
La loi républicaine n'interdit pas cette tenue, ni à la plage (comme l'a rappelé le Conseil d’État en annulant les arrêtés municipaux qui le prohibaient à la fin de l'été 2016), ni à la piscine, comme l'a rappelé la décision du défenseur des droits n°2018-297 publiée le 12 décembre 2018.
Le Défenseur des droits a été saisi par une femme, Madame X. Un établissement municipal lui a refusé le droit de se baigner en burkini en juillet 2017. Le règlement intérieur a été modifié lors de son séjour. À l'arrivée de Mme X, le 8 juillet, il ne prohibait explicitement que de « se baigner habillé» et imposait le « slip de bain » pour les hommes et « les maillots de bain » pour les femmes. Mme X fait alors l'objet d'injures de la part de vacanciers. Le 14 juillet, le directeur lui remet un règlement qui a été modifié. L'interdiction du burkini a été rajouté.
Après une tentative de conciliation par l'intermédiaire du CCIF (Collectif Contre l'Islamophobie en France), Madame X saisit le Défenseur des droits qui, après enquête contradictoire, où l'établissement a été incité à réagir et à développer de nouveaux arguments justifiant l'interdiction au fur et à mesure que les précédents tombaient, conclut que cette interdiction constitue bien une discrimination.
Le premier argument apporté par l'établissement est celui de l'hygiène. C'est celui qui nous intéresse ici. On se reportera à la lecture de la décision pour tous les autres motifs invoqués pour justifier une interdiction.
L'argument de l'hygiène est décliné à l'envi, de la gauche dite universaliste à l'extrême-droite, en passant par la France Insoumise. Ce matin, sur BFM, la porte-parole du gouvernement évoquait sans citer de sources précises des « normes » d'hygiène : « Vous ne pouvez être ni topless, ni en burkini dans une piscine, et ce pour des questions d'hygiène et de sécurité. Ça n'est en aucun cas le fait de normes qui ont été édictées pour empêcher des personnes de telle ou telle communauté religieuse »
Or, le Défenseur des droits a cherché de telles normes qui justifieraient une interdiction : elles n'existent pas. Le Code de la santé publique et le Code du sport imposent des normes d'hygiène et de sécurité mais « aucune disposition législative ou réglementaire ne traite spécifiquement des tenues vestimentaires ». Cela implique que ce point soit laissé à l'appréciation des établissements, à conditions que le règlement intérieur respecte les principes élémentaires de droit. Or ce que la loi n'interdit pas est a priori autorisé.
Le Défenseur des droits a contacté Santé Publique France, qui s'est déclaré incompétente, et la direction juridique du ministère des sports. Sur les questions d'hygiène, "le ministère des sports n’a pas relevé a priori d’incompatibilité de principe ou de risques majeurs et/ou spécifiques au port du burkini en matière d’hygiène et de sécurité. D’ailleurs, plusieurs piscines autorisent le port du burkini." Il rappelle bien que le Code de la santé publique ne précise rien, que les établissements sont compétents pour décider, mais qu' une interdiction ne pourrait être légale « que sur la base de raisons objectives telles que l’hygiène et/ou la sécurité, mais aussi démontrables afin de ne pas aboutir à une discrimination indirecte pour des raisons religieuses ».
La porte-parole du gouvernement dément donc, sans apporter la moindre source, un des ministères qu'elle est censée représenter. Et en évoquant des « normes » qui n'existent pas, en refusant s'apporter des démonstrations d'un problème d'hygiène spécifique au burkini, elle incite donc, malgré ses dénégations et au dire même du ministère des sports, à des discriminations indirectes pour des raisons religieuses.