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retraité de l'ingénierie informatique et aéronautique et de l'enseignement dit supérieur (anglais de spécialité), écrivain et esprit curieux

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Billet de blog 9 mars 2014

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Pourquoi Médiapart est-il si faible en politique étrangère?

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Comme beaucoup de lecteurs affligés par la médiocrité chronique de Médiapart sur les sujets relevant de la politique extérieure (en particulier ces derniers temps sur l'Argentine, le Vénézuela, l'Ukraine...), je cherche à compléter et à nuancer la sous-information médiapartienne, à partir de mon expérience personnelle des pays concernés, d'une part, et de sources variées en diverses langues, d'autre part.

Je voudrais ici faire part de quelques réflexions sur quatre causes profondes de cette médiocrité qui me semble hélas présentement irrémédiable:

1°) la logique de l'urgence journalistique et la maigreur de ses ressources rédactionnelles conduisent trop souvent Médiapart à faire produire de vaseux "digests" de dépêches d'agence par des intervenants n'ayant visiblement jamais mis les pieds dans les pays dont ils parlent, au lieu de consulter des sources variées et de prendre le temps d'un vrai travail d'analyse et de synthèse capable d'apporter une valeur ajoutée à ses lecteurs (en fait, Médiapart devrait avoir le courage d'économiser de l'énergie quand il n'a rien à apporter au débat sur un sujet d'actualité qui n'ait déjà été dit et répété par cent autres organes de presse.)

2°) trop de journalistes (et aussi de contributeurs spontanés qui leur répondent) manquent profondément de culture historique et de capacités d'analyse et fonctionnent avec des schémas manichéens qui sont d'autant plus inadaptés que les situations de crise géopolitique appelleraient plutôt une prise de distance systématique par rapport à l'ensemble des acteurs en confrontation et leurs stratégies respectives de dénonciation/victimisation/culpabilisation médiatique.

3°) il faut ajouter à cela la dictature de l'émotionnel, encore renforcée par les réseaux sociaux, qui fait produire du "journalisme à l'estomac" (au sens où Mr Poirier critiquait "la littérature à l'estomac") qui est justement ce qu'il ne faut pas faire sur des sujets de politique internationale.

4°) en dernier lieu, Médiapart souffre d'une absence à mes yeux scandaleuse d'une vraie conscience critique moderne à l'international, d'autant plus surprenante pour un journal qui a bâti sa réputation sur la dénonciation inlassable des travers du système politique français (dénonciation qui a justifié ma décision de m'y abonner, et que je ne regrette pas, quels que soient les errements que je constate par ailleurs).

On peut détecter trois biais majeurs dans ce qui constitue la "grille de lecture" des événements internationaux par la rédaction de Médiapart et ses "compagnons de route":

a) une certaine nostalgie tiers-mondiste matinée de boboïsme (surtout perceptible dans le traitement des affaires africaines et arabes)

b) une cécité coupable vis-à-vis des jeux d'intérêt des différents blocs militaro-économiques et en particulier de celui auquel la France appartient (d'où des angles d'approche trop systématiquement institutionnels et technocratiques des problèmes financiers de l'Ukraine, par exemple, alors que ce type d'approche n'exprime rien d'autre que l'hégémonie des dominants)

c) une absence totale de réflexion stratégique sur la place qui serait souhaitable ou simplement envisageable pour la France et l'Europe dans le futur ordre du monde, autre que la prolongation de l'état présent des choses. Mais comme disait déjà Baudelaire: "La seule raison pour laquelle ce monde pourrait durer, c'est qu'il existe".

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