Avez-vous jamais participé à une campagne électorale ? Je veux dire, tracter, parler avec les habitants, marcher beaucoup, faire du porte à porte ? Je l’ai fait pour les Départementales dans ce qu’on appelle un quartier populaire. C’est fatiguant bien sûr mais remet au placard quelques idées toutes faites !
Tout d’abord permettez-moi de vous présenter notre candidat. Il a exercé son activité d’« instit » pendant trente ans dans cette partie de la ville. Pendant cette période (Il est maintenant en retraite), il était adhérent au Parti socialiste et socialiste il l’est resté puisqu’il a rejoint le Parti de Gauche dans le Front de Gauche, refusant toute allégeance aux « Solfériniens ».
D’une approche facile (il vaut mieux), volubile (ça facilite), connaissant le terrain (et pour cause) il a fait une campagne plus qu’efficace et un résultat honorable.
Avec sa volonté de convaincre et sa foi en ses convictions, en l’observant sur le terrain, cet homme vrai me faisait songer à ceux qu’on appelait autrefois les « hussards de la République » ou à cet « instit » qui découvrit, à Alger, derrière l’image du petit pauvre qu’il était, tout le potentiel qui fit d’Albert Camus un prix Nobel de littérature.
Aider un instituteur dans sa campagne plus de soixante ans après qu’un des siens m’ait appris chaque jour, pendant la guerre, la morale et les valeurs de la république, valeurs qu’il défendait la nuit dans la résistance, me semblait un tribut de reconnaissance bien faible… mais m’aidait à supporter quelques douleurs physiques.
Nous avons rencontré beaucoup de gens, appuyé sur beaucoup de boutons de sonnette, garni beaucoup de boîtes aux lettres, questionné des jeunes, inactifs, demandé leur besoins, leurs envies, reçu toujours la même réponse : « Du travail et un local » !
Pendant nos déambulations, combien de fenêtres opaques, de façades aux couleurs tristes, lépreuses, de ruelles défoncées, envahies par la végétation et des rencontres fortuites, intéressantes, avec des gens ouverts, gentils ! Et partout on nous ouvrait lorsqu’on sonnait, on nous répondait lorsque nous interrogions, on prenait nos tracts et on lisait. Quelle patience ont-ils ces gens qui, à chaque consultation, reçoivent des promesses jamais tenues et pendant combien de temps encore l’auront-ils ? Là comme ailleurs, combien d’intelligence, de savoir faire, de potentialités sont gâchés, abandonnés délibérément.
Le résultat ? La poussée de la peste brune est ralentie… pour le moment, la monarchie républicaine respire encore… pour combien de temps ?
Est-ce ainsi que les hommes vivent ?
 
                 
             
            