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Attaché principal des administrations parisiennes / Chargé de mission "Promesse républicaine" (DDCT) / Chargé de TD en droit constitutionnel à Paris Nanterre / Fondateur & Responsable du pôle "vivre ensemble" du think tank "Le Jour d'Après" (JDA) / Président de l'association La Casa Nostra / Membre du club du XXIème siècle / Secrétaire-adjoint de l'association des rapporteurs.trices de la CNDA (Arc-en-ciel) / Fondateur du média "De facto" / Député de l'Etat de la diaspora africaine (SOAD)

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Billet de blog 20 octobre 2024

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Laïcité, dis-moi ton nom, ou tais-ton emprise sur nos vies et sur nos passions

A Marie T., étudiante à Paris Nanterre

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Tribune : "Est-il possible sur le plan légal et constitutionnel de revoir le principe de laïcité et la loi de 1905 ? De quelle façon ?"

Le principe de laïcité, consacré par la loi du 9 décembre 1905 relative à la séparation des Églises et de l'État, est une pierre angulaire de la République française, un principe quasi sacré, devenu sacrément pesant pour la plupart de nos concitoyens et nos concitoyennes, trop puissant sur nos vies ou sur nos passions...

Il garantit la liberté de conscience et de culte tout en affirmant la neutralité de l'État à l'égard des religions. Pourtant, plus d'un siècle après son adoption, la question de savoir s'il est possible de revoir ce principe se pose à nouveau, dans un contexte sociopolitique marqué par des débats intenses autour de l'identité nationale, de la place des croyances et de la cohésion sociale, sans prétexter, en toute modestie, le rayer, le ravaler, le remplacer dans notre liste, propre à la France, des valeurs fondamentales, des fondements d'une société encore convalescente des transformations qui lui ont imposé les gouvernants depuis plus de 40 ans, au moins.

Le cadre légal et constitutionnel actuel : intangibilité ou flexibilité ?

La loi de 1905 constitue l’un des textes fondateurs de la République, affirmant que "la République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte" (article 2). Elle repose sur deux principes fondamentaux : la liberté de conscience (article 1) et la neutralité de l'État vis-à-vis des religions. Ces principes sont aujourd'hui enchâssés dans la Constitution de la Ve République, notamment à travers son article 1er, qui dispose que "La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale".

Toute modification de la loi de 1905 doit donc être envisagée sous deux angles : d'une part, sur le plan législatif (réformer la loi elle-même), et d'autre part, sur le plan constitutionnel, puisque le principe de laïcité est aujourd'hui indissociable de la structure républicaine de l'État, il s'en distingue difficilement et compromet notre foi en l'impartialité, il est le fruit de trop nombreuses compromissions, de trop nombreuses récupérations, au détriment de la révélation de la vérité.

Les possibilités de modification légale de la loi de 1905

Sur le plan législatif, il est techniquement possible de modifier la loi de 1905. Comme toute loi, celle-ci peut faire l'objet de révisions ou d'amendements votés par le Parlement. Toutefois, cela nécessiterait une réflexion approfondie pour maintenir l'équilibre entre les droits individuels et les obligations de neutralité de l'État, entre la préservation de nos personnalités et la nature de notre rapport à la chose publique.

Certaines réformes récentes ont déjà modifié la pratique de la loi sans toucher à son cœur. Par exemple, la loi de 2004 sur les signes religieux dans les écoles ou la loi de 2010 interdisant le port du voile intégral dans l'espace public illustrent la capacité du législateur à adapter la laïcité aux évolutions sociétales, mais, surtout, aux desiderata des partis respectifs sans respect pour des textes plus anciens, ou leur interprétation, que l'on falsifie ou que l'on glorifie.

Toutefois, réformer la loi de 1905 elle-même nécessiterait de répondre à des enjeux complexes. Il ne s'agit pas uniquement de la relation entre l'État et les cultes, mais aussi d'un équilibre entre les libertés publiques (liberté de conscience, de culte) et les impératifs de l'ordre public. Revenir sur la neutralité de l'État ou introduire une forme de reconnaissance publique des cultes poserait un problème juridique majeur, tant sur le plan de l'égalité entre les citoyens, entre les citoyennes, que sur la conception même de la laïcité en France, tant sur le plan de la légalité de certaines pratiques, de certaines coutumes que sur la légalité de son utilisation à l'instar de l'ustensile d'une cuisine politicienne dont la culture de gauche a pris le relais. Mauvais. Celui des mauviettes et des pleurs pour nos familles, nos idylles..

L’obstacle constitutionnel : la protection du principe de laïcité

Le principe de laïcité est non seulement protégé par la loi de 1905, mais il est également inscrit dans ce que l'on appelle le "bloc de constitutionnalité", c’est-à-dire l'ensemble des textes ayant une valeur constitutionnelle en France. Ce bloc inclut la Constitution de 1958, le Préambule de la Constitution de 1946, ainsi que la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Le principe de laïcité trouve son fondement dans l'article 1er de la Constitution de 1958, qui dispose que "la France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale".

Le Préambule de 1946, qui fait partie intégrante de la Constitution actuelle, consacre la laïcité dans son article 13 en déclarant que "l'organisation de l'enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l'État". Quant à la Déclaration de 1789, bien qu'elle ne mentionne pas directement la laïcité, elle consacre des droits fondamentaux, tels que la liberté de conscience (article 10), qui sont étroitement liés à la séparation des Églises et de l'État et au respect de la neutralité religieuse.

Cela signifie que toute tentative de modification substantielle du principe de laïcité, notamment une remise en question de la neutralité de l'État vis-à-vis des religions, toucherait à des principes constitutionnels essentiels. Pour modifier ces principes, il ne suffirait pas d'amender une loi ordinaire comme celle de 1905 ; il serait nécessaire de réviser la Constitution elle-même. Cette révision constitutionnelle, prévue à l’article 89 de la Constitution, impose une procédure lourde, nécessitant un vote du Parlement réuni en Congrès (Assemblée nationale et Sénat), avec une majorité des trois cinquièmes, ou l'organisation d'un référendum. Cela garantit une stabilité des principes fondamentaux, comme la laïcité, tout en rendant difficile leur modification sans un large consensus politique et social, que ce soit par l'intermédiaire d'une majorité de représentants et de représentants soudés, sondés à l'avance, de véritable soldats que l'on ne peut solder avec des prix au rabais, ce qui semble difficile dans le contexte actuel de polarisation des débats publics autour de l'identité et de la place des religions dans la société.

Une question avant tout politique et sociétale

En réalité, la question de la modification du principe de laïcité dépasse le cadre strictement juridique. Il s'agit d'un enjeu profondément politique, comme par exemple la question de l'immigration. A tort ou à raison ? Depuis plusieurs décennies, le principe de laïcité fait l'objet de réinterprétations au gré des contextes. Alors que la loi de 1905 visait principalement à mettre fin à la mainmise de l'Église catholique sur l'État, les débats contemporains se cristallisent autour de la gestion de la diversité religieuse, notamment la place de l'islam en France, une place si volatile, si versatile, si clivante...

Les tensions liées à la pratique religieuse dans l’espace public, les revendications identitaires et les questions de sécurité publique mettent à l’épreuve la capacité de la loi de 1905 à répondre aux défis du XXIe siècle. Certains plaident pour une "laïcité de combat", plus stricte, tandis que d'autres appellent à une laïcité plus "inclusive", permettant une plus grande reconnaissance des particularismes religieux. Entre ces deux visions, un rééquilibrage pourrait être envisagé, mais sans altérer les fondements de la neutralité de l'État, sans brader notre patrimoine bâtimentaire ou vestimentaire !

Conclusion : un cadre légal flexible mais une révision difficile

En conclusion, il est techniquement possible, sur le plan légal, de modifier la loi de 1905. Cependant, toute modification toucherait aux fondements constitutionnels de la République et nécessiterait donc une révision constitutionnelle, une procédure complexe et exigeante. La question de la laïcité reste avant tout une question de société. Elle renvoie à des choix profonds sur la nature du vivre-ensemble en France. Pour réviser la loi de 1905 et le principe de laïcité, encore faudrait-il s’assurer que ce changement ne bouleverse pas l’équilibre des droits fondamentaux qui fait la spécificité de la République française, son originalité, sa pertinence et sa permanence : le permis de reconsidérer, de rétablir et de reconstruire, sans affecter sa racine, l'aliment de nos émotions, son foyer, son socle, immanent à foison, la toison du caisson, de la caution de notre âme.

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