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Le 23 août 2025, la ville de Saint-Raphaël a inauguré le premier monument en France dédié aux victimes du communisme. Située dans le parc Beaurivage, la stèle sculptée par Nicola Rosini Di Santi représente un homme tentant de briser deux murs, symbole de l’oppression et de la chute des régimes totalitaires. L’initiative, voulue par le maire Frédéric Masquelier (LR) et l’historienne Virginie Girod, s’inscrit dans le cadre de la Journée européenne de commémoration des victimes du stalinisme et du nazisme, instaurée par le Parlement européen en 2009.
Si de tels monuments existent déjà en Europe de l’Est, en Allemagne ou encore aux États-Unis, la France n’avait jusqu’ici jamais consacré d’hommage public aux millions de victimes du communisme. Une absence que le maire dit vouloir réparer : « Il n’est pas normal qu’on se souvienne des crimes nazis – ce qui est évidemment légitime – mais que l’on taise ceux du communisme, pourtant tout aussi dévastateurs.
Les crimes du communisme : un bilan effroyable
Selon le Livre noir du communisme (1997), les régimes se réclamant du marxisme-léninisme ont causé la mort de près de 100 millions de personnes au XXe siècle.
- URSS : famines organisées (Holodomor en Ukraine, 1932-1933), Grande Terreur, déportations massives au Goulag. Environ 20 millions de morts.
- Chine maoïste : le “Grand Bond en avant” (1958-1962) provoque une famine gigantesque, responsable de 30 à 45 millions de morts. La Révolution culturelle fera encore des centaines de milliers de victimes.
- Cambodge de Pol Pot (Khmer rouges, 1975-1979) : génocide ayant exterminé près de un quart de la population.
- Europe de l’Est : répressions sanglantes (Budapest 1956, Prague 1968), emprisonnements politiques, surveillance de masse.
À ces chiffres s’ajoutent les millions de personnes brisées par les camps de travail, l’exil, la censure et la privation de liberté.
Le rôle du PCF en France
Face à cette mémoire, la réaction du Parti communiste français (PCF) est paradoxale. Le parti s’est indigné de l’initiative de Saint-Raphaël, dénonçant une “instrumentalisation politique” et parlant de “falsification historique”. Pourtant, le PCF fut longtemps lié à Moscou :
- Dans l’immédiat après-guerre, il se présentait comme le “parti des 75 000 fusillés” et tirait un immense prestige de la résistance.
- Mais dès les années 1930, il avait suivi les consignes du Kremlin, y compris lors du pacte germano-soviétique (1939), qui lia Staline à Hitler avant l’invasion de l’URSS.
- Jusqu’aux années 1980, le PCF conserva une ligne dure, soutenant l’URSS et minimisant les crimes de Staline.
- Ce n’est qu’après la chute du Mur de Berlin que le parti a commencé à se distancier de ce passé, sans jamais procéder à une condamnation claire et explicite comparable à celle du nazisme par l’extrême droite.
Aujourd’hui encore, une partie de la gauche radicale minimise ou relativise les crimes communistes, les comparant systématiquement à ceux du nazisme, voire les justifiant au nom de la “lutte anticapitaliste”.
Un tabou mémoriel en France
La controverse autour de la stèle de Saint-Raphaël illustre un tabou encore vivace. Alors que les crimes du nazisme sont enseignés, commémorés et inscrits dans le marbre de la République, ceux du communisme restent souvent relégués au second plan, voire niés par certains courants politiques.
En inaugurant ce monument, Saint-Raphaël rejoint le mouvement de nombreux pays d’Europe centrale et orientale qui, après avoir subi la dictature soviétique, considèrent essentiel de témoigner, alerter et se souvenir. Pour ses promoteurs, il ne s’agit pas d’opposer les mémoires, mais de les compléter : « Il ne peut y avoir de hiérarchie dans l’horreur. Toutes les victimes méritent reconnaissance. »
La stèle de Saint-Raphaël est bien plus qu’un simple monument local : elle vient rappeler une part occultée de l’histoire, et confronter la France à ses propres ambiguïtés vis-à-vis du communisme. Elle soulève une question essentielle : pourquoi, quatre décennies après la chute du Mur de Berlin, est-il encore si difficile d’honorer la mémoire des millions de victimes du totalitarisme rouge ?