Mercredi 26 juin, le Canard Enchainé révélait qu’une compagnie de CRS était noyautée de fascistes antisémites. Ils échangeaient notamment sur WhatsApp des messages racistes et antisémites. Quand la hiérarchie a été alertée, non seulement un des brigadiers les plus actifs dans la diffusion de ces messages a été promu, mais le commandant lanceur d’alerte a subi une enquête interne de l’IGPN, suite à une demande du ministère de l’Intérieur – qui n’a par contre pas poursuivi les auteurs des messages racistes et antisémites. Sous Gérald Darmanin, l’antisémitisme policier est récompensé, la lutte contre l’antisémitisme est punie.
Quand le magazine France-Tireur sort sa Une du mercredi 26 juin, « Ni RN, ni LFI », ces faits ne sont pas connus. D’autres fait indéniables, confirmant un vrai problème à l’égard de l’antisémitisme au sein de l’État, du gouvernement et du parti présidentiel, étaient par contre de notoriété publique et devraient susciter une réaction adéquate alors que le magazine est en pleine campagne : l’hommage planifié à Charles Maurras, la reprise par Emmanuel Macron en novembre 2018 du discours de l’extrême-droite antisémite faisant de Pétain un « grand soldat », et le soutien aux outrances antisémites répétées de Gérald Darmanin.
Ce dernier a été nommé au gouvernement alors que ses positions négationnistes, refusant toute responsabilité française dans la rafle du Vel d’Hiv, étaient connues. En 2012, il écrivait sur Twitter : « La France n’est pas responsable du Vel d’Hiv, car la France était à Londres ». En tant que ministre de l’Intérieur, en 2022, il attribuait la responsabilité de la rafle à la « police de Vichy » et non la police française. Gérald Darmanin a ainsi pu promouvoir une régression de la position mémorielle française en concession à l’extrême-droite antisémite.
En octobre 2020, le ministre de l’Intérieur se dit choqué par les rayons casher des supermarchés. Rayons casher que le RN veut interdire.
En février 2021, Gérald Darmanin publie aux éditions de l’Observatoire un livre où il rend hommage à la politique napoléonienne à l’égard des juif-ves – politique pourtant régressive comparée à l’émancipation décrétée sous la Révolution. Le ministre de l’Intérieur y écrit : « que « Napoléon [….] s'intéressa à régler les difficultés touchant à la présence de dizaine de milliers de Juifs en France. Certains d'entre eux pratiquaient l'usure et faisaient naître troubles et réclamations. » Pour le ministre de l'Intérieur d'Emmanuel Macron, les Juifs étaient donc des corps étrangers qui posaient problème du fait de leur rapport à l'argent. Les discriminations, violences et pogroms dont ils faisaient l'objet sont appelés par Gérald Darmanin « troubles et réclamations » dont seuls les Juifs sont responsables, puisque ce sont eux qui les « faisaient naître » .
Les responsables de Franc-Tireur, qui, à la date de publication de ce billet, n’ont toujours pas réagi aux révélations du Canard Enchainé sur l’antisémitisme récompensé par les services du ministère de l’Intérieur, n’ont pas appelé à sanctionner électoralement Gérald Darmanin, ni à faire retirer sa candidature. Une telle tolérance à l’antisémitisme (mais aussi aux violences sexistes et sexuelles que Darmanin a lui-même reconnues, au séparatisme homophobe, etc), quand il vient du pouvoir, mériterait de la part des responsables du magazine d’être expliquée.