Grand émoi sur les réseaux sociaux et dans la blogosphère, Claire Chazal a été remerciée, a reçu son congé comme un vulgaire domestique, virée comme un simple ouvrier, liquidée comme un OS ordinaire.
Elle qui a, pendant plus de vingt ans, porté la bonne parole du MEDEF, semé le trouble dans les esprits sur ce qu’entreprenait une gauche au pouvoir, interrogé les Présidents successifs en évitant de poser les questions qui fâchent, jouant le rôle pour lequel elle avait été recrutée : projeter l’image d’une chaîne miroir de son public sous les traits d’une jolie femme sûre d’elle, intelligente, capable de filtrer l’information, la rendre le plus neutre possible, c’est-à-dire « comestible » pour ce qui reste « de temps de cerveau humain disponible entre les spots publicitaires ». Totale réussite, ponctuée par la légion d’honneur, gage de servitude volontaire, qu’aucun journaliste digne de son métier, ne devrait jamais accepter.
Ce qu’elle avait oublié, emportée par l’adulation d’un public qui, cependant désertait petit à petit TF1, c’est que pour le capitaliste-propriétaire, seul compte l’audience, ce chiffre sacré qui conditionne le prix de vente de la publicité, cette manne, source de la croissance du groupe. L’audience chute, exit Chazal !
Encore peut-elle s’estimer heureuse que son congédiement n’ait pas eu lieu six mois plus tard, au moment où ceux qu’elle a si longuement défendus auront fini de triturer le code du travail : les indemnités auraient été plus maigres et les moyens de se défendre plus réduits. C’est pour le coup que la pilule aurait été amère.
Il n’empêche que la brutalité de cette éviction, similaire à la manière de Bolloré à canal +, justifie pleinement la mobilisation pour la défense et l’amélioration du code du travail existant.
L’excessive exposition médiatique de la situation de quelques personnalités occulte la situation dramatique de la cohorte des travailleurs qui chaque mois tombe dans le gouffre du chômage ou se trouve sous le coup d’une décision prise par des conseils d’administration dont la religion est simplement l’amour immodéré de l’argent. Pour ces laissés-pour-compte, il y a moins d’espace dans les journaux, radios, télés qui leur est consacré et beaucoup de larmes de crocodiles.
Telle est la déliquescence dans laquelle est plongée la société européenne sous la férule du capitalisme financier et la négation de la souveraineté populaire.