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Billet de blog 3 juillet 2010

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Ethique du journaliste

Ce billet se fait l'écho d'une polémique entre journalistes aux USA qui s'est développée suite au limogeage par le président Obama du général Stanley McChrystal

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Ce billet se fait l'écho d'une polémique entre journalistes aux USA qui s'est développée suite au limogeage par le président Obama du général Stanley McChrystal, alors responsable des opérations militaires en Afghanistan. Le thème, assez classique, tourne autour de ce que peut ou ne peut pas, ce que doit ou ne doit pas révéler un journaliste.

En ce qui concerne le limogeage du général McChrystal, je vous renvoie à l'article de Thomas Cantaloube sur Mediapart ou à divers billets sur le blog de Rimbus tel que celui-ci.

Tout commence par un très long article de Michael Hastings sur le journal Rolling Stone : The Runaway General. Cet article est mis en ligne le 22 juin (le bimensuel est en kiosque le 25) mais les bons morceaux ont fuité les jours précédents dans la presse (Washington Post entre autres). Courrier International en reprend de larges extraits traduits dans son numéro 1026 daté du 1er juillet.

La particularité de cet article (dont je vous recommande la lecture), sorte de reportage-portrait est que, outre une analyse de la situation en Afghanistan et une réflexion sur la stratégie actuelle dite contre-insurrectionnelle, le journaliste n'hésite pas à reproduire de nombreux propos tenus en "off" (en privé) par le général McChrystal. L'article commence d'ailleurs par : "Comment ai je pu me faire baiser pour aller à ce diner ?" (variantes de traduction possibles), exclamation du général à la perspective d'un diner avec notre ministre de la défense, Hervé Morin. Au fil des sorties parfois crues du général rapportées dans l'article, en prennent pour leur grade, le vice président Joe Biden, l'ambassadeur américain à Kaboul, Karl Eikenberry (Ex lieutenant général - 3 étoiles- de l'armée américaine) et divers autres conseillés "planqués" à la Maison Blanche.

Face à un tel étalage dans la presse, Barack Obama n'avait plus le choix, sauf à risquer de montrer sa faiblesse : Le 23 juin le général McChrystal, convoqué à la Maison Blanche, présente sa démission qui est acceptée par le président.

Précisons que ni les qualités militaires de Stanley McChrystal ni la stratégie suivie sont mises en cause dans cette démission. C'est plus un problème d'insubordination "verbale" et d'inadéquation du personnage et de son comportement avec la dimension "politique" incontournable qui colle au poste de commandant des forces américaines et de celles de l'OTAN en Afghanistan.

Le 24 juin, David Brooks, célèbre éditorialiste du journal The NewYork Times, écrit The Culture of Exposure qui sera publié le 25 sur le journal.

Point de vue assez intéressant qui prend exemple sur le cas McChrystal pour conclure sur les risques qu'entraîne cette "éthique" du déballage dans le journalisme : "L'éthique de l'étalage avec sa mise en avant incessante de la destruction de la vie privée et de l'affichage des impuretés a chassé les braves gens de la vie publique, miné la confiance du public dans les institutions et mis la trivialité au dessus de l'important".

La charge la plus virulente est venue de Lara Logan, chef des correspondants à l'étranger de CBS News, qui dans l'émission de CNN,"Reliable Sources" du 27 juin a démoli le reporter de Rolling Stone, Michael Hastings. C'est assez bien décrit dans cet article du journal The Huffington Post où l'on peut voir les video de Lara Logan ainsi qu'une interview de Michael Hastings (avant celle de Lara Logan).

Lara Logan n'y va pas par quatre chemins en accusant le journaliste de mensonges - "je n'y crois pas". Elle rappelle aussi qu'il y a des règles tacites interdisant à un journaliste de rapporter les éléments embarrassants -"c'est une question de confiance", etc.

Dès le 28 juin Rolling Stone réagit par Matt Taibbi et son article "Lara Logan, You Suck" (Lara Logan, tu crains - je préfère traduire avant toute confusion) où il dénonce un journalisme de connivence entre les journalistes dits "respectables" et les allées du pouvoir et de la politique : "Eh, trous du cul, vous ne travaillez pas pour la personne que vous couvrez".

"Ils n'ont pas besoin de votre aide, mais vous la leur donnez malgré tout, tellement vous êtes avides de faire partie du club".

Il rappelle enfin que les journalistes travaillent pour leur lecteurs / téléspectateurs, "ceux qui n'ont pas les moyens de faire émerger la vérité et de la mettre sur la place publique". Des propos que ne devrait pas désavouer Jean-Paul Yves Le Goff.

Le débat continue dans la presse US mais je vais arrêter de vous noyer sous des références et des liens en anglais.

J'ai néanmoins trouvé intéressant de mettre en perspective ces éléments d'outre atlantique avec ce qui se passe en France, avec l'affaire Woerth par exemple. A ce titre le jugement du tribunal de Paris sur les plaintes contre Mediapart de Mme Bettancourt et de Mr de Maistre pour atteinte à l'intimité de la vie privée fait réfléchir (lire l'article d'Edwy Plenel).

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