LAMENTATION SUR LA MORT DE LUIGI, UN MANOUCHE
HOMMAGE AU GRAND DJANGO REINHARDT. UN POÈME
Pleure, pleure, ôDjango,
Sur ta guitare,
ô grand Reinhardt,
là-haut, là-haut auparadis,
tes doigts ont égrenéavec peine
les notes d’un Requiem,
pour l’un de tesfrères,
l’un des Rroms, desGitans,
des Manouches, desTziganes,
qui ont des sièclesdurant,
porté sur les rivagesd’Europe,
le savoir, la sagesse,
le pouvoir,l’allégresse,
de l’Inde, de la Grèce,
Al-Kymiã, Gyptosantique.
Pleure, pleure, ô Django,
Sur cette noble terrede France,
que tu asparcourue et aimée,
tes frères ne sont plusacceptés,
l’heure des pogroms
de nouveau a sonné.
Pleure, pleure, ôDjango,
Vos caravanes s’étirant
vers la bouche du grandfleuve
fécond et puissant,
aux Saintes Mariesviennent fêter
la Vierge Noire desopprimés,
des exclus, deserrants,
peuple consacré,éternels exilés.
Pleure, pleure, ôDjango,
Dans cette France quifut asile,
mère nourricière etprotectrice,
tes frères sontpersécutés,
pour avoir oser
défier la modernité.
Pleure, pleure, ôDjango,
Cette terre des grandssaints,
des poètes, desmusiciens,
des mystiquesilluminés,
des philosopheséclairés,
cette terre vous arenié.
Pleure, pleure, ôDjango,
Ô vous compagnons duvoyage
unis dans l’éternellequête,
de l’absolu et dusacré,
vous seuls savez vousmontrer dignes
du poète le destinétoilé.
Vous seuls savezécouter
au souffle du ventl’appel
du soir sous les hautesfutaies
des profondes etantiques forêts,
âme des druides, sagesmystiques,
qui vous chuchote ensecret
le chemin qui vous esttracé :
sous le ciel hautclouté d’étoiles
vous seuls savez mettreles voiles.
Pleure, pleure, ôDjango,
Vous seuls encoresuivez la trace
de nos ancêtresmillénaires,
guidés par les astresla lumière
vers une destinationpremière.
Entre vos mains,trésor, sommeille,
la mémoire de nos aïeux
qui dormaient etdansaient sous les cieux
à l’écoute des astreset des dieux.
Pleure, pleure, ôDjango,
Vous seuls savez encore
faire trembler surl’air la note
qui dans l’âme l’appeléveille
de la route et de sesmerveilles.
Pleure, pleure, ôDjango,
Vous les gens du voyagesans fin
sur cette terre aveztracé
des chemins semés desanctuaires
à la Grande Mèrenourricière,
à Maia, Isis, Marie,Sarah,
vous êtes vousconsacrés,
déesse d’amour riche etféconde,
son sein généreuxabonde,
mais sa survie estmenacée,
des hommes dont lacupidité,
éventre, viole enimpunité.
Pleure, pleure, ôDjango,
Vous appartenez à laterre,
Fils du Vent, de lalumière,
que vos chants etdanses vénèrent,
plainte de l’hommemenacé.
Pleure, pleure, ôDjango,
Quand tes frèresn’auront plus de pain,
de chants semés sur lechemin,
quand ils serontincarcérés
au béton armé descités,
quand ils n’auront plusaccès,
aux sentiers des migrations
de l’âme humainepérégrinations
et reflet de sondestin,
alors s’éteindral’histoire,
se voilera à jamais
la face de la luneoccultée,
qui règne sur vents etmarées,
la face de la ViergeNoire,
la face de Sarah laBelle,
servante et souveraine,
gardienne de tous lessecrets
enfouis dans l’âmehumaine.
AURORE DE SAINT-JEAN
Paris, le 22 juillet2010
MONIQUE RICCARDI-CUBITT
www.arcadiamundi.eu