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Habemus papam
«J’ai toujours voulu laver le linge sale en public» a déclaré Nanni Moretti à l’Express. Il assume tout ce cinéaste y compris d’avoir montré un pape en errance incapable d’accepter sa charge : le papa ne veut pas du pouvoir. Combien de divisions le Vatican? Celui qui incarne le pouvoir patriarcal à son plus haut degré le refuse. Il marche, il marche, va au théâtre car secrètement dans son enfance il voulait être comédien et pas du tout ce qu’il est devenu. Sa maman, sa soeur, sa famille, ses souvenirs, il les perd. Il devient fou, il ne sait plus où il va, il pique des crises.Se mêle à une troupe de comédiens qui jouent du Tchékov. Précisément ce qui surnage dans sa mémoire . Théâtre dont les personnages sont des distraits, malheureux de leur vie.
Ce nouveau pape qui refuse de l’être et qui entre en errance à travers Rome ne s’appelle pas pour rien le cardinal Melville. Même nom que l’auteur de ce roman de l’absurde et de la folie qui interroge et contamine, dont le personnage Bartelby ne cesse de dire « I Would prefer not to », je préférerais ne pas ». Melville-Piccoli comme Bartelby sont une énigme.
Prodigieuse performance de Michel Piccoli, angoissé jusqu’à la terreur. Mais Le psychanalyste alias Nanni Moretti ne l’est pas moins angoissé puisqu’il ne parvient pas à guérir son patient, lui le meilleur des meilleurs praticiens que l’Eglise est venu chercher pour guérir le pape de ne pas vouloir être pape.
L’Eglise catholique face à la psychanalyse : vieille histoire bien connue. Freud trouvait que la religion était une névrose et Lacan qu’elle triompherait toujours de la raison. Et Moretti amer, superbe en psychanalyste impuissant faisant jouer les cardinaux dans un Vatican transformé en cour de récréation, se demande qui parle dans un monde où la parole se dissout sans cesse dans le bavardage.