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Vieux lucide, donc sans illusions, mais toujours pas encore sans espoir quoi qu'il écrive.

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Billet de blog 24 janvier 2012

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CAMUS ? VOUS AVEZ DIT CAMUS ? Tiens ! Pourquoi pas ?

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Reconnaissons qu’en ce mois de janvier 2012, nous sommes confrontés en France, mais aussi dans le monde entier, à une guerre impitoyable, une guerre de classes.

Une minorité de la population détient en propre ou dans des holdings des armes de destruction massive ou de construction, c’est selon, que sont les capitaux. Cette minorité tient la dragée haute aux états, aux hommes politiques, aux institutions et maintient à genoux la grande majorité de la population des terriens en jouant sur la valeur des denrées alimentaires ou les matières premières.

Comme d’habitude, ces masses asservies collaborent au système qui les exploite parce que ce système par le truchement de sa puissance médiatique a réussi à les convaincre qu’il n’y avait pas d’autre système possible et qu’ils devaient donc COLLABORER.

Comme d’habitude, une minorité de ces masses, à l’échelle mondiale, essaie de résister, soit en croyant à des lendemains de lait et de miel après une révolution sanglante, soit dès maintenant en construisant des échanges parallèles, des circuits de production et de commerce mutualisés, en imaginant une monnaie différente des monnaies officielles, le tout au travers d’associations.

Je vois poindre une réhabilitation-utilisation d’Albert Camus que d’aucuns veulent s’approprier pour mieux continuer à se bauger dans les turpitudes du système en place.

Ainsi, il y a eu tentative des transferts des restes d’A. Camus de son si joli cimetière de Lourmarin au Panthéon par N. Sarkosy. Ses enfants s’y sont opposés à juste raison.

F. Hollande a ouvert son show de campagne présidentielle en citant le Prix Nobel, ce qui est une manière de vouloir en recevoir une bénédiction d’outre-tombe.

Michel Onfray vient d’écrire un livre remarquable sur le socialisme libertaire, et sur l’œuvre d’A. Camus qu’il nous aide à reconsidérer.

Quoi de plus formateur que de relire ce qu’A. Camus écrivait dans Combat le 1er octobre 1944. La guerre n’est pas finie. De violents combats ont lieu dans l’est de la France, dans les Ardennes, l’Allemagne est sous les bombes, les français peinent à trouver de quoi manger, les communications ferroviaires sont en reconstruction, des régions entières, la Normandie, la Bretagne sont en ruines. L’épuration sévit à la petite semaine d’autant plus dure avec les petits qu’elle est le fait de résistants de la dernière heure, Camus, lui, résiste déjà depuis 1936 où il a pris fait et cause pour les républicains espagnols, où il a dénoncé la misère de la Kabylie, où il s’est élevé contre les injustices subies par la population arabe en Algérie.

Voici ce qu’il écrit et qui pourrait être réécrit aujourd’hui avec une nuance :

« On nous dit « En somme, qu’est-ce que vous voulez ? » Cette question est bonne parce qu’elle est directe. Il faut y répondre directement. Naturellement, cela ne peut se faire en un ou deux articles. Mais en y revenant de temps en temps, on doit y apporter de la clarté.

Nous l’avons dit plusieurs fois, nous désirons la conciliation de la justice avec la liberté. Il paraît que ce n’est pas assez clair. Nous appellerons donc justice un état social où chaque individu reçoit toutes ses chances au départ, et où la majorité d’un pays n’est pas maintenue dans une condition indigne par une minorité de privilégiés. Et nous appellerons liberté un climat politique où la personne humaine est respectée dans ce qu’elle est comme dans ce qu’elle exprime.

Tout cela est assez élémentaire. Mais la difficulté réside dans l’équilibre de ces deux définitions. Les expériences également intéressantes que nous offre l’Histoire le montrent bien. Elles nous donnent à choisir entre le triomphe de la justice ou celui de la liberté. Seules, les démocraties scandinaves sont au plus près de la conciliation nécessaire. Mais leur exemple n’est pas tout à fait probant en raison de leur isolement relatif et du cadre limité où s’opèrent leurs expériences.

Notre idée est qu’il faut faire régner la justice sur le plan de l’économie et garantir la liberté sur le plan politique. Puisque nous en sommes aux affirmations élémentaires, nous dirons donc que nous désirons pour la France une économie collectiviste et une politique libérale. Sans l’économie collectiviste qui retire à l’argent son privilège pour le rendre au travail, une politique de liberté est une duperie. Mais sans la garantie constitutionnelle de la liberté politique, l’économie collectiviste risque d’absorber toute l’initiative et toute l’expression individuelles. C’est dans cet équilibre constant et serré que résident non pas le bonheur humain, qui est une autre affaire, mais les conditions nécessaires et suffisantes pour chaque homme puise être responsable de son bonheur et de son destin. Il s’agit simplement de ne pas ajouter aux misères profondes de notre condition une injustice qui soit purement humaine.

En somme, et nous nous excusons de  répéter ce que nous avons dit une fois, nous voulons réaliser sans délai une vraie démocratie populaire. Nous pensons en effet que toute politique qui se sépare de la classe ouvrière est vaine et que la France sera demain ce que sera sa classe ouvrière.

Voilà pourquoi nous voulons obtenir immédiatement la mise en œuvre d’une Constitution où la liberté recevra ses garanties et d’une économie où le travail recevra ses droits, qui sont les premiers. (…)

Il reste un mot à dire sur la méthode. Nous croyons que l’équilibre difficile que nous poursuivons ne peut se réaliser sans une honnêteté intellectuelle et morale de tous les instants qui, seule, peut fournir la clairvoyance nécessaire. Nous ne croyons pas au réalisme politique. Le mensonge, même bien intentionné, est ce qui sépare les hommes, ce qui les rejette à la plus vaine des solitudes. (…)

Voilà pourquoi nous pensons que la révolution politique ne peut se passer d’une révolution morale qui la double et lui donne sa vraie dimension. (…)

Si nous faisions l’effort de le comprendre et de l’admettre, nous avons la faiblesse de croire que pour beaucoup de français commencerait une grande espérance. »

Remplaçons « économie collectiviste » de triste mémoire par « économie mixte » et il y a là de quoi nous donner à réfléchir, en ces temps d’élection présidentielle, à ce que nous voulons vraiment pour nous, nos enfants et petits enfants.

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