Le mois de mai débute dans un contexte de forte contestation sociale et de mobilisation.
En cause, les mesures néolibérales du président Macron qui, un an tout juste après son élection, ouvrent progressivement la voix à un mouvement
unitaire contre sa politique.
Comme partout en France, ici à Aubervilliers, nous nous mobilisons.
Aux côtés des agents territoriaux pour défendre les services publics et leurs conditions de travail.
Aux côtés des personnels des EHPAD, les personnels hospitaliers notamment ceux de l’hôpital Ville Evrard qui se mobilisent contre la suppression des urgences psychiatriques.
Aux côtés des futur-e-s bachelier-e-s et étudiant-e-s.
Le 22 avril dernier à Aubervilliers, a été posée la première pierre du Campus Condorcet, l’un des plus importants pôles universitaires de France.
Si nous nous réjouissons de son implantation sur notre commune, nous soutenons les étudiant-e-s et les professeur-e-s qui se mobilisent contre la sélection à l’université instaurée par la loi Orientation et Réussite des Étudiants.
Le mouvement de grève des cheminot-e-s s’intensifie. Malgré les tentatives politiques et médiatiques de faire croire que la majorité des Français-e-s le désapprouve, la caisse de solidarité pour les grévistes, qui atteint plus de 900 000 euros à ce jour, manifeste le soutien dont il bénéficie.
Aubervilliers est solidaire et l’a témoigné publiquement en votant un vœu en soutien aux agent-e-s mobilisé-e-s contre la privatisation des entreprises publiques.
La mobilisation c’est aussi celle des militant-e-s qui, par leurs actions, veulent rappeler l’exigence de solidarité.
Partout en France, des campements de migrant-e-s voient le jour, majoritairement dans les territoires populaires à l’instar de celui situé à la Porte d’Aubervilliers où l’on dénombre plus d’un millier de personnes vivant dans des conditions déplorables. Ce théâtre de la misère renvoie l’image d’une
France inhumaine et indigne.
Les maires se retrouvent démunis face à la politique migratoire de ces dernières années qui alimente la xénophobie et concentre les débats autour d’une idéologie d’extrême droite.
Les communes populaires comme Aubervilliers sont solidaires et interpellent l’Etat pour qu’il assure ses responsabilités. S’il mettait à notre disposition les moyens nécessaires à cette cause d’ordre national voire européen, Aubervilliers ne se déroberait pas, dans l’attente de leur régularisation.
Elle ferait acte de solidarité comme l’a fait notre ville jumelée Iéna en Allemagne. Une ville de 100 000 habitants qui, grâce au soutien de l’Etat, a pu accueillir sur sa commune plus de 2000 réfugié-e-s.
Aujourd’hui, les maires sont tout aussi impuissant-e-s lorsque des personnes en situation irrégulière se retrouvent à la rue suite à l’évacuation de leurs logements de fortune.
Comment leur venir en aide alors que la Préfecture de Seine-Saint-Denis, à travers une bureaucratie qui contredit l’Etat de droit, complique les parcours de régularisation ?
Un an après son élection, le « nouveau monde » du Président Macron n’est clairement pas le nôtre. Ce n’est pas celui des maires des villes populaires qui chaque jour, doivent faire face aux inégalités creusées par les gouvernements successifs de ces trente dernières années.
Aujourd’hui, le bilan n’est pas glorieux. En supprimant les contrats aidés, en baissant les APL, en retirant 13 milliards d’euros aux collectivités territoriales et en instaurant la contractualisation qui va nous forcer à réduire les actions des municipalités sous peine de sanctions financières, les inégalités territoriales vont augmenter.
Pourtant des solutions existent notamment au travers d’une politique de la ville ambitieuse et au fait des réalités des banlieues. L’objectif premier est de remettre les besoins des classes populaires au centre du débat.
C’est le sens de l’Appel de Grigny de novembre dernier, dont je suis signataire aux côtés de plusieurs centaines de maires. Il a débouché sur le plan Borloo présenté au Premier Ministre le 26 avril dernier et pour lequel se sont investis des élus locaux et des associations de terrain.
Si certaines mesures s’inspirent d’un modèle libéral à l’instar des emplois francs ou de l’ « académie des leaders », d’autres en revanche s’appuient sur des revendications portées depuis de nombreuses années par des actrices et acteurs de terrains et les maires.
Parmi elles, celle de l’aide aux communes pauvres. Avec 41% de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté, Aubervilliers est concernée au premier chef. C’est aussi celle relative au développement de la mobilité. Une mesure nécessaire dans notre ville au moment même de l’annonce du report
de la ligne 15 et celle du retard, malgré 6 années de chantier, du prolongement de la ligne 12 au centre ville.
Les banlieues méritent donc mieux que des longs discours sur la réussite individuelle. Ce ne sont pas Uber, dont le siège est implanté à Aubervilliers, ou les emplois francs qui feront l’affaire.
Nous voulons également être fixés sur les financements de la rénovation urbaine, pour agir concrètement et mettre un terme aux études à répétition qui renvoient aux calendes grecques l’amélioration de l’habitat et du cadre de vie.
Pour exemple les opérations de l’ANRU1 de 2007 sont loin d’être achevées.
Il est temps aujourd’hui de s’attaquer à la racine même des inégalités qui bouchent les espoirs de nos concitoyen-ne-s et suscitent la défiance à l’égard des institutions.
Nous voulons donc un investissement massif dans l’école, la culture, le numérique, le logement, la santé, la protection contre les violences, l’emploi et
les transports.
Nous voulons un véritable plan de lutte contre les discriminations que les jeunes d’Aubervilliers et de Seine-Saint-Denis ne cessent de dénoncer.
Enfin et surtout, nous voulons l’égalité républicaine entre les communes.
Alors que les villes riches d’Ile-de-France engrangent les bénéfices d’une politique d’exclusion au mépris de la loi SRU, les communes populaires de la Seine-Saint-Denis continuent d’accueillir des populations modestes.
A Aubervilliers, malgré les baisses de dotations, les menaces et les pressions sur les dépenses de fonctionnement des communes, nous tentons d’assurer des services publics de qualité, notamment pour l’éducation, la santé, la petite enfance, le sport et la culture.
C'est pourquoi, à l’heure de l’indispensable convergence des luttes, nous devons, nous les maires des communes populaires, rejoindre la mobilisation pour faire entendre les voix de notre population et faire respecter ses droits.
Mériem Derkaoui
Maire d’Aubervilliers
Vice-présidente du Conseil Départemental de la Seine-Saint-Denis