opposé le édputé de la France Insoumise Louis Boyard à son ancien employeur, le milliardaire d’extrême-droite Vincent Bolloré, sur le plateau de TPMP, où Louis Boyard avait pendant quelques mois tenu un poste de chroniqueur.

Je rappelle les faits : le 8 novembre, Louis Boyard, député LFI de 22 ans (je le précise car son âge servira aussi de nourriture à la machine de broyage médiatique) évoque sur le plateau de TPMP les activités de Vincent Bolloré en Afrique (on peut voir ici en quoi elles consistent) https://reporterre.net/Bollore-quitte-l-Afrique-apres-avoir-exploite-la-foret ). Il est copieusement insulté par l’animateur qui entre autres le traite de merde, lui explique que sans l’émission TPMP il ne serait jamais rien devenu, et lui reproche de mordre la main qui l’a nourri. On parle d’un animateur télé et d’un député de la nation. Je suis peut-être un mauvais anarchiste, mais je trouve cela extrêmement choquant, non que je méprise les animateurs télé et idolâtre les députés, mais parce que la voix qui parle à travers Hanouna, c’est celle du capital. C’est celle d’un patron, Bolloré qui s’adresse à son ex-employé et revendique sur lui une emprise alors même que n’existe plus entre eux de relation contractuelle. C’est celle d’un industriel sans scrupules qui prétend imposer silence à un député : c’est la finance qui veut décider ce que le pouvoir législatif peut dire et ne pas dire.

En faisant quelques recherches je suis tombé sur cet article de Slate : même s’il se termine un peu abruptement et maladroitement, il a le mérite de pointer le danger que représente quelqu’un comme Cyril Hanouna pour la démocratie.

https://www.slate.fr/societe/backstage/cyril-hanouna-louis-boyard-vincent-bollore-clash-debat-public-democratie-elon-musk-c8-touche-pas-a-mon-poste-audience

L’ur-fascisme dont parle Umberto Eco est donc bien implanté en France sous la forme d’une contestation par des figures médiatiques dont la plus exemplaire est Hanouna, de la légitimité de parlementaires élus. Je ne dis pas que la seule légitimité politique est électorale : le système représentatif est bien anti-démocratique, il donne à des élus toute latitude de ne pas appliquer le programme pour lequel ils ont été élus, je n’ai pas d’amour aveugle pour cette fonction de député qui donne à celles et ceux qui l’endossent l’immunité pénale alors qu’ils et elles devraient au contraire être ceux et celles qui rendent le plus de comptes à leurs électeurs, ceux et celles qui sont les plus responsables devant le peuple. Ni eux ni le président de la république, que la constitution de la Ve rend irresponsable devant le Parlement et qu’elle place au-dessus des lois par l’immunité et par le droit de grâce, ne devraient jouir d’une telle sacralisation.

Si Hanouna remet en cause la légitimité d’un parlementaire, ce n’est pas par anarchisme révolutionnaire : c’est que pour lui, il existe un pouvoir supérieur et plus légitime, celui de son patron, Bolloré. Le parcours d’Eric Zemmour est de ce point de vue lui aussi révélateur : de commentateur un peu timide mais déjà réactionnaire de l’actualité, il s’est hissé jusqu’à la candidature aux présidentielles sur son aura d’éditocrate xénophobe, certes soutenu par l’empire médiatique de Bolloré, mais son score 7 % au premier tour des présidentielles, devant la maire de Paris, devant la présidente de la région Île-de-France, est très inquiétant. Qu’il n’ait pas réussi à transformer cette popularité en sièges aux législatives ne doit pas surprendre : la haine du parlementarisme du pétainiste Zemmour le rend lui-même incompatible avec la députation. Il aurait d’ailleurs été plus sain pour la démocratie que grâce à une dose de proportionnelle il siège à l’assemblée, car il y aurait été mis face à des contradicteurs bien moins médiocres que lui, et en aurait été politiquement anéanti. Zemmour ne survit et prospère que parce que l’empire médiatique de Bolloré diffuse sa propagande sans contradiction. Zemmour est donc, à mon avis, infiniment plus nuisible hors du parlement qu’il ne l’aurait été en tant que député au parlement, où il se serait retrouvé isolé. .

https://www.liberation.fr/economie/medias/cyril-hanouna-lemprise-dantenne-20221125_4PPJL5UBFZCZLGLL6H6C2T3SWY/

https://www.liberation.fr/idees-et-debats/opinions/laffaire-boyard-hanouna-ou-la-demonstration-de-lemprise-de-bollore-sur-ses-affides-20221116_QFDWD5VGD5BTJATD7G7W2TJAPQ/?redirected=1

Si la liberté de la presse a été un des vecteurs fondamentaux de la diffusion des idées, et un pilier de la démocratie libérale, cette liberté s’est retournée contre elle-même : appropriée par des milliardaires de droite ou d’extrême-droite, la presse au sens large, devenue les médias, est désormais au service d’une entreprise fascisante. Le Conseil National de la Résistance était parfaitement conscient de ce danger, et s’était fixé comme objectif la promotion d’une presse libérée des intérêts d’argent, autrement dit du capital, toujours prompt à pousser à la guerre qui détourne les peuples de la lutte des classes, toujours prompt à en tirer profit. Aujourd’hui presque tous les médias français sont possédés par quelques hommes d’affaires qui s’en servent, plus ou moins discrètement, pour façonner l’opinion, construire l’hégémonie culturelle du capitalisme libéral, et rendre toujours plus acceptable leur domination. C’est une partie de ce processus que dépeint Aude Lancelin dans Le Monde libre.

14. Le dernier point soulevé par Umberto Eco dans sa description de l’Ur-fascisme est que celui-ci parle la novlangue.

Imaginée par George Orwell dans 1984, la novlangue est la langue officielle de l’Ingsoc, le Socialisme Anglais, qui est tout sauf socialiste évidemment.

Cette novlangue se caractérise par un lexique pauvre, qui va de pair avec l’anti-intellectualisme déjà évoqué, mais aussi sur l’inversion du sens des mots, dans le but d’en faire, à terme, des coquilles vides. Ces aspects sont assez documentés, je n’y reviens pas outre-mesure : je ne prendrai que deux exemples.

Le premier, c’est la métaphore de la prise d’otages appliquée aux grèves, comme celle des contrôleurs SNCF sur la période de Noël. Dans la bouche d’un abruti sur Twitter, qui ne fait que répéter ce qu’il a entendu à la télévision, elle reflète simplement la puissance de la machine médiatique comme créatrice d’opinion. Mais dans la bouche des prescripteurs d’idées que sont les journalistes et les animateurs de débats, d’émissions politiques, l’expression « prise d’otages » est le fruit d’un calcul. Elle criminalise les luttes sociales. Elle présente le fait de cesser de travailler (en sacrifiant une ou plusieurs journées de salaires) comme une violence contre les personnes. Le principe de la prise d’otages est de séquestrer une personne et de l’empêcher d’aller où bon lui semble. Or les usagers du train dont le trajet a été supprimé restent libres… libres de sortir de la gare, de ne pas y entrer même s’ils savent que leur train est supprimé, libres de s’organiser pour se déplacer par un autre moyen… Il n’y a pas de prise, et il n’y a pas d’otages.

Lorsque les médecins libéraux se mettent en grève pour exiger le doublement du tarif de la consultation, passant de 25 à 50 euros, en revanche, aucun média ne parle de prise d’otages, alors que contrairement à une grève de la SNCF, une grève des médecins libéraux risque bel et bien de causer directement ou indirectement, des décès, notamment en engorgeant les urgences hospitalières qui sont déjà débordées.

Pourquoi une telle différence de traitement ? La première explication est classiste : les contrôleurs SNCF sont peu ou prou des prolétaires : des gueux. Mais des gueux dotés d’une capacité de blocage considérable, comme les enseignants par exemple. Et il est insupportable que des gueux se rebellent et prennent conscience de leur pouvoir. Au contraire, la profession journalistique, diplômée ou riche, éprouve vis-à-vis de la profession médicale (diplômée et riche) une solidarité bourgeoise spontanée. La seconde est morale, et en sous-main, politique : les médecins sont censés être au service des gens, leur supériorité morale supposée les rend intouchables bien qu’il soit avéré qu’un certain nombre sont des êtres abjects. Au contraire, la doxa libérale a peint depuis des décennies les cheminots de la SNCF comme des privilégiés, égoïstes, à grand renfort de mensonges, de sorte que l’opinion publique soit préparée à la privatisation de l’entreprise.

Les médecins privés font grève : pas de prise d’otage.

Les cheminots d’une entreprise encore publique (l’État est seul actionnaire de ses cinq branches) mais que l’on veut privatiser, font grève : prise d’otage.

Le second exemple de manipulation de la langue à des fins fascistes, est lui aussi très actuel : les activistes qui ont envahi à Sainte Soline le site d’une méga-bassine et l’ont sabotée malgré la violence de la répression policière ont été qualifiés d’éco-terroristes ; bien entendu rien dans leur action ne suscite la terreur et même si l’on se réfère à la définition du Robert en ligne, très succincte, elle ne s’applique pas aux écologistes concernés : « Terrorisme : Emploi systématique de la violence pour atteindre un but politique ; les actes de violence (attentats, destructions, prises d'otages). » On pourrait contester d’un point de vue pénal, le fait de classer les destructions dans les actes violents, puisque la violence s’exerce en principe contre les personnes et non contre les biens. Mais même si l’on accepte cette définition telle quelle, elle est inopérante dans la mesure où le recours aux destructions, chez les écologistes même les plus radicaux, demeure quelque chose de très exceptionnel : marches pacifiques, occupations, tractage, décorations diverses à vocation de communication sont les moyens ordinaires des écologistes, et non la destruction. Quant au sabotage d’une usine Lafarge, sa qualification d’acte de terrorisme est encore plus risible quand on sait que l’entreprise Lafarge a contribué directement à financer l’État Islamique, qui est une vraie entité terroriste, cette fois, dont les modes d’action vont de l’attentat à la décapitation. Le ministre de l’intérieur, Darmanin, toujours lui, a utilisé ce terme d’écoterrorisme à propos des actions contre les méga-bassines
( https://france.attac.org/actus-et-medias/salle-de-presse/article/darmanin-et-l-ecoterrorisme-quand-l-insupportable-s-ajoute-a-l-inacceptable ), mais se refuse à qualifier de terroriste l’attentat commis par un homme motivé de son propre aveu par le racisme, attentat au cours duquel il a assassiné trois kurdes et en a blessé trois autres, un an après avoir attaqué des migrants avec un sabre.

Avec la généralisation du journalisme de préfecture dans les médias privés, il devient difficile de savoir si ce sont les politiques qui transforment la langue pour fournir aux médias leur récit propagandiste, ou si ce sont les médias qui créent et adoptent spontanément cette novlangue pour complaire au pouvoir.

La difficulté à retracer l’origine de ce mauvais usage des mots, qui masquent des réalités et fabriquent des illusions, suffirait à témoigner à elle seule, s’il le fallait encore, du danger que nous connaissons aujourd’hui.

Pour conclure, le macronisme ne correspond pas parfaitement au modèle théorisé par Umberto Eco, mais il y ressemble tout de même beaucoup : sur de nombreux points, le macronisme s’apparente à un fascisme, dont il emprunte des caractéristiques idéologiques aussi bien que psychologiques. Cependant, il se distingue des fascismes traditionnels par la faiblesse de sa base populaire, et par le fait qu’il ne cherche pas à l’élargir. Macron n’a cure de rassembler tous les français : il n’hésite pas à les monter les uns contre les autres d’ailleurs. Il n’a besoin de les rassembler qu’en nombre restreint, juste assez pour se retrouver face à Le Pen au second tour de la présidentielle. Le reste du temps, il se contente de promouvoir la médiocrité servile de laquais du capitalisme, avant de les recaser dans des entreprises ou des lobbies qui paieront cher l’avantage compétitif que confère le conflit d’intérêts, érigé en norme. Ceci fait de LREM devenu Renaissance un parti tout à fait traditionnel, même s’il pousse plus loin les logiques de corruption et d’asservissement de l’État aux intérêts privés. Macron poursuit certes de manière accélérée, mais poursuit, les contre-réformes néo-libérales : l’autoritarisme et la répression violente le distinguent certes de l’exercice du pouvoir tel que la France l’a connu dans son histoire récente, mais il ne se propose pas d’influer sur tous les aspects de la vie des Français, ni de mettre en œuvre une culture politique véritablement nouvelle. Il ne faut pas croire cependant que face à un mouvement social de grande ampleur, le régime macroniste ne se contente pas d’une réponse policière.

Eric Zemmour organise avec les « parents vigilants » une campagne d’intimidation contre les enseignants, contre la liberté pédagogique, sans que l’institution bouge le petit doigt pour les protéger contre cette menace. Le macronisme laisse également les groupuscules d’extrême-droite attaquer des cortèges féministes, mener des ratonnades contre les supportes marocains. Emmanuel Macron avait appelé au téléphone Eric Zemmour après que celui-ci s’était fait un peu chahuter et insulter pendant qu’il faisait ses courses. Au terme de cet appel, Macron avait commandé à celui qui était alors éditorialiste de CNEWS une note sur l’immigration.

Le macronisme rechigne à déployer son énergie dans la constitution de milices, ce qui se comprend puisqu’il dispose de la plus grande milice fasciste qui soit, la police nationale créée sous Pétain et jamais purgée de ses éléments collaborationnistes ou néonazis. Parallèlement, les attaques attaques de groupuscules d’extrême-droite se multiplient, une quarantaine depuis septembre, sans que le gouvernement s’en inquiète. Il n’est pas inenvisageable que pour ne pas se salir les mains, il laisse à l’avenir se développer et agir impunément des groupes armés qui feront régner un climat de terreur parmi les forces progressistes déjà très touchées dans leur esprit et dans leur chair par la répression policière des Gilets Jaunes. Avec l’approbation d’un peuple qualitatif fantoche mis en scène par les chaînes de télévision réactionnaires, le macronisme délèguerait ainsi à l’extrême-droite traditionnelle certains traits, certains modes d’action de l’Ur-fascisme, lui permettant de continuer à se présenter comme respectablement démocratique.

Violette Vénère

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.