Le Sénat a révoqué le décret qui accordait 100 millions de dollars de fonds secrets à la SIDE (ex-AFI) équivalent local de notre DGSI, davantage spécialisée dans l'espionnage intérieur et le montage de dossiers contre les politiciens d'opposition que dans la prévention du terrorisme, tâche pour laquelle elle n'est qu'un médiocre sous-traitant de la CIA; l'ex-président Macri, lui-même expert en espionnage illégal, a incité ses troupes à se joindre à l'opposition. Il semblerait que la SIDE ait déjà dépensé 80% de la somme allouée avant que le décret ne soit révoqué. On peut supposer que cet argent n'est pas perdu pour tout le monde.
Dans la foulée, la présidence de la commission bicamérale dont une des tâches est la supervision parlementaire des activités de la SIDE et des autres organismes d'espionnage et contre-espionnage a été confiée à Martin Lousteau, ex-ministre de Cristina Kirchner et l'un des élus UCR parmi les plus hostiles à Milei.
Enfin le Sénat a voté à une très large majorité une augmentation des retraites de 8% (depuis l'arrivée de Milei au pouvoir, les retraités ont perdu 30% de pouvoir d'achat) et une révision du mécanisme d'indexation des retraites. Milei a explosé de colère et a promis de mettre son véto à cette réforme qui selon lui compromet ses efforts de comblement du déficit fiscal argentin. Là encore, les troupes de Macri ont rejoint les opposants à Milei, et si les deux chambres revotent le projet de réforme des retraites dans les mêmes termes à une majorité des 2/3, le veto présidentiel sera annulé.
Macri, qui n'est pas pour rien le petit-fils d'un mafieux calabrais, fait monter la pression sur Milei afin d'obtenir des postes dans l'administration pour ses proches et un accord électoral en bonne et due forme pour les élections de mi-mandat de l'an prochain. Milei qui, comme Trump, est de plus en plus parano et agité, soupçonne sa vice-présidente de comploter avec Macri pour le pousser dehors.
Sur ce coup, les sénateurs ont un peu redoré son blason après s'être voté en début de semaine, avec l'accord de la vice-présidente Villaruel, une augmentation portant leur salaire à 9 millions de pesos mensuels (soit environ 9000 euros) une décision qui a quelque peu agacé l'opinion publique alors que le taux de pauvreté a dépassé 55% de la population. Milei a sauté sur l'occasion pour dénoncer "la caste" et les sénateurs ont dû précipitamment faire machine arrière, mais ils se sont vengés en gelant jusqu'à fin décembre les salaires de tous les fonctionnaires de l'exécutif.
Pendant la crise les affaires continuent: un contrat de fourniture de produits pharmaceutiques à une agence s'occupant de personnes handicapées a été passé sans appel d'offre par le président de la chambre des députés Martin Menem à une entreprise appartenant à son propre neveu. Ce Martin Ménem est lui-même le neveu de l'ex-président Carlos Menem dont la corruption était légendaire.
Le mot latin "nepos" (petit-fils) a donné en français le mot "neveu", mais aussi le "népotisme". Il semble bien qu'en Argentine, la famille Menem soit népotique d'oncle en neveu.