J'ai vu une autre France lundi dernier en me rendant, à la demande d'une amie et collègue, à la prison de Fleury Mérogis où de remarquables enseignants bénévoles font avec les détenus, les uns des ateliers de philosophie, les autres de littérature, et invitent de vrais intellectuels et d'excellents écrivains à parler.
Les lieux sont hideux, vétustes, remplis de détritus jetés par des prisonniers transformés en bêtes fauves qui hurlent et s'interpellent derrière les barreaux de chaque cellule. Ils souffrent, ils haïssent, ils glapissent comme dans certains romans de Jack London. J'étais mal à l'aise en traversant cette zone en forme de poubelle géante qui conduit à la Chapelle où avait lieu le débat. Les 50 prisonniers qui participaient à cet atelier de philosophie étaient tous volontaires, soucieux d'apprendre, de comprendre. Ils avaient dû franchir un parcours d'obstacle pour être là. Pendant les moments d'exposé, le silence attentif était impressionnant. On sentait leur violence intérieure à peine retenue. On a parlé de philosophie, de religion, de psychanalyse et de l'expertise psychiatrique et psychologique, cette évaluation qui transforme les êtres en choses. Je salue le courage de ceux qui travaillent dans les prisons dans de telles conditions.