Le choix d'une défense de rupture fait par Mr Plenel et ses collègues (supposément avec l'assentiment de leurs actionnaires) vis-à-vis du redressement fiscal qui leur est imposé me semble erroné pour trois raisons:
1°) Médiapart est une entreprise de droit privé que ses dirigeants sont censés piloter de manière responsable; or un défaut bien français des créateurs d'entreprise est de démarrer leurs affaires sans capitaux propres suffisants. Je crains que la raison principale pour laquelle ils sonnent aujourd'hui le tocsin est qu'ils n'ont pas provisionné correctement les risques encourus (et parfaitement connus d'eux dès le lancement de Médiapart) du fait d'un non-paiement de la TVA. S'ils ne l'ont pas fait, c'est une grave faute de gestion de leur part dont leurs lecteurs ne sont en rien responsables.
2°) il faut être un minimum cohérent politiquement: on ne peut pas à la fois vouloir combattre les paradis fiscaux en or massif des ultra-riches, ainsi que toutes les niches clientélaires et catégorielles qui réduisent le champ de l'action publique au détriment des plus faibles, et refuser de payer ses propres arriérés d'impôt; on peut certes en contester la légitimité, mais quand on est un citoyen responsable dans un régime d'Etat de Droit on n'a pas à refuser a priori de subir les effets d'une loi que l'on conteste, d'autant plus que des voies légales de recours existent avec effet suspensif dans la plupart des cas (Mr Plenel ne nous en a pas dit grand-chose jusqu'ici: quels recours ont été engagés, à quelles échéances, quels en sont les résultats possibles?)
3°) plutôt que faire des effets de manches et de lancer une pétition, il serait plus constructif et plus efficace de commencer par construire un plan de défense à deux niveaux: a) la définition d'une stratégie de couverture du risque par les actionnaires et autres parties prenantes intéressées (quel pourcentage des charges non provisionnées les actionnaires actuels sont-ils prêts à assumer, quelles formes complémentaires pourrait prendre la couverture du solde: ouverture du capital à de nouveaux actionnaires, appel à dons, plan de réduction des charges...) ; b) la définition d'une stratégie de minimisation et d'étalement des coûts (négociation de délais de paiement avec le Ministère des Finances, réduction des pénalités pour manquement avérés...)
Cela dit, je considère que Médiapart est un support d'information utile au fonctionnement de la démocratie d'opinion (c'est d'ailleurs la raison pour laquelle je m'y suis abonné.)
Mais à quand une réflexion plus globale de Médiapart sur le fonctionnement aberrant des aides à la presse ?
(allez voir le site du Monde Diplo, et vous y découvrirez que "Closer" touche davantage d'aides à la presse que "Le Monde Diplomatique" !!!)