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Billet de blog 24 avril 2013

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Michel Onfray s’en va-t-en guerre.

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 Après avoir assassiné une deuxième fois Marat[1]« …brûlot mal inspiré, jamais fondé, truffé d’erreurs, ponctué d’attaques haineuses, arbitraires et pour tout dire, populistes[2]», après avoir tué Dieu[3], déjà mort depuis le Zarathoustra de Nietzsche, dans un ouvrage qui relève plus du sophisme que de la philosophie[4], après avoir tenté d’assassiner Freud  à son tour, [5] dans « …un brûlot truffé d'erreurs et traversé de rumeurs, Michel Onfray, qui n'est pas  historien et ignore tout des travaux produits depuis quarante ans par les véritables historiens de Freud et de la psychanalyse (des dizaines d'essais dans le monde, dont les principaux sont traduits en français), se  présente pourtant comme le premier biographe de Freud capable de décrypter des légendes dorées déjà invalidées depuis des décennies. Se transformant en affabulateur découvrant des vérités occultes qui auraient été dissimulées par la société occidentale - elle-même dominée par la dictature freudienne et par ses milices - il traite les Juifs, inventeurs d'un monothéisme mortifère, de précurseurs des régimes totalitaires, Freud de tyran de toutes les femmes de sa maisonnée et d'abuseur sexuel pervers de sa belle-sœur: homophobe,  phallocrate, faussaire, avide d'argent, faisant payer ses séances d'analyse  450 euros… »[6], après avoir utilisé Camus pour tirer contre Sartre[7], Onfray qui n’est pas à une enflure près s’érige en théoricien de la guerre dans Le Monde du mardi 23 avril pour tirer à boulets rouges contre François Hollande et la politique française au Mali, qu’en fin interprète de la géopolitique  il ramène à une opération de com’, orchestrée par les communicants de l’Elysée pour rehausser l’audimat d’un président en difficulté devant l’opinion publique.

Dans un texte d’une demi-page qui s’étire comme un jour sans pain, on est frappé par le martelage de quelques expressions qui, à l’évidence, tient lieu de réflexion pour ce « philosophe » auto proclamé qui reproche à F. Hollande et à ses conseillers d’être en mal de pensée. Dans ce texte qui fait à peu près 5000 signes, on peut relever 12 fois le mot « pensée », ou des expressions le comprenant comme « le parti socialiste n’a pas de pensée de la guerre », ou bien, « il faudrait une pensée de la guerre qui prendrait enfin acte de la fin de la guerre froide …» (merci Onfray, on vous avait attendu !!!)., ou bien syntagme proche, la brute sans cervelle qu’il oppose aux malins très avisés, les Achilles de l’Elysée qui choisissent la force, aux Ulysses rusés. Mais qui sont-ils ? Dans tout son texte, pas un mot pour les nommer, les groupes djihadistes qui mènent une guerre, tantôt offensive, tantôt de guérilla, au Mali, dévastant la population, détruisant la richesse patrimoniale du Mali. Sous sa plume et dans ce qui lui sert de pensée, ils sont une sorte de figure mythique de combattant aux pieds nus, ou plutôt en tongs, vêtus de djellaba (rapiécées ?) et se déplaçant en pick up, sous l’égide du général Giap et de Sun Tze. Onfray reproche aux stratèges de l’Elysée d’en rester à Clausewitz[8]. Onfray qui semble puiser sa culture dans la collection du Reader Digest  n’en retient que le premier aspect, le théoricien de la guerre classique qui disserte sur les mérites comparés de la stratégie et de la tactique militaires entre armées ennemies. Il ignore le Clausewitz théoricien des guerres populaires dont le Général Giap, génial chef de guerre, s’inspira largement[9] !

Non seulement il dit n’importe quoi sur Giap et Clausewitz qu’il oppose l’un à l’autre, ignorant que Giap a beaucoup lu et médité Clausewitz. Mais en outre, deuxième grossière erreur ce qu'il dit de Dien Bien Phu est tout simplement FAUX. Ce n'est pas la défaite de régiments bardés de la dernière technologie de l'époque par une armée de va nu pieds bardés de la dernière idéologie de l'époque mais bel et bien une bataille classique dans laquelle le plus fortement armé a gagné. Les français ont passé des jours et des jours sous un déluge de feu ! Giap avait sûrement lu Napoléon ... et savait comment celui -ci avait franchi les Alpes. Et la grande réussite de Giap est d'avoir construit une armée "classique" . Je renvoie, pour une fois, à la lecture de Wikipedia sur la bataille de Dien Bien Phu[10]s’il faut se convaincre qu’il s’agit bien d’une guerre classique.

Une fois sortie du vague de ses généralités, il n’accorde pas un mot à la situation réelle sur le terrain. Ni aux exactions réalisées par les groupes djihadistes dans les zones occupées par eux qu’ils ont dévastées, - en tong et djellaba -, les villes pillées, mises en coupes réglées, ni à la réalité sur le terrain de la situation militaire. Heureusement pour cela, on peut lire sur la même page du Monde l’excellent article de Gérard Chaliand, géopoliticien, spécialiste des conflits armées, qui montre la différence avec les autres conflits d’Irak, dAfghanistan, du Liban, de la guerre d’Algérie, pour conclure  à la justesse de l’intervention des forces spéciales françaises. On ne  peut que regretter le manque d’espace, celui-là même occupé par l’inintéressant Onfray, pour permettre à Gérard Chaliand de développer ce dernier point qu’il n’a pu qu’effleurer dans son article.

Le grand mystère est : comment Onfray avec toutes ses approximations, ses contre vérités factuelles et son insondable bêtise peut-il abuser la galerie d’une façon aussi continue ?


[1] Dans son livre La religion du poignard. Éloge de Charlotte Corday[1], Paris, Galilée, 2009, 80 p.

[2] Guillaume Mazeau in Annales historiques de la révolution française.http://ahrf.revues.org/11822

[3] Traité d'athéologie ,Michel Onfray, Grasset. 2005

[4] L'Antitraité d'athéologie, préface  de Régis Debray. Mathieu Baumier, Presses de la Renaissance, 2007.

[5] Le Crépuscule d'une idole, l'affabulation freudienne, Grasset, 2010

[6] Roudinesco déboulonne Onfray le nouvel obs, http://bibliobs.nouvelobs.com/essais/20100416.BIB5236/roudinesco-deboulonne-onfray.html et Mais pourquoi tant de haine ? Elisabeth Roudinesco, Seuil

[7] http://www.monde-diplomatique.fr/carnet/2012-01-11-Coup-bas-intellectuel

[8] Carl Philipp Gottlieb von Clausewitz (1780-1831) est un officier et théoricien militaire prussien. Il est l'auteur d'un traité majeur de stratégie militaire De la guerre qui est une compilation de textes divers, épars et parfois contradictoires, et de toutes sortes de textes sur le même sujets qui nourrissent l’enseignement des écoles militaires, et la réflexion politique. Il a théorisé les guerres napoléoniennes, leurs victoires mais aussi leurs défaites. En particulier les guerres populaires, menant la guérilla contre les armées en ordre de marche ou de bataille comme ce fut le cas en Espagne puis en Russie où l’on sait le désastre que connurent les troupes de Napoléon.

[9] Chef de l'Armée populaire vietnamienne pendant la guerre d'Indochine et ministre de la défense du Nord Viêt Nam durant la guerre du Viêt Nam, il est le seul général ayant vaincu à la fois l'armée française et l'armée américaine au cours de sa vie.

[10] http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Bataille_de_Dien_Bien_Phu_13_au_15_mars_1954.jpg
Les positions françaises  du 13 au 15 mars 1954 et les premiers assauts Viêt Minh
L'attaque débute le 13 mars (1954)  à 17h00 par une intense préparation d'artillerie visant le centre de résistance « Béatrice », l'un des CR les plus éloignés du dispositif, tenu par le 3e bataillon de la 13e demi-brigade de Légion étrangère (III/13e DBLE), commandé par le chef de bataillon Pégot. L'attaque n'est pas une surprise pour les défenseurs, puisque les services de renseignement français avaient correctement prévu l'endroit et l'heure où elle se déclencherait, mais la puissance de feu de l'artillerie viêt minh cause un véritable choc. Le point d'appui est écrasé par les obus de canons et de mortiers lourds. Il en reçoit des milliers en quelques heures. Les abris, non conçus pour résister à des projectiles de gros calibre, sont pulvérisés. Le chef de bataillon Pégot et ses adjoints directs sont tués dans les premières minutes du combat, par un coup direct frappant leur abri. Les liaisons radio avec le centre du camp sont coupées, empêchant les défenseurs de Béatrice de régler correctement les tirs de l'artillerie française.
L'assaut du Viêt Minh est donné par les 141e et 209e régiments de la division 3166 qui s'élancent des tranchées réalisées à proximité du centre de résistance.

Si ça, ça n'est pas de la guerre classique !!!!

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