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Monsieur Darmanin, vous accusez Jean-Luc Mélenchon de complicité de violences envers les policiers et de n'être pas républicain !
Jean-Luc Mélenchon a dit, répété et répété encore « je ne suis pas d’accord avec les formes d’action violentes parce qu’elles invisibilisent nos revendications » et vous le savez très bien. Il ne se tait donc pas sur les violences et il ne les encourage pas, bien au contraire.
Mais vous et les vôtres ?
On a beau rechercher sur Twitter ce que le ministre de l’intérieur Castaner avait écrit quand madame Zineb Redouane a été tuée alors qu’elle fermait ses volets au quatrième étage d’un immeuble à Marseille au moment d’une manifestation. Une dame de 80 ans tuée chez elle par une grenade lancée par un policier.
On a beau rechercher sur Twitter ce que le gouvernement auquel vous apparteniez, monsieur Darmanin, a écrit pour déplorer sa mort, pour offrir un soutien moral à sa famille.
Le résultat est : rien. Rien. Pas un seul mot. Absolument rien !
Cette dame est pourtant morte à cause de personnes qui agissent sous les ordres du ministère dont vous êtes aujourd’hui à la tête. Quels qu’aient été les ordres, ils ont abouti à la mort d’une vieille dame innocente.
Le silence assourdissant du ministre de l'Intérieur a donc fait de lui un complice de la mort de madame Redouane.
Le 30 octobre 2021, on pouvait lire dans la presse :
« Le directeur général de la police nationale, Frédéric Veaux, a décidé de ne pas suivre l’avis de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) qui préconisait, dans les conclusions de son enquête administrative, un renvoi devant le conseil de discipline du CRS mis en cause dans l’affaire Zineb Redouane. » (Libération)
Vous étiez alors déjà ministre de l’Intérieur, cherchons ce que vous en avez dit sur Twitter, avez-vous déploré que ne soient pas suivis les conseils de l’IGPN ? Etes-vous intervenu pour que ce renvoi devant le conseil de discipline soit appliqué ? Le directeur de la police nationale n’est-il pas sous vos ordres ?
La réponse est vide, totalement vide.
Votre silence assourdissant, monsieur Darmanin, vous fait complice et même soutien total de l’impunité de ce CRS jugé fautif par l’IGPN.
Quand il y a une personne tuée, il y a une personne tuée. Quand la mort se produit lors d’une opération de police alors oui, la police tue. Vous continuez à nier cette vérité factuelle et pourtant elle est là : Zineb Redouane, Steve Caniço, Cédric Chouviat et d’autres… C’est une vérité que de dire que la police, en France, tue. Et c’est une phrase bien différente que de dire "les policiers sont des assassins", ce qui n’a absolument jamais été prononcée ni par monsieur Mélenchon ni par qui que ce soit à la France insoumise ou plus largement à la Nupes.
Vous poussez les hauts cris chaque fois qu’on relate un fait dans lequel un policier est mis en cause pour violence. Vous niez l’existence de violences policières alors qu’elles sont prouvées quasiment à chaque manifestation.
Quand Philippe Poutou a redit cette vérité factuelle « la police tue », vous avez répliqué « Les propos de M. Poutou envers la police sont insultants et indignes d'un élu de la République. Au nom du ministère, et pour défendre l'honneur de tous les policiers, je dépose plainte. »
Donc pour vous, monsieur Darmanin, il est honorable qu’un policier soit responsable de la mort d’une personne ?
Qu’elle soit manifestante ou non, délinquante ou non, une personne n’a pas à mourir de la main de la police sauf cas rarissime de légitime défense.
Non, monsieur Darmanin, l’honneur de la police ne peut être de se dédouaner des morts provoquées, l’honneur de la police ne peut se bâtir en niant les responsabilités, en refusant toute sanction contre les policiers ou gendarmes dont le comportement a provoqué blessures ou mort.
La police, pour être honorable et donc honorée, se doit d’être propre.
En ce 1er mai, personne ne s’est félicité de voir un policier prendre feu. Personne.
Et personne ne s’est félicité de voir une jeune fille de 17 ans le visage en sang, de voir un journaliste tombé après avoir reçu une grenade de désencerclement sur les pieds, de voir des personnes frappées à terre par des policiers. Personne.
Mais si le focus a été exclusivement et fortement mis par vous sur le policier blessé, vous n’avez nullement mentionné le cas de cette jeune fille dont le père recherche pourtant des témoins de ce qui s’est passé au moment des faits. Qu'attendez-vous pour ordonner une enquête ?
Vous devriez être, vous monsieur Darmanin, de par votre fonction, le premier à déplorer non seulement les blessures subies par les policiers et gendarmes mais aussi les blessures subies par les civils.
Et votre fonction vous commande même de déplorer d’abord les blessures faites aux civils puisqu’elles découlent de votre gestion du maintien de l’ordre.
Vous êtes le premier responsable des victimes civiles aussi bien que des victimes au sein des forces de l’ordre.
Maintenir l’ordre c’est justement faire que tout se passe bien et pas qu’une escouade de CRS charge un groupe de manifestants non menaçants qui chantent et dansent, que des policiers empêchent les journalistes de faire leur travail, que des touristes soient arrêtés et placés en garde à vue juste parce qu’ils se trouvaient là !
Maintenir l’ordre c’est permettre aux gens de manifester tranquillement et pas de les en empêcher.
Monsieur Darmanin, quand nous présenterez-vous un membre de ces black-blocs arrêté puis jugé ? Qui sont-ils ?
Pourquoi ne montrez-vous pas l’honneur de la police dans les arrestations de ces personnes violentes que vous arrivez pourtant à dénombrer avant même qu’une manifestation commence ?
Pourquoi ne montrez-vous pas quels efforts sont faits pour les identifier, les cibler et les stopper ? Vous gagneriez en confiance et vos policiers ne subiraient pas, par exemple, les remontrances des pompiers eux-mêmes qui ont été plusieurs à les interpeller à Paris ce 1er mai en leur reprochant vertement leur comportement.
En vous taisant systématiquement sur le sort des civils blessés, monsieur Darmanin, vous validez le fait qu’il y ait deux camps comme le suggérait le préfet Lallement.
Or vous êtes le ministre de tous les Français, vous êtes le ministre de l’Intérieur et pas le ministre chargé de faire taire le peuple, en tous cas vous ne devriez pas l’être dans une République qui se veut démocratique.
Le gouvernement auquel vous appartenez a sali la notion de république, vous piétinez constamment la démocratie, ne serait-ce que par votre gestion répressive des manifestations jusqu’à tenter d’interdire les casserolades qui ne sont pourtant qu’une façon bien pacifique de manifester.
Alors oui, nous le répétons, ce que vous avez fait de la 5e République résulte en une mauvaise république, une république défigurée, une république agonisante et ce n’est pas révéler un secret que dire que nous, les insoumis et d’autres, aspirons à une 6e République bâtie sur une nouvelle constitution qui respectera vraiment cette définition de base : « La démocratie, c’est le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple. »
Etre républicain, c’est d’abord respecter la démocratie et en ce moment, les plus républicains ne sont pas ceux que vous montrez du doigt en renversant les rôles, monsieur Darmanin.
C’est votre gouvernement qui sort de l’arc républicain et particulièrement vous-même en vous rapprochant de plus en plus de l’idéologie de l’extrême-droite qui n’a jamais eu et n’aura jamais rien de républicain quoique vos amis des médias tentent de faire croire.
Comment osez-vous vous dire républicain quand absolument tous les observateurs nationaux et internationaux fustigent votre gestion des manifestations et condamnent les méthodes violentes de votre police ?
Merci à monsieur Mélenchon d’exister, de résister et de ne rien vous céder. Merci à lui d’avoir réussi à reconstruire une gauche digne de ce nom (une gauche et non pas une extrême gauche comme vous vous entêtez à nous dénommer). Merci à lui d’avoir su faire monter des talents politiques comme Mathilde Panot, Manuel Bompard, Antoine Léaument et tant d’autres. Merci à lui d’avoir réussi à rassembler 22 % des électeurs sur sa candidature bien que vous et les vôtres n’ayez cessé d’appliquer la formule qui affirmait « plutôt Hitler que le Front Populaire ». Merci à lui qui, suite à ce résultat, a réussi à fédérer les partis de gauche en la Nupes qui, si elle est forcément imparfaite parce que neuve, se maintient debout, soudée et offensive.
Vous laisserez un triste nom dans l’Histoire, monsieur Darmanin, vous ainsi que celles et ceux qui auront soutenu cette dérive fascisante qu’est la macronie.
Jean-Luc Mélenchon, lui, laissera un nom anobli par ses combats, sa droiture, sa culture, son intelligence et sa volonté de faire de la France un pays respecté et heureux.
Qu’il y réussisse rapidement ou que d’autres y réussissent plus tard grâce à son travail acharné de toute une vie, son nom restera comme celui d’un grand humaniste.
Tout le contraire de ce que vous êtes, monsieur Darmanin.
Ne pas commenter un fait divers n’a jamais rendu complice qui que ce soit de quoi que ce soit. Inciter à continuer le combat social contre votre entêtement à agir contre la volonté de la majorité du peuple français n’a jamais équivalu à inciter à des actes de violence physique ni de destruction.
Mais qu’un ministre de l’Intérieur et tout un gouvernement choisissent délibérément de ne pas, à minima, déplorer les actes violents de certains policiers les rend complices et même responsables de ces actes violents.
L’Histoire se chargera de mettre vos pendules à l’heure, monsieur Darmanin, tôt ou tard.
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