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retraité de l'ingénierie informatique et aéronautique et de l'enseignement dit supérieur (anglais de spécialité), écrivain et esprit curieux

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Billet de blog 29 octobre 2016

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Clinton face à Trump et au FBI

Alors qu'un léger resserrement des écarts se produisait, le redémarrage de l'enquête du FBI peut-il changer la donne ?

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Il convient d'abord de signaler que la nouvelle enquête en cours ne concerne que marginalement Clinton: le point de départ est une enquête sur un certain Anthony Weiner qui envoyait des messages qu'on appelle pudiquement "explicites" à des jeunes filles mineures.

Weiner est le mari d'Huma Abedin, une proche assistante de Clinton et de fil en aiguille, le FBI a retrouvé sur la messagerie de celui-ci d'autres messages en rapport avec l'enquête classée en juillet sur le "emailgate",  soit l'usage par Clinton de sa messagerie privée non sécurisée pour envoyer des messages sensibles lorsqu'elle était secrétaire d'État (l'équivalent de notre ministre des affaires étrangères) auprès d'Obama.

Du coup, le Directeur du FBI s'est trouvé obligé (probablement à son corps défendant...) de réouvrir l'enquête sur les messages afin de ne pas être accusé par le Congrès à majorité républicaine de "couvrir" exagérément Hillary.

À ce stade, en dépit des gorges chaudes qu'en font les Républicains (mais c'est de bonne guerre) rien ne dit que les messages ainsi découverts par la bande aient un contenu susceptible de remettre en cause le classement antérieur de l'affaire: si tous les messages échangés entre Abedin et Clinton ne concernaient que les magouilles de la cuisine politique interne des Démocrates (telles que déjà révélées par WikiLeaks), par exemple, ou n'étaient que des copies de messages liés aux affaires étrangères mais déjà recensés par le FBI, l'affaire serait entendue et se dégonflerait rapidement.

Évidemment la survenue de cette réouverture d'enquête à seulement 11 jours du vote est extrêmement gênante pour Clinton à trois niveaux:

1°) elle redonne soudain du coeur aux ventres aux trumpistes et autres Républicains qui commençaient à se résigner à la défaite annoncée par les sondages;

2°) elle démontre que Clinton ne parvient pas à être transparente sur l'ensemble des tenants et aboutissants du "emailgate" et renforce l'image de politicienne tortueuse, menteuse et magouilleuse qui lui colle à la peau depuis des années;

3°) elle peut faire basculer des indécis (qui sont encore anormalement nombreux: de l'ordre de 12-15% alors qu'ils n'étaient que 5% au même stade d'avancement de la campagne lors de la confrontation entre Obama et Romney) du côté de son adversaire.

Pourtant il ne faudrait pas surestimer l'impact potentiel de cet incident sur l'électorat. Pour estimer l'évolution de la probabilité de victoire, le mieux est de se reporter aux courbes dites "nowcast" calculant à partir des sondages la probabilité de gain de chaque candidat si l'élection avait lieu immédiatement et qui est donc l'estimation la plus sensible aux soubresauts ponctuels de la campagne.

On voit (sur le site fivethirtyeight.com) que cette courbe a parcouru trois cycles successifs de montée et redescente de la probabilité de gain pour Clinton. Le pic absolu a été atteint début août à 97% de probabilité de gain, mais le pic le plus récent remonte à mi-octobre et n'atteignait "que" 90%. Sur l'ensemble des trois cycles, la chute la plus rapide observée pour Clinton était de 15% en quelques jours à mi-juillet, suivie d'un rebond immédiat. On peut donc conjecturer qu'à moins de nouvelles révélations fracassantes dans l'emailgate au cours de la semaine prochaine, la probabilité de gain de Clinton modulo l'érosion déjà observée deux fois à partir du pic lui laisserait  à la date fatidique du 8 novembre de l'ordre de 60 à 65% de chances de gagner. Clinton reste donc pour le moment en position, certes moins confortable qu'il y a deux jours, de remporter l'élection.

La seule chance qui reste à Trump est de parvenir dans la dernière ligne droite à mobiliser suffisamment d'indécis des classes populaires frustrées, tout en comptant en parallèle sur une montée significative de l'abstention parmi les (nombreux) démocrates peu enthousiastes vis-à-vis de Clinton. Mais Trump est un tel repoussoir pour les Démocrates, en particulier les femmes, que je ne parierais pas plus de quelques euros sur ses chances de gagner...

PS du 1er novembre: contrairement à ce que semblent croire certains commentateurs, la remontée de Trump précédait la relance de l'affaire des courriels baladeurs. Je mets à jour le diagramme de fivethirtyeight dont l'évolution ne remet pour l'instant pas en cause l'analyse que j'avais faite il y a quatre jours.

Illustration 1
Nowcast 538 à J-7
Illustration 2
Nowcast 538

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