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Attaché principal des administrations parisiennes / Chargé de mission "Promesse républicaine" (DDCT) / Chargé de TD en droit constitutionnel à Paris Nanterre / Fondateur & Responsable du pôle "vivre ensemble" du think tank "Le Jour d'Après" (JDA) / Président de l'association La Casa Nostra / Membre du club du XXIème siècle / Secrétaire-adjoint de l'association des rapporteurs.trices de la CNDA (Arc-en-ciel) / Fondateur du média "De facto" / Député de l'Etat de la diaspora africaine (SOAD)

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Billet de blog 28 août 2024

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Colorblindness ou célébration de la différence ? Une question caricaturée...

por Hania. Par Mehdi ALLAL, fonctionnaire territorial et enseignant à Paris Nanterre Université...

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Tribune : "Colorblindness" ou célébration de la différence ? Une question cruciale pour nos politiques publiques

Dans nos sociétés contemporaines, de plus en plus hétérogènes et interconnectées, une question fondamentale s'impose aux décideurs publics : faut-il promouvoir des politiques publiques "aveugles" aux différences, sous le prisme de la "colorblindness", concept d'origine anglo-saxonne, ou au contraire célébrer la diversité en s’appuyant sur elle pour mettre en œuvre des actions positives ciblées ? Cette interrogation n'est pas seulement théorique ; elle touche au cœur des valeurs qui fondent nos démocraties, à notre conception de la justice sociale, et à la manière dont nous envisageons l'avenir de nos sociétés.

Colorblindness : un idéal utopique ?

Le principe de la "colorblindness", littéralement "l'aveuglement à la couleur", repose sur une idée séduisante : traiter chaque individu de manière égale, sans considération pour des différences telles que la race, l'origine ethnique, sociale ou la religion. Cette approche prétend offrir une neutralité bienveillante, évitant ainsi la reproduction des stéréotypes et des discriminations. En se concentrant sur les mérites individuels et non sur les caractéristiques collectives identitaires, la "colorblindness" semble promouvoir une société où chacun a une chance égale de réussir, de s'épanouir.

Cependant, cet idéal de neutralité est en réalité une utopie trompeuse. En ignorant les différences, la "colorblindness" échoue à reconnaître les inégalités structurelles qui persistent dans nos sociétés. Par exemple, comment peut-on prétendre traiter de manière égale un enfant issu d'une minorité ethnique, vivant dans un quartier défavorisé, et un enfant d'une famille privilégiée, quand leurs conditions de départ sont si inégales ? L'aveuglement aux différences, en fermant les yeux sur les désavantages accumulés par certains groupes, finit par perpétuer ces inégalités sous le masque de l'égalité formelle.

Célébrer la différence : une nécessité pour l'égalité réelle

À l'inverse, célébrer la différence implique de reconnaître que les identités individuelles et collectives influencent profondément les opportunités offertes à chacune et à chacun, influent sur les trajectoires. Cette approche ne vise pas à diviser, mais à comprendre et à corriger les déséquilibres systémiques. Les politiques publiques ciblées, fondées sur une reconnaissance des différences, permettent de mettre en œuvre des actions positives pour compenser les discriminations passées, présentes, voire pour anticiper l'avenir. Qu'il s'agisse de quotas pour l'accès à l'emploi, de bourses d'études pour les minorités, ou de programmes spécifiques de soutien scolaire, ces mesures reconnaissent que l'égalité des chances passe parfois par un traitement différencié.

Contrairement à ce que d'aucuns pourraient penser, célébrer la différence n'implique pas de favoriser un groupe au détriment d'un autre, mais de travailler activement à réduire les écarts. C'est aussi reconnaître la richesse culturelle et cultuelle que la diversité apporte à une société, tant en termes de créativité, d'innovation que de cohésion sociale. En s’appuyant sur les différences, on construit une société plus juste, où chaque individu, quelle que soit son origine, peut véritablement se réaliser et prendre position.

Vers une société plus juste

Ainsi, la véritable question n'est pas tant de choisir entre "colorblindness" et célébration de la différence, mais de savoir quelle vision de la justice sociale nous voulons promouvoir. Voulons-nous une société où l'égalité formelle masque des inégalités profondes, ou une société qui, en reconnaissant et en célébrant la diversité, se donne les moyens d'assurer une égalité réelle pour tous ?

Le choix est clair. Les politiques publiques doivent non seulement reconnaître les différences, mais les intégrer activement dans leurs dispositifs pour corriger les déséquilibres et valoriser les immenses atouts de notre pluralité. Ignorer ces différences, c'est nier les réalités vécues par une grande partie de nos concitoyens ; les célébrer, c'est construire un avenir plus juste, plus inclusif et plus prospère pour toutes et tous, quels soient les critères qui nous séparent et qui nous réunissent à la fois, par un processus de ressemblance via la différenciation, et non via l'essentialisation qui nous enferme.

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