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Billet de blog 26 juillet 2011

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Christophe Huss
25 juillet 2011

LeDevoir.com Culture / Musique

Les bons mots de Jerome Wigler
Dans les rangs de l'Orchestre de Philadelphie, qui s'est produit sous la direction de Charles Dutoit en fin de semaine (à Lanaudière, Québec), se niche un personnage hors du commun: Jerome Wigler, un violoniste de 91 ans. Soldat, il a débarqué en Normandie. Musicien, il a connu, Rachmaninov, Bartók et les grands chefs du XXe siècle. Le Devoir a rencontré samedi cette mémoire vivante, 61 ans d'ancienneté dans l'orchestre, qui, bon pied, bon œil, enfile les bons mots et anecdotes savoureuses.
Jerome Wigler a ainsi vu Sir Thomas Beecham sécher une répétition pour aller batifoler en galante compagnie et se souvient que l'orchestre adorait les enregistrements avec Isaac Stern, car les musiciens étaient payés au temps, or les fausses notes du soliste obligeaient sans cesse à recommencer les prises! Ces moments-là étaient appelés «Earn with Stern»!
Il se rappelle que Dimitri Mitropoulos, ami de Rachmaninov, en voulait beaucoup au compositeur, car Rachmaninov avait exprimé son intention de dédier les Danses symphoniques à l'Orchestre de Minneapolis et au chef grec, mais, pour l'argent, il les dédicaça au Philadelphia Orchestra. Wigler a connu Rachmaninov en 1942 à Minneapolis. Il jouait son 2e Concerto pour piano et dirigeait L'Île des morts. «Je ne l'aimais pas. Il critiquait tout le monde et était désagréable. En plus, il était difficile à suivre et changeait de tempo tout le temps. Quand je lui ai demandé ce qu'il pensait de son oeuvre L'Île des morts, il m'a répondu: "It stinks."» Il relativise en disant: «Au fond, ne demandez jamais à un musicien d'orchestre ce qu'il pense d'un chef.»
«Les orchestres aujourd'hui sont infiniment supérieurs à ce qu'ils étaient, surtout chez les vents. Quand nous jouions le Concerto pour orchestre de Bartók, en 1951, c'était avec tant de difficultés. Aujourd'hui, on déchiffre à vue», estime M. Wigler.
Sur le son de l'orchestre, Jerome Wigler considère qu'il a forcément changé, puisque «Stokowski utilisait des coups d'archets aléatoires», et sous Ormandy, qui avait unifié les coups d'archets, «les violonistes ondulaient littéralement sur leurs chaises». Pour lui, «le Philadelphia Sound, c'est Ormandy. Mais quand Muti est arrivé, il a dit: "Le Philadelphia Sound, ça n'existe pas."» À ses yeux, «le son aujourd'hui est très beau, mais il est différent».
Parmi les grands souvenirs de sa vie, Jerome Wigler cite un enregistrement: L'Amour sorcier de Manuel de Falla avec Stokowski et Shirley Verrett pour Columbia. Voilà un disque qu'on écoutera avec d'autres oreilles après une telle rencontre!

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