Rares sont les ministres de l’éducation nationale qui résistent à l’invocation des «fondamentaux ». On l’a vu récemment avec Najat Vallaud-Belkacem. Dans sa tribune dans Le Monde comme dans son interview sur Europe1 ou son passage au Grand Journal, elle prescrit une pratique quotidienne de la dictée et du calcul mental. Ainsi, prédit elle, « Les élèves ne sortiront plus de l'école sans maîtriser le français et les mathématiques».
C’est en des termes proches que Xavier DARCOS s’exprimait en février 2008 à l’occasion de la présentation des orientations de sa réforme et de ses nouveaux programmes. Pour sa part il déclarait : « Diviser par trois, en cinq ans, le nombre d'élèves qui sortent de l'école primaire avec de graves difficultés … : tels sont les résultats que j'attends de la réorganisation du temps scolaire et de la réécriture des programmes du primaire ».
Plus loin, il indiquait à propos des mathématiques « les programmes prévoient le renforcement des techniques opératoires. Là où l'on se contentait par exemple d'aborder véritablement la multiplication à partir du CE2, et pas totalement la division, les élèves devront maîtriser parfaitement les quatre opérations avant d'entrer au collège et savoir pratiquer une règle de trois. La pratique quotidienne du calcul mental sera encouragée pour permettre aux élèves d'acquérir très tôt les automatismes nécessaires pour ne pas se tromper dans leurs calculs. »
Quels effets mesure-t-on cinq ans après qu’une cohorte d’élèves a suivi l’ensemble d’un tel cursus ?
L’étude CEDRE, menée par la DEPP en 2013 récemment publiée, observe les acquis en mathématiques des élèves de CM2 qui n’ont connu que les programmes de 2008. Que conclut-elle ?
"En six ans (2008-2014), le score moyen en mathématiques des élèves de fin de CM2 reste stable, passant de 250 à 249 points. Toutefois, le pourcentage d’élèves en difficulté augmente sensiblement, passant de 15 % à 16,3 %....
…Au-delà de la stabilité globale, les analyses complémentaires pointent quelques évolutions significatives : une baisse des performances en technique opératoire ; une amélioration concernant l’estimation des ordres de grandeur."
Autrement dit, absolument rien de ce que la « réforme » prétendait viser, voire le contraire ! Ainsi, à défaut de politiques éducatives ambitieuses, les astuces des ministres successifs qui jouent sur la fibre nostalgique et les incantations répétées ne produisent au mieux que d'éphémères artéfacts médiatiques.