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retraité de l'ingénierie informatique et aéronautique et de l'enseignement dit supérieur (anglais de spécialité), écrivain et esprit curieux

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Billet de blog 19 septembre 2025

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L'Argentine de Milei en route vers une nouvelle crise

Les manoeuvres désespérées du ministre des finances Caputo n'y font rien: le dollar flambe, l'indice de "risque pays" vient de dépasser celui de la Bolivie et les réserves s'épuisent...

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Les manoeuvres désespérées du ministre des finances Caputo n'y font rien: le dollar flambe, l'indice de "risque pays" vient de dépasser celui de la Bolivie et les réserves s'épuisent car Milei continue de privilégier un cours du dollar trop bas sous prétexte de lutter contre l'inflation. 

Leur politique dogmatique de défense d'une fourchette de parité insoutenable et ses corollaires (hausse des dépôts obligatoires des banques privées auprès de la Banque Centrale, des taux d'intérêt stratosphériques menant à un début de récession économique) nous fait revivre le scénario orchestré par le même Caputo en 2017-2018 sous la présidence Macri et le résultat sera le même: après avoir épuisé les réserves liquides disponibles pour ne pas dépasser le plafond de parité négocié il y a quelques mois avec le FMI (la fourchette initiale était de 1000 à 1400 pesos avec un élargissement de 1% par mois) le gouvernement sera obligé de dévaluer brutalement et de remettre en place des mesures de restriction sur les achats de dollars (le fameux "cepo cambiario" que Milei avait voulu supprimer prématurément pour les particuliers qui en ont profité pour claquer joyeusement 12 milliards de dollars en tourisme-shopping à l'extérieur.)

Cette crise financière qui démarre nous rappelle celle du Royaume-Uni en 1992 avec sa fracassante sortie du Serpent Monétaire Européen (SME): après avoir gasmillé des milliards de livres (et avoir fait au passage la fortune de Georges Soros qui avait parié sur une sortie du SME et "shorté" la livre) pour rester dans la bande de variation autorisée le Royaume-Uni s'est résigné à quitter le SME.

En une journée hier, Caputo a claqué plus de 300 millions de dollars pour garder le dollar aux environs du plafond autorisé de 1475 pesos (mais certaines banques commerciales le vendaient déjà à 1490 pesos) et à ce rythme, il n'est pas sûr qu'il tienne jusqu'aux élections du 26 octobre. Ses habituelles rodomontades ("le modèle est solide et je dépenserai jusqu'au dernier dollar des réserves pour rester dans la bande de variatinn") ne font qu'alimenter la nervosité des marchés financiers qui ont porté l'évaluation du risque-pays à 1450 (ce qui veut dire que pour emprunter sur le marché international l'Argentine devrait offrir 14,5% de plus que le taux de référence des T-bonds étatsuniens.)

La lourde défaite de Milei aux élections provinciales de Buenos Aires a déclenché un preste retournement de veste des gouverneurs péronistes de Droite des autres provinces qui avaient jusqu'ici soutenu au moins implicitement sa politique mais qui ont décidé ces derniers jours de rejeter les vetos présidentiels à l'uagmentation du financement du handicap (l'Agence ANDIS étant par ailleurs au coeur du scandale des pots-de-vins collectés par Karina Milei et les Meneme auprès de l'industrie pharmaceutique) de l'hôpital des enfants Garrahn, des universités et des transferts de fonds aux provinces. Seul le veto à une loi sur les transgenres a échappé à la censure législative.

Malgré le discours que nous tiennent en Europe les médias de Droite sur le modèle Milei, ses résultats sont catastrophiques pour l'économie réelle et même sa prétendue réussite sur le plan de la réduction de l'inflation mérite d'être mise en perspective: encore il y a quelques jours, à l'émission 28 mn d'Arte (qui n'est que le Café du Commerce des bac+5 en psycho-socio) les chiffres affichés par Milei étaient repris de façon acritique. Les 83% d'inflation du premier trimestre 2024 sont dus pour une bonne part (environ la moitié) à la politique de pompier pyromane de Milei qui a passé toute sa campagne électorale de mi-2023 jusqu'à son élection à promettre une dollarisation et à traiter le peso d'excrément (sic) puis à le dévaluer dès son accession au pouvoir en décembre, la déréglementaiton immédiate de nombreux services (trsnsport, télécom, mutuelles privées...) a fait le reste.

Les 17% d'inflation en 2025 dont on nous rebat les oreilles les économistes qui évaluent l'inflation avec un indice des prix réaliste (c'est-à-dire pondérant correctement les prix des services) ont déterminé que l'inflation réellement ressentie par les Argentins serait plutôt de l'ordre de 30 à 35% cette année.

Quant aux projections de Milei pour son budget 2026 (10% d'inflation et un dollar à 1400 pesos) présentées en grande pompe il y a quelques jours, tout le monde s'accorde à les trouver totalement délirantes. L'ancien patron de la filiale argentine de FIAT, Cristiano Rattazi, pourtant soutien de la première heure de Milei, a déclaré hier qu'il fallait laisser le dollar 'aller là où il doti aller" autrement dit abandonner la politique de Caputo. 

Après avoir bien profité de sa politique monétariste sauvage, les milieux financiers internationaux font la sourde oreille à ses appels au secours et les habituels requins multinationaux (Barclays Bank, Morgan-Stanley, JP Morgan etc.) recommandent tous de ne plus investir en Argentine pour le moment. Aux dernières nouvelles, des émissaires de Goldman-Sachs sont même venus faire un tour dans lz City de Buenos Aires pour se renseigner au sujet du gouverneur de la province de Buenos Aires Axel Kicillof qui apparaît désormais comme une potentielle alternative péronisto-keynésienne pour 2027 (Kicillof a fait sa thèse de doctorat en économie sur Keynes.)

Milei est aujourd'hui politiquement isolé et affaibli par de multiples scandales de corruption et une nouvelle défaite aux élections de mi-mandat se profile, ce qui donnerait le coup de grâce à son expérimentation libertarienne dont les Argentins ont été les cobayes initalement consentants mais désormais rebelles.

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