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Billet de blog 12 novembre 2014

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Gérard Miller, le « démonteur » d’idées reçues : de Gaulle.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Dans son dernier livre, Antipathies[1],  Gérard Miller se laisse aller à ses « humeurs »  et à ses « parti pris ».

Ayant tardivement découvert « qu’il existe dans la société française un vaste ensemble d’opinions marécageuses, de mensonges, d’approximations, de niaiseries et de méchancetés » il  va s’employer à « démonter » ces « idées reçues ».

Parmi ses « cibles », de Gaulle. 

M’en prendre à de Gaulle ?... et pourquoi pas je vous prie ?

De Gaulle n’était pas sans ombre ni sans aspérités. Gérard Miller n’a pas pour lui les mêmes délicates préventions qu’à l’égard d’Onfray.

 « Encore un éloge panégyrique du général dans la presse, cela devient fatigant. L’homme du 18 juin par-ci, l’homme du 18 juin par-là –c’est mérité mais un peu court. ».

Il pose en voix solitaire qui dénonce les turpitudes du grand homme. Au point même que, dans les deux pages qu’il lui consacre, il se met à pratiquer cela même qu’il refuse en hurlant avec les loups et la cohorte des dénigreurs. 

Ainsi, Gérard Miller se met à découvrir l’eau chaude !

De Gaulle a  été un conservateur ? Tous les biographes l’ont souligné depuis longtemps. Freud aussi était un conservateur. Tout comme Churchill. De Gaulle  est né à la fin du XIXè siècle dans une famille de la droite catholique : il a porté en lui l’idéologie familiale.

Ces dernières années, face aux glorifications commémoratives du chef de la France-libre, on s’est mis à réactiver ses déclarations[2] qui, aujourd’hui, dans un tout autre contexte historique, résonnent de façon insupportable. Ainsi ses propos sur « le peuple juif, un peuple d’élite, sûr de lui et dominateur » dans sa conférence de presse du 27 novembre 67 et qui provoquèrent des indignations et des révoltes comme celle de Raymond Aron. Ou bien ses propos tenus en privé sur les Arabes[3] ou ceux sur les Nègres[4].

Gérard Miller qui méconnait l’histoire[5] , -on l’a vu avec Onfray et Freud et ici avec de Gaulle, s’érige en juge rétroactif de tout et de n’importe quoi en fonction de sa subjectivité, de ses « antipathies » Mais en quoi les « antipathies «  de Monsieur Miller nous intéressent-elles ? Est-il un grand homme, un Freud, un de Gaulle, un Churchill, pour qu’on s’intéresse à ses « antipathies » qui ne sont même pas de la bonne littérature.  Curieusement d’ailleurs, dans  son livre, il ne dit pas un mot sur cet autre grand homme que fut Mao Tsé Toung : un grand conquérant, un libérateur de son peuple et u héros durant la première partie de sa vie et un dictateur dans la deuxième partie. Miller serait-il un maoïste idolâtre… et honteux ?

De Gaulle, Churchill, Mao, voilà quelques uns de ces hommes dont on doit penser la vraie vie hors de tout manichéisme puritain et policier. Gérard Miller par son livre, administre la preuve qu’il en est incapable.

Miller fait représenter De Gaulle par sa dessinatrice, quelques casseroles empilées sur sa tête.

Première casserole : « Peut-on encore rappeler que De Gaulle fut l’admirateur éperdu du Pétain d’avant 40, qui était déjà la vieille ganache ultraréactionnaire qui allait prendre toute sa mesure dans la collaboration ? ».

Miller réinvente la prédiction rétrospective, reprochant à De Gaulle d’avant 40 d’être un pétainiste d’après 40, d’admirer la ganache ultraréactionnaire, chef de l’Etat français,  qui va devenir le collabo que l’on sait.

Mais est-ce historiquement vrai : de Gaulle n’admirait pas particulièrement Pétain. Il le considérait positivement comme tout le monde, pour son rôle de chef militaire. Rôle aujourd’hui fortement questionné et remis en question.

Deuxième casserole, il écrit : « Peut-on rappeler que dans ses Mémoires de guerre de Gaulle n’évoque pas le génocide des juifs par les nazis, et qu’il est à parier qu’il tenait les chambres à gaz pour un  "détail de l’histoire" ? »

Il faut appeler un chat un chat. Miller ne dit pas que de Gaulle est un négationniste mais il le compare à Le Pen auteur du « détail ». Ce qui signifie que Miller accuse de Gaulle d’être lepéniste et donc de relativiser le génocide des Juifs comme le font les négationnistes en ramenant la Destruction des juifs d’Europe à un « détail ».

Désormais, et pour l’éternité, Gérard Miller sera celui qui rigole avec Onfray et qui fait de de Gaulle, chef de la France Libre et organisateur de la Résistance,  un pétainiste et un lepéniste négationniste.


[1] Oct. 2014, Grasset.

[2] Pour les textes qui rapportent ces déclarations, voir Le Post.fr (qui a laissé place au HuffongtonPost.fr en janvier 2012).
http://archives-lepost.huffingtonpost.fr/article/2010/11/09/2298219_et-si-on-rappelait-ce-que-de-gaulle-disait-des-juifs-des-arabes-et-des-noirs.html

[3] Cité par B. Stora, Le transfert d’une mémoire, Ed. La découverte.

[4] Entretiens avec Jacques Foccart, 8 novembre 1968. Journal de l’Elysées, tome 2. Fayard.

[5] Lacan, dans son Séminaire  Séminaire livre VIII,  Le transfert,  traitait les personnages du Banquet  de Platon de « vieilles tantouses » et Didier Eribon,  en puritain, en a déduit que Lacan était homophobe. Allons donc !  Lacan traitait tout le monde comme ça.  La démarche de Miller envers de Gaulle participe de la même méthode.

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