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Attaché principal des administrations parisiennes / Chargé de mission "Promesse républicaine" (DDCT) / Chargé de TD en droit constitutionnel à Paris Nanterre / Fondateur & Responsable du pôle "vivre ensemble" du think tank "Le Jour d'Après" (JDA) / Président de l'association La Casa Nostra / Membre du club du XXIème siècle / Secrétaire-adjoint de l'association des rapporteurs.trices de la CNDA (Arc-en-ciel) / Fondateur du média "De facto" / Député de l'Etat de la diaspora africaine (SOAD)

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Billet de blog 10 août 2024

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Tous pareils, tous différents : l'épineuse équation de l'égalité...

sur l'île de Noirmoutier, en Vendée... A Safira et Hania, Fatou, Soraya, Marie, Loreleï et Daniela, Emma, Eugénie et Myriam... A la libération des complexes et des complications, en raison de l'image, de la patrie et de l'apparence ! Aux 93 morts, au moins de l'école coranique Al-Tabi’een ! A la fin de l'occupation en Palestine !

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Tribune : la tortueuse et effrayante, mais attrayante, équation de l'égalité ; pourquoi la discrimination positive est-elle une politique indispensable au développement des capables, des cartables, des encartages, des sondages d'opinion fondés et justifiés, sans se substituer au droit de vote, à la démocratie ; à la réduction des écarts, au rattrapage, à la rage et au partage ; à la fin des dérapages, en hommage à l'heureuse "couleur des gyrophares" (AL), parfois effacés par le brouillard et la bruine ? 

Tous pareils, tous différents : cette maxime, cette équation, en réalité contradictoire, résume bien l'un des plus grands nœuds gordiens, gardien de notre époque contemporaine. À l’heure où l’égalité formelle est inscrite dans nos textes constitutionnels et nos lois, promu par le pouvoir gouvernemental comme réglementaire, en particulier la parité, nous constatons chaque jour que l’égalité réelle reste un rêve lointain, un éternel Sisyphe, un récif, encore mieux qu'un récital ou un imaginaire brouillé, pour des millions de nos concitoyennes et concitoyens.

Alors que certaines et certains brandissent - ou bannissent - les principes d’égalité et d'universalisme pour justifier une neutralité aveugle, il est temps de comprendre que ces principes ne se réduisent pas à une simple uniformité de traitement, une unité de façade, une utopie entre camarades, une bonne "rigolade" entre collègues ou entre copines.

Il faut reconnaître la nécessité de politiques spécifiques et spéciales, notamment les discrimination positives, pour construire une société véritablement, mais non parfaitement, égalitaire, notamment sur le plan professionnel. Eventuellement susceptible de refaçonner la morphologie de notre échiquier politique entre la gauche, la droite et le centre. Comme on a pu le constater lors des récentes élections européennes et législatives en juin et juillet 2024.

En théorie, nous sommes tous égaux : chaque être humain doit être traité avec la même dignité, le même respect, les mêmes sentiments de tolérance et de bienveillance, et les mêmes droits fondamentaux, bien qu'il paraissent frustres. Mais cette vision importante, cette visée essentielle, cette voie unique, onirique, qui guide depuis des décennies les institutions républicaines, ignore une réalité cruciale depuis les origines : nous ne naissons pas égaux en droit et en chances, en particulier selon la litote de Simone de BEAUVOIR : "on ne naît pas femme, on le devient".

Le temps ne faisant pas l'affaire, en effet, la couleur de la peau, le genre, les traits physiques, les statuts sociaux, les "ressentis" et les milieux d'appartenance, et tant d’autres vecteurs, véhiculés par des collectifs, par des communautés, continuent de déterminer et de dominer nos vies, nos parcours, nos cœurs, nos cas, nos bannissements.

Si nous sommes tous pareils, en bref, d'une brève, autrement dit : une brèche, à bécher, car elle est belle et beige, elle lance des beignes, couverte d'or ou dénudée : nous sommes bel et bien différents par nos conditions, nos destinées, et les obstacles qui se dressent sur notre chemin, à dessein ou issus de notre inconscient, doivent être levés ; les affronts larvés, lavés.  Navré pour cette matrice intransigeante !

C’est là que l’égalité formelle, celle qui ne tient pas compte des mutations sociales, montre ses limites, se transforme en une croyance secondaire, minoritaire... Comment peut-on prétendre à une égalité réelle quand les désavantages se transmettent de génération en génération, de filiation en filiation, et que les injustices du passé continuent de peser sur le présent, de soupeser les mémoires vives, et non toutes tracées, toutes "racées" (Rachel KAHN), interculturelles et à semer ?

Ignorer ces différences, tenter l'impossible, c’est accepter tacitement que les inégalités perdurent. Et c’est précisément ici que la discrimination positive trouve sa justification, "sa raison d'être" (SIDACTION), sa vertu, en fonction des compétences ou des talents, en devenir... Une forme de cruauté ou de crédulité ? En guise d'abrogation ou de disparition du chaos ? Un K.O. au premier round pour les salarié.e.s, les indépendant.e.s, les artisans, les employé.e.s ou les ouvrier.ère.s ?

Certains voient dans la discrimination positive une rupture, de bonne augure, avec l’idéal d’égalité républicaine. Mais ne nous y trompons pas : il ne s’agit pas d’avantager certains au détriment des autres. Il s’agit de corriger des inégalités structurelles profondément ancrées, qui se propagent, qui prolifèrent, qui pestifèrent... qui se mélangent tout simplement, néanmoins différemment selon le pays.

Les politiques de rattrapage sont un moyen de rétablir un équilibre, là où il a été rompu par des siècles de domination, dénommée avec les "noms d'oiseaux" suivants : "hétéronormée", "blanche", "chrétienne", "bourgeoise", "familiale", rurale ou urbaine, conservatrice ou vers le progrès, en d'autres termes : dans l'opposition ou majoritaire... Elles ne cherchent pas à diviser, mais à unir, en permettant à chacun, à chacune, de repartir de pied ferme, de rebondir, de se raffermer.

Prenons l’exemple des "freinages", des "dérapages" liés à l’apparence physique ou aux signes religieux comme la croix, la kippa ou le hijab. Dans une France où la couleur de la peau, le faciès, l'accoutrement, la laideur dans le viseur, ou encore la coupe de cheveux et l'âge, la douleur ou la naïveté, les natifs dans le collimateur... peuvent encore fermer des portes, il est illusoire de croire que l’égalité formelle suffit. Sans mesures correctives, ces inégalités ne feront que se renforcer, renfrogner toutes et tous, abîmer les "habiletés" (Amartya SEN).
La discrimination positive permet de compenser ces désavantages, en offrant à celles et ceux qui en ont été victimes, des opportunités réelles de réussite, à celles et ceux qui en ont été privées, sans culpabilisation à outrance. Il ne s’agit pas de nier les différences, mais de reconnaître qu’elles ont des conséquences sociales, économiques et politiques, d'une brutalité infernale, qu’il nous faut combattre, dont il faut débattre, dont les cartes sont à rebattre... dont les pires néfastes effets sont-ils à "abattre" ou à dévaloriser, à évaluer, en témoignant d'une certaine compassion ?

Bien sûr, ces politiques doivent être conçues avec soin, au niveau national ou sur le plan territorial. Elles doivent éviter la stigmatisation ou l’essentialisation des différences, les catégorisations à l'emporte-pièce, rompant avec la magnificence de l'espèce, en esquivant la déliquescence de nos civilisations. Mais elles sont indispensables, si nous voulons bâtir des coopérations, des conciliations, où chacune et chacun a réellement les mêmes espoirs de s’épanouir, de se réjouir, avec toutes les cordes à son arc, sans mettre tous les œufs dans le même sac, "sous les pavés la plage", selon des adages immémoriaux qui font encore sens ...

L’égalité des chances ne doit pas être un slogan vide et creux, mais une réalité tangible, et pas seulement une vieille "ficelle", voire une fissure, aussi bien à Paris, à Alger ou Oran, à Tanger ou à Casablanca, à Tunis, à Dakar, à Kinshasa, à Abidjan, à Gaza, Beyrouth, Jérusalem, Tel-Aviv ou Téhéran, ainsi que dans le monde occidental et le grand Orient, le tiers-monde... Pour cela, il faut parfois traiter différemment ceux qui ont été historiquement défavorisés, non pour les privilégier, mais corriger les injustices qu’ils subissent depuis trop longtemps, depuis la nuit des temps, des coupures, des ruptures, des césures, grandes ou petites, notamment entre riches et pauvres, béantes ou modestes, "géantes" ou classiques...

Tous pareils, tous différents ; toutes libérées, séparées ou en union, ennuyeuse ou enjouée : tortueuse et épineuse équation relative au principe d’égalité. Oui, la doctrine de égalité est une équation complexe, mais elle n’est pas insoluble, lorsqu'elle est affublée d'impératifs, affectée ou affectionnée.

En embrassant ces complications, en reconnaissant les différences pour mieux les surmonter, en tenant compete du contexte, nous pouvons avancer vers une société plus juste, au nom de l'intérêt général, reconstruire l'universel, sans verser dans une morale étriquée, étiquetée ou troquée contre le sacré, tronquée par une laïcité mal interprétée, taclée par le dialogue entre les syndicats sur tous les champs, sous tous les angles morts, sous toutes les coutures, sur tous les thèmes de la négociation et d'un droit du travail revu et corrigé. Avec des quotités quantifiées, responsabilisés avec doigté et représentées... En deux mots, des quotas assouplis. Contre l'assoupissement et l'assourdissante normativité. Des sillons, des sentiers, des effusions, le bout du tunnel pour les personnes cobayes ou martyrs.

La discrimination positive, loin d’être une entorse à l’égalité, loin de consister en une entrave, en est au contraire un levier essentiel. Un levier pour que demain, notre République tienne enfin la promesse qu’elle fait à chacun de ses enfants : celle d’une vie libre, égale et célébrant puissamment la fraternité et la sororité, au nom d'un rétablissement public. Dans la décence, non la décadence ou une descendance exclusive.

Luttons pour une égalité réelle, reconnaissons nos différences pour mieux les transcender, et construisons ensemble, non des sosies ou des idem, mais des exemples, des modèles et des modalités, en mode où l’apparence ne sera plus un facteur d’exclusion, mais une composante de la richesse humaine, et de la complexité, une composition dépendant et faisant pencher du bon côté la mécanique horlogère, les "rimes colériques" (CASEY), une mobilité déposée sur le parquet de sa complicité abrasive, "maladive", punitive, même mal exprimée, ou positive !

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