Lors de son discours à la Douma, dont j'ai commenté quelques extraits dans un précédent billet, Poutine remettait explicitement en cause les frontières de l'Ukraine définie par les bolchéviques en 1920.
Dans l'imaginaire russe contemporain, la dernière belle année fut 1913, avant la guerre et la Révolution qui emportèrent tout.
En 2003, "L'année 1913" était le nom d'un restaurant haut de gamme de Saint Pétersbourg. Quant à "L'année 1917" c'est un poème anti-héroïque d'Arséni Tarkovski qui évoque la misère, la maladie, le froid et la famine... bien loin des envolées lyriques des poètes "rouges".
Pour comprendre ce que peut vouloir Poutine, il est donc utile de se pencher sur la carte de l'Ukraine à l'époque des gouvernorats de la Russie Impériale, par exemple en regardant: https://en.wikipedia.org/wiki/File:Gubernias_de_Ucrania_-_ENG.png
Poutine a déjà récupéré la Crimée, qui faisait partie du gouvernorat de Tavria (référence à l'antique Tauride en français). L'agitation entretenue par le mouvement "rattachiste" pro-russe concerne les gouvernorats de Tchernigov (dont une partie est restée en Russie lors de la partition de 1920), de Kharkov, Poltava, Iekaterinoslav et Kherson (dont une étroite bande occidentale appelée Transnistrie est déjà sous contrôle russe.)
On peut donc supposer que l'ambition maximale du Kremlin consiste à réabsorber ces 6 gouvernorats et à neutraliser les autres régions (Kiev, Volynie, Podolie) avec un statut d'Etat-satellite similaire à celui de la Biélorussie.
Reste le problème de la Ruthénie austro-hongroise qui n'a jamais été russe: peut-être pourrait-elle constituer un Etat croupion à faire prendre en charge par l'Europe Occidentale?