Ils, elles sont des monstres générés par un système social monstrueux ; des sortes de robots au service d’une barbarie ; cela ne les émeut pas et c’est normal, il, elles sont « programmé(e)s » ainsi, ils, elles sont des croisé(e)s du capital ; ils, elles combattent pour leur caste ; en retour, cela nourrit une indifférence haineuse dans les profondeurs de cette société – où par ailleurs se maintiennent et agissent d’autres systèmes de valeurs : altruisme, coopération, entraide, solidarité, égalitarisme, justice ; mais cela est un autre sujet.
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Ils, elles, qui sont-ils, qui sont-elles ?
On les reconnaîtra ; ils, elles apparaissent tous les soirs sur le petit écran de nos domiciles, ils, elles parlent, parlent, parlent, s’affirment savant(e)s et compétent(e)s, mais ils, elles viennent là pour défendre l’indéfendable, asséner des affirmations péremptoires, fermer la porte à la discussion, justifier la société d’ordres, d’ordres privilégiés nés de quarante années de libéralisme, et nous parler ainsi, méchamment, de « là-haut », à nous, les privés de droits ; ils, elles viennent là pour nous contester bribe par bribe ces fameux « acquis sociaux » – qu'on peut appeler des « conquis » – qui « renchérissent le coût du travail », qui nous condamnent sur les marchés en face de la concurrence, bref qui ruinent la société ;
Ils, elles, Macron et Lecornu, Montchalin et Bergé, Maillard, Thévenot, Attal, Mattéi, Bregeon, toute une foule de perroquets, sortis d’un seul moule, une foule de clones, une sorte d’excroissance de la société formant caste ; il avait fallu une prise de la Bastille et une nuit du 4 août il y a 235 ans pour débarrasser la nation d’un monde parasitaire du même genre ; en fait, ils, elles sont revenus(e)s.
Ils, elles, qui sont-ils, qui sont-elles ?
Ils, elles, justifient sans complexe l’existence des riches et des super-riches ; ne leur cherchez pas de valeurs morales, la position qu’ils, elles occupent exclut de s’en encombrer, et d’ailleurs ils, elles n’en ont cure ; la morale c’est pour les autres ;
Ils, elles défendent sans hésitations les privilèges dont les riches – c’est-à-dire eux-mêmes, elles-mêmes, voyez leurs déclarations de patrimoines, voyez celui de leurs conjoints, conjointes, voyez même leur pédigrée – jouissent ; à tout un chacun cela peut sembler s’opposer aux principes sur lesquels notre société se veut fondée, les principes d’égalité, de fraternité, de justice, mais eux, elles, n’adhèrent pas à ces principes ; leur séparatisme social les dispense d’avoir à s’en justifier ; ils, elles adorent d’ailleurs – ils, elles « kiffent » –l’exercice plein de jouissance (encore...) consistant à prétendre défendre ces principes tout en pratiquant, en fait, une politique qui vise l’inverse, comme de vouloir rogner sans cesse sur les salaires ou sur les droits des salarié(e)s ; ce n’est qu’un exemple, il n’y aurait que du similaire à relever dans leur politique ;
Ils, elles, sont munis de dogmes, en matière économique, comme en matière sociale ou politique, dogmes qui les dispensent de pratiquer l’esprit d’examen, de confronter leurs points de vue à une réflexion éclairée, de tirer des leçons de l’expérience – les années 1930 sont très dans l’air du temps –, de fonder leurs convictions sur la raison, pourquoi pas ? L’idéologie ultra-libérale dont ils ont été biberonné(e)s dans leur milieu social d’origine, dans les « grandes écoles » où ils, elles, ont grandi, dans les cercles politiques où ils, elles ont organisé leur carrière, peut se glorifier d’ignorer toute l’histoire de la pensée critique ; ils, elles, ne sont pas des « intellectue(le)s » et ce n’est pas ce qu’on leur demande, ils, elles sont des chimères vraiment monstrueuses faites de lobbistes, d’hommes et de femmes d’affaires, des bonimenteurs, des carriéristes, des politiciens, cela n’a rien à voir ;
Ils, elles, manient sans retenue le mensonge, la contre-vérité – comment peut-on prétendre que la taxation des riches qui ne payent pas l’impôt représenterait « un matraquage fiscal » ? –, ils, elles n’ont pas de ces pudeurs, ils, elles passent leur temps à procéder ainsi, en toute circonstance et quel que soit le sujet, sûr(e)s et certain(e)s qu’en ces temps de spectacle médiatique bien contrôlé tout leur est permis ;
Ils, elles, s’alignent sur les « chiens de garde » de leur camp dont ils, elles, préféreraient parfois ignorer les méthodes, souvent honteuses, souvent « limites », souvent « excessives », mais ils, elles, acceptent d’appartenir au « troupeau » qui profite de ce encadrement féroce et sans sur-moi pour mener à bien leur programme d’extorsion, de racket et de détournement fiscaux ; pensons aux prises de parole de tel président de groupe à l’Assemblée – on parle aussi, parfois, de « porte-flingues » –, de telle porte-parole de groupe ou du gouvernement, aux interventions de plateaux télé de tel ou telle abonné(e) : ça manie, en plus du mensonge, l’insulte et la provocation, ça éructe de la « punch line » apprise par cœur et répétée de télé en radio, avec les encouragements des meneurs et meneuses de jeu, en connivence avec les chroniqueurs et chroniqueuses présent(e)s, en solidarité bien comprise avec les éditorialistes et médiacrates patentés assis à la même table, en jeu de ping-pong savant avec les experts/experts de boîtes de conseils ou de lobbying requalifiées en « think tanks » par le présentateur, la présentatrice (pourquoi se gêner ?) qui, justement, émargent à une de ces boîtes (et oui, pourquoi se gêner ?) ; le système leur est acquis, non ?
Ils, elles savent qu’autour d’eux, d’elles, « là-haut », ce n’est que mensonge, carriérisme et corruption, double langage et dévoiement, c’est leur quotidien, ils vivent avec et sans en souffrir ; alors quand il s’agit de ruiner l’hôpital public, de désarticuler l’école publique, d’étrangler la Sécurité sociale, pour eux, pour elles ça n’est que décision technique, choix rationnel, adaptation à la concurrence, plan de modernisation ; ils, elles vivent dans un monde orwellien, un monde dans lequel le « capital » s’appelle « outil professionnel », où les cotisations sociales peuvent, elles, tranquillement devenir des « coûts du travail », etc, etc, etc ;
Ils, elles, surfent sur les idées reçues et les ignorances partagées d’un public endormi et saoulé de « débats » trafiqués et de « révélations » fabriquées, de « news » bidonnées et de « scandales » sans lendemain ; si certaines élites du passé avaient beaucoup misé sur l’éducation généralisée, l’accès démocratisé à la connaissance et à la culture, l’élévation du niveau d’humanité collective de la société, ils, elles, se contrefichent de ces utopies qui sont au final plutôt porteuses de dangereuses contestations de l’ordre qu’ils et elles défendent ;
Ils, elles, sont porteuses d’un discours qui « fait système » : ce qu’ils et elles disent sur la nécessité de préserver les privilèges des riches et des ultra-riches, coïncide avec ce qu’ils et elles affirment au sujet de la fainéantise des chômeurs, du poids de la fraude aux allocations, du rôle de l’immigration dans l'augmentation des dépenses de santé ; et puis cela fait plus largement système avec l’idée que rien ne peut changer, que l’injustice est partout, que chacun doit s’en sortir avec ses propres moyens, que l’ordre social à sa raison d’être, que l’économie est trop compliquée pour imaginer des « solutions simplistes », que etc, etc, etc…. ; bref, il y a toujours eu des riches et il y en aura toujours, pas vrai ?
Ils, elles comptent aussi sur la complaisance des uns, la faiblesse et la maladresse des autres pour que tout continue comme avant ; qu'en serait-il si des voix s'élevaient pour dire que le roi est nu et que les technocrates qui nous dominent sur des usurpateurs ? Chacun sait que pour que les dogmes s’effondrent, que pour que la société bascule vers de nouveaux paradigmes, que pour que l’envie de changement devienne hégémonique, il faudrait non seulement que le peuple se mette en mouvement dans une mobilisation irrésistible, mais, plus trivialement, il faudrait que les espoirs ne soient pas douchés et redouchés au fil des mois et des années par ceux qui devraient travailler à les relayer, à les promouvoir, à les faire advenir, il faudrait que les paroles d’espoir (du genre discours électoraux, par exemple) deviennent des espoirs concrets ; et « là-haut », ils, elles comptent sur la quasi impossibilité que tout cela arrive ; ce n’est pas qu’ils n'en aient pas la crainte, il y a déjà eu quelques chaudes alertes, mais c’est comme avec la crise climatique c’est un risque flou, indéterminé, du « jamais vu », alors…, croisons les doigts ;
Ils, elles ont cependant perdu les élections, ils, elles ne pèsent pour rien dans l’électorat de la France qui travaille, qui bâtit, qui réfléchit, pour rien dans la jeunesse qui les vomit, dans les « milieux populaires » qui, trop souvent, ne votent pas mais ne les hait pas moins ; ils et elles savent que la société dans ses profondeurs les rejette ; ils, elles savent qu’ils ne représentent que Neuilly et les Hauts-de-Seine mais ils, elles savent aussi qu’une forteresse bien défendue peut tenir longtemps : qu’à cela ne tienne, ils, elles sont déterminé(e)s à ne pas respecter la loi des urnes, ils, elles sont décidé(e)s à aller même jusqu’à mettre l’extrême-droite au pouvoir – car l’extrême droite c’est un moindre mal, ça respecte les riches et la richesse, ça ne tape que sur les pauvres, les minorités, les faibles ; tiens, comme eux, comme elles !!! – et ils, elles sont bien déterminé(e)s, tout « bien propres sur eux » qu’ils et elles sont, tout bien éduqués, civils, obséquieux/ses à l’occasion, calmes et posé(e)s – pas « bordéliques », elles, eux, non...., suivez mon regard – déterminés donc, à quoi, mais à l’illibéralisme ! à l’autoritarisme ! à la remise en cause de l’État de droit comme on dit, et puis même à recourir quand cela peut aider, à la violence d’État évidemment, à la répression policière et judiciaire, à l’« état d’exception » ; ils, elles ont Badinguet et, pourquoi pas, du Thiers dans leurs gênes ;
Ils, elles, même quand ils sont des battu(e)s du suffrage universel, reviennent sans complexe d’un stage dans une sinécure de la République ou dans un état-major de la banque ou du business, pour occuper, avec l’arrogance qui sied à la caste qu’ils, elles, représentent, les postes de premier plan que leurs copinages, leurs camaraderies, leurs réseaux, leur assurent pour toute la vie ; de tout ceci, ils, elles, n’ont aucune arrière-pensée de doute sur leur légitimité car tout leur est dû, ils, elles ont la certitude de représenter la société, d’avoir été choisi(e)s pour la représenter – ils croient qu’ils sont sortis de la cuisse de Jupiter – et de devoir en défendre en toutes circonstances les tares et les injustices.
Ils, elles sont des privilégiés que la société française nourrit, supporte, tolère ; jusqu’à quand ?