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Billet de blog 29 avril 2019

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Bière, champagne, thé et bissap. Les girafes du Niger

A Niamey même ceux qui ne boivent pas la bière savent ce que la ‘conjoncture’. La dévaluation de la monnaie locale et les conséquent Plans d’Ajustement Structurels de la Banque Mondiale ont amené la direction de la brasserie à réduire la quantité de bière dans les bouteilles.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

A Niamey même ceux qui ne boivent pas la bière savent ce que la ‘conjoncture’. La dévaluation de la monnaie locale et les conséquent Plans d’Ajustement Structurels de la Banque Mondiale ont amené la direction de la brasserie à réduire la quantité de bière dans les bouteilles. Quelques jours à peine après l’annonce du temps de ‘conjoncture’ du président en 1986, la capacité de la bouteille passe de 75 à 48 cl, au prix d’avant. Moins de bière mais au même prix, c’est ainsi que ‘Braniger’ a inventé la quadrature du cercle ! Les consommateurs n’ont pas tardé à baptiser la bouteille de bière ‘Conjoncture’ dans les soirées avec les amis ou pour les fêtes qui ne manquent jamais. Ce de diminuer la capacité sans changer le prix s’est par la suite étendu à bien d’autres domaines de la société nigérienne. Dans l’école, la santé, les transports et en général les services publics : tous ont été vidés ou diminués dans leurs capacités. D’ailleurs, pour le groupe français propriétaire de la brasserie il n’est nullement facile garder le cap. Sur 67 usines implantées dans le continent, c’est seulement celle basée au Niger qui est en perte. On peut en comprendre la raison, entre autre l’orientation musulmane du Pays. Ceci n’a pas empêché à des jeunes de consommer cette boisson après avoir saccagé les églises et les bars dans le mois de janvier 2015. Et est bien entendu un détail qui n’enlève rien au principe antialcoolique du Pays. Ce n’est donc pas par hasard si dans l’étiquette de ‘Bière Niger’ apparaissent deux girafes stationnées sous un arbre au coucher du soleil.

Pour ce qui est du ‘champagne’ la chose semble moins évidente. En effet le Niger, avec un volume de 5 604 bouteilles de 75 cl importées en 2018, se classe au numéro 28 sur 38 Pays africains consommateurs de champagne. Dans le monde le Niger occupe la position numéro 138, ce qui est honorable si comparée à l’index de développement humain. Bien sûr il s’agit d’une consommation réduite mais, en considération du contexte avant brossé, donne des éléments de réflexion. En 2016, en effet, le Pays avait importé un volume de 3 915 bouteilles contre 4 066 en 2017. On est bien loin des premiers Pays africains consommateurs : l’Afrique du Sud, le Nigéria et la Cote d’Ivoire avec un volume de 303 250 bouteilles. D’ailleurs il faut reconnaître que dans le Pays il n’y a pas des raisons pour fêter avec le champagne. Au Sahel, dont le Niger représente le cœur, les gens continuent de disparaître et le terrorisme d’inspiration salafiste élimine les instituteurs, les militaires et les communs citoyens. L’importation du champagne pourrait donc s’expliquer avec le nombre de militaires étrangers sur place qui ont besoin de consolation. Ou alors à cause du nombre croissant des ONG internationales qui, grâce à la chasse aux migrants et à l’occupation néocoloniale du territoire, peuvent bien fêter les financements reçus. Et puis n’oublions pas les invitations des corps diplomatiques, des techniciens chaque fois plus nombreux à cause des chantiers ouverts dans le Pays. Rien de mieux qu’une bouteille de champagne pour signer un accord, pour accompagner la coupe du ruban de prochain hôtel 5 étoiles ou simplement pour fêter au sable qui, avec la poussière et le vent, sèchent les lèvres.

Quant au thé, universellement connu et consommé, et au bissap, plus local, ces boissons apparaissent comme alternatives aux précédentes. C’est pour passer le temps et il on n’est pas si pressés que cela pour préparer, soigner et consommer avec une attention rituelle. Pour qui a un travail et qui n’en a pas, pour les étudiants sans cours depuis des mois, pour qui se trouve au bureau…à chacun son thé, enrichi pas des arômes et avec la saveur de l’amitié. Mais c’est surtout les nomades dans leurs transhumances qui apprécient cette boisson. Veiller sur le bétail et partager la théière, les verres et le sucre pour adoucir la solitude. Le bissap c’est une des boissons typique de certains Pays de l’Afrique Occidentale. Se produit par infusion de la plante d’hibiscus qui grandit dans les zones tropicales. Le bissap a un gout agréable, agit sur l’hypertension artérielle et as une action de protection pour le cœur. Quand cela est possible on le consomme dans des bouteilles recyclées et trouve sa place d’honneur dans le fêtes populaires. Il est de couleur rouge et il plait aussi aux enfants.

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