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Billet de blog 18 août 2022

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CLIMAT: L'ADAPTATION ET SES LIMITES deuxième partie, seuls les scientifiques...

Seuls les scientifiques -toutes expertises confondues –, sont les gardiens d’une représentation du monde aussi proche que possible de sa réalité. Seuls ces hommes et ces femmes ont la capacité de dire où et comment l’humanité doit agir en priorité pour échapper au péril climatique.

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II CLIMAT: L'ADAPTATION ET SES LIMITES deuxième partie

Seuls les scientifiques

Seuls les scientifiques sont juges de l’intérêt ou du handicap de l’empreinte humaine sur la globalité du vivant. Non pas qu’ils soient infaillibles mais parce qu’ils sont les seuls à pouvoir interpréter et comprendre la complexité du monde par un exercice constant de mise à jour des connaissances, de mesures et compréhension des faits, de résolution de leurs contradictions, ce qui constitue l’objet unique du progrès et même sa définition.

Si nous nous en tenons à cette définition et si la science cesse d’être au service de stratégies particulières de profit et de domination, il est évident que la poursuite de l’aventure humaine pourrait échapper aux pièges de la suffisance politique juste capable de proposer une adaptation au jour le jour. Il faut nécessairement chercher ailleurs, hors des poncifs politiques, une capacité globale et irréversible de l’humanité tout entière pour révéler et neutraliser les causes de la dérive elle-même.

Seuls les scientifiques -toutes expertises confondues –, sont les gardiens d’une représentation du monde aussi proche que possible de sa réalité. Seuls ces hommes et ces femmes ont la capacité de dire où et comment l’humanité doit agir en priorité.

Encore faut-il qu’ils soient à la fois scientifiques, humanistes et reconnus comme les seuls gardiens d’une éthique de vie protectrice, non seulement de l’espèce humaine mais aussi de toutes les manifestations du vivant animales et végétales dans le respect de leur diversité et de leur adaptation aux rythmes universels. A cette fin il est indispensable de mettre un terme au cloisonnement des connaissances dramatiquement isolées en insulas artificiels et soumises aux exigences dogmatiques tantôt d’une église médiévale tantôt d’une idéologie productiviste. Ici la biologie et les sciences naturelles, là la physique, plus loin les sciences humaines (mathématique, sociologie, psychologie, économie…).

C’est dans une indispensable réunion panoptique des savoirs que doit s’implanter l’action politique. Elle pourra ainsi bénéficier de la complémentarité des expertises et s’imposer les limites éthiques, matérielles et économiques nécessaires à une harmonieuse représentation du monde et du sens de la vie.

Toutes les catastrophes anthropogéniques ou naturelles qui scandent l’histoire de l’humanité ont été provoquées par des causes qui s’éteignaient avec la crise elle-même et par la reconstitution d’un nouvel équilibre.

Aujourd’hui le productivisme libéral qui fixe les orientations de la recherche scientifique ne peut se constituer en dispositif global et cohérent indispensable à un nouvel équilibre de notre espèce et à sa survie.

Seuls les scientifiques peuvent stopper cette fuite en avant en cessant d’être de simples consultants que le pouvoir interroge à l’occasion, sans comprendre nécessairement leurs avis. Il est temps de modifier les droits, devoirs et responsabilités des gardiens du savoir et de leur accorder une autorité de dernier recours selon une règle démocratique à définir.

Certes le monde des sciences n’est pas à l’abri d’erreur en rapport avec la personnalité de tel ou tel expert reconnu et le plus souvent sous influence idéologique, mais ce risque ne saurait être comparable à celui que la globalisation de l’économie fait prendre à l’humanité par un assujétissement de la sciences -pourtant propriété collective – aux intérêts particuliers du capital. L’unité opérationnelle des sciences permettrait de disposer de nombreuses procédures correctrices des contradictions et d’éviter des arbitrages extérieurs incompétents ou malhonnêtes qui s’arrogent le dernier mot contre l’intérêt général. Le progrès résulterait alors d’une juste gestion de la juxtaposition des savoirs tout en protégeant les indispensables limites que chaque discipline doit s’imposer pour ne pas asphyxier les autres. Ainsi la puissance des décideurs serait constamment soumise à une exigence de rationalité plutôt qu’à la perversion des jeux de rôle politiciens qui tiennent lieu de garanties démocratiques à l’ivresse libérale.

Il faut entendre la colère des scientifiques du climat et comprendre le début de rébellion qui les anime. Ils ne demandent pas le pouvoir, seulement d’être entendu. Ils commencent à percevoir que l’affaire est strictement politique et que leur avis est négligeable, voire contraire aux intérêts des manipulateurs, profiteurs et accumulateurs émerveillés par la perspective d’une nouvelle terre promise ; l’économie d’adaptation !

Certains scientifiques ont eu le courage de s’exprimer pour regretter de ne pas être entendus. D’autre se permettent d’aller au-delà car ils sont conscients de se heurter à un déni chronique organisé. L’aggravation de la situation les engage dans une lutte sans merci contre deux adversaires nouveaux, le climato scepticisme d’intérêt et l’adaptation de substitution. L'inertie et le bavardage politique doivent nous inciter à lutter frontalement contre tous ceux qui entretiennent la conviction qu’il ne faut rien changer.

La population partage de plus en plus la détermination des plus jeunes et le questionnement remplace le déni. C’est une chance (la dernière ?) qu'il faut saisir.

Face à la nécessité d’agir il est urgent de mettre un terme aux hésitations et aux fausses promesses. L’humanité a déjà perdu 50 ans pour réaliser une prise de conscience étouffée par l’imperium économique et par l'hypertélie* (Patrick Tort) aveugle de tous les secteurs potentiels de croissance qui finiront par abattre notre civilisation. Il est temps de mettre un terme au temps perdu.

Il ne s’agit plus de faire du secourisme mais bien de crée une mission internationale de lutte contre le feu climatique. Cette mission durera jusqu’à l’extinction du risque et la constitution d’un mode de vie à nouveau favorable à l’humanité et protecteur du vivant dans sa diversité et sa complexité. Vaste programme ! cela demandera probablement un siècle. Pour mettre en place ce dispositif nous ne devons pas perdre de temps car un risque incontrôlable d’emballement climatique pourrait nous priver bientôt de toute efficacité radicale. C’est ce que disent les scientifiques experts et que les politiques ne veulent pas entendre.

Suite à venir:

troisième partie: Comment se sortir d'affaire?

quatrième partie: L'intelligence des limites

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