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Dans un monde virtuel, cette figure serait celle d’une super héroïne qui s’attache les cheveux, remonte les lunettes sur son nez et se prépare pour le combat final. Dans un monde virtuel, la super héroïne disposerait d’une arme fatale avec laquelle elle pourrait vaincre les méchants.
Dans un monde virtuel, notre héroïne serait touchée par les balles des forces obscures, mais elle se relèverait de ses cendres, car elle aurait sept vies comme un chat. Et puis au pire, on appuierait sur un bouton de Restart et le jeu repartirait à zéro.
Mais voici comment cela se passe dans le monde réel.
Nous sommes en Iran, le 30 Shahrivar (21 septembre). C’est la fin de l’été mais il fait encore doux. La super héroïne, la nôtre s’appelle Hadis. Hadis qui signifie, à peu de chose près : Légende.
Elle a 23 ans et vit dans la ville de Karaj, à une heure de Téhéran. Elle est le 4e enfant de la famille et travaille dans un restaurant. Elle partage souvent des vidéos d’elle-même sur les réseaux sociaux où elle chante ou danse, insouciante. A priori, ce n’est pas ce qu’on appellerait une activiste, mais elle a été touchée par la mort violente de Mahsa Amini, presque du même âge que Hadis. Quelques jours à peine, l’en séparent. Hadis est déterminée. Elle veut continuer à protester pour rendre justice à Mahsa et pour sa liberté. Ne plus porter le foulard, s’habiller comme elle veut. Aussi simple que ça.
Mardi soir, Hadis a été filmée en train de ramasser ces cheveux derrière la tête, dans ce geste désormais immortalisé, puis de remonter ses lunettes sur le nez avant de faire face à l'unité anti-émeutes, armées jusqu’aux dents. Vidéo de 6 secondes, devenu virale en très peu de temps.
En allant à la manif, Hadis se filme et poste le film. Elle s'adresse à ses amis. Ce seront ses derniers mots : Lorsque je regarderai en arrière dans quelques années, et que tout cela aura déjà changé, j’aimerais pouvoir être fière d’être allée manifester ce soir.
Mais Hadis ne rentrera jamais chez elle. Ce soir-là, elle est visée par les forces anti-émeutes et reçoit six balles. Dont une à la tête et une au cœur.
Hadis est tombée et ne s’est plus relevée. Son corps a été rendu à sa famille à la condition stricte d’attester qu’elle était morte de mort naturelle. Elle a été enterrée vendredi 23 septembre dans la stricte intimité, juste une semaine après Mahsa Amini.
La twitteuse @PAULA35CAT qui publie ce dessin de Hadis, le précède de cette phrase: Ni un pas enrera.
C’est sans doute ce qu’aurait dit Haids. Pas un pas en arrière. Pas un pas…