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Attaché principal des administrations parisiennes / Chargé de mission "Promesse républicaine" (DDCT) / Chargé de TD en droit constitutionnel à Paris Nanterre / Fondateur & Responsable du pôle "vivre ensemble" du think tank "Le Jour d'Après" (JDA) / Président de l'association La Casa Nostra / Membre du club du XXIème siècle / Secrétaire-adjoint de l'association des rapporteurs.trices de la CNDA (Arc-en-ciel) / Fondateur du média "De facto" / Député de l'Etat de la diaspora africaine (SOAD)

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Billet de blog 29 septembre 2020

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Contre l'instrumentalisation des attentats terroristes

La terrible attaque au hachoir devant les anciens locaux de Charlie Hebdo, perpétrée vendredi dernier, n'aura pas échappé à la règle : chaque attentat terroriste en France, et maintenant dans le monde entier, constitue un énième prétexte pour dénoncer le prétendu dévoiement et les dérives imaginaires de l'Islam de France. Par Mehdi Thomas Allal, Nadjib Sellali et Asif Arif.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

par Mehdi Thomas ALLAL, maître de conférences à Sciences Po &
responsable du pôle "vivre ensemble" du think tank Le Jour d'Après (JDA) ;
Nadjib SELLALI, Journaliste réalisateur ;
et Asif ARIF, avocat au barreau de Paris, essayiste spécialisé sur les questions d'islam & laïcité.

La terrible attaque au hachoir devant les anciens locaux de Charlie Hebdo, perpétrée vendredi dernier, n'aura pas échappé à la règle : chaque attentat terroriste en France, et maintenant dans le monde entier, constitue un énième prétexte pour dénoncer le prétendu dévoiement et les dérives imaginaires de l'Islam de France.

Pourtant, les citoyens français de confession et de culture musulmane sont dans leur immense majorité, ainsi que dans leur immense diversité, opposés à toute forme de violence et favorables à la liberté d'expression.

Différents médias, et plusieurs responsables politiques - non des moindres - exigent souvent d'eux qu'ils se désolidarisent officiellement des terroristes, comme si leur confession les lavait d'un sentiment de culpabilité présumé, voire de complicité avec les fanatiques. Cette présomption de complicité à leur endroit devient malsaine, tant elle contribue au pourrissement des débats et à l’absence des principaux concernés de tous les plateaux de télévision.

Certains dirigeants, pour n’en nommer qu’un seul, Manuel Valls, dans les colonnes du Parisien dimanche matin, s'en donne à cœur joie pour faire de l'islamisme l'un des premiers maux de notre siècle, en cette période inédite de pandémie, autrement plus ravageuse pour l'ensemble de notre planète.

Sa volonté de revenir sur les devants de la scène politique en France ne fait plus de doutes, et il n’a pas oublié ses vieux démons, lui qui voulait faire de la laïcité la question centrale de sa campagne présidentielle. Après avoir trahi le Parti socialiste – en ne respectant pas les résultats d’un scrutin interne – et la France – en désertant les bancs de l’Assemblée Nationale – Manuel Valls souhaite faire la leçon aux Français sur l’islamisme.

Car il faut le répéter sans cesse : l'islam ne représente pas un danger pour la France. Il a sa place, comme n'importe quelle autre religion minoritaire, au sein de notre paysage pluriconfessionnel. Loin de constituer une plaie , cette religion, telle qu’elle est pratiquée par l’immense majorité des musulmans en France, est une force pour notre pays des droits humains.

La laïcité ne constitue pas un instrument de guerre contre les croyants, mais davantage un outil pour faire coexister les différents cultes au sein de notre bien commun qu'est la République. Rappelons cette phrase de Jaurès qui souhaitait « résoudre la question religieuse pour traiter la question sociale ».

Est-ce un hasard si la personne qui a tenté de désarmer l'auteur du lâche attentat du 25 septembre est un Algérien ayant été pris pour cible par la police, menotté, enfermé, accusé à tort, alors qu'il s'agit d'un "héros très discret" ? Est-ce un hasard, hormis quelques rares exceptions sur les réseaux sociaux comme Twitter, si personne ne s'est soucié de le remercier et de présenter, au nom de notre pays, des excuses publiques ?

Les chaînes d'information en continu et les dirigeants politiques français n'ont pas fini d'instrumentaliser les attentats pour satisfaire leur base électorale et conforter, ainsi, leur soif de pouvoir.

Les statistiques sont formelles : désormais, après chaque attentat, les insultes fusent et les plaintes pour discrimination augmentent à due proportion ; chaque musulman devient un suspect, soit en raison de phrases qu’il a prononcées, de tweets qu’il a partagés ou encore d'une mosquée qu’il aurait fréquentée. Ce climat, entretenu par plusieurs groupuscules proches de l’extrême droite, devient anxiogène et contreproductif.

Bien évidemment, nous ne cautionnons pas les propos de tel ou telle expert-e, qui considère que la nouvelle publication des caricatures du prophète, ou encore le contexte des assises pour juger les auteurs des premiers attentats de janvier 2015, rendait propice un nouvel déferlement de haine.

Tout comme l'actuel recteur de la mosquée de Paris, nous serons éternellement des ardents défenseurs de la liberté de de la presse, y compris celle de Charlie Hebdo. Nous sommes opposés au délit de blasphème, et considérons que les personnes qui sont choquées par certains Unes peuvent très bien se détourner et ne pas acheter ce type de journaux.

Non, la liberté d'opinion n'est pas négociable ici ou ailleurs, et doit également être défendue dans les enceintes internationales. En définitive, rappelons que les premières victimes des fondamentalistes ayant choisi de passer à l'acte sont les musulman-e-s eux-elles mêmes, que ce soit directement lorsqu'ils vivent proches de foyers de tension, ou indirectement lorsqu'ils vivent dans des pays occidentaux. Essayons de dénouer ce cercle vicieux et rendons justice à nos compatriotes qui leur sont bienveillants…

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