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HISTORIENNE D'ART, CONFÉRENCIÈRE, JOURNALISTE, AUTEUR, POÈTE

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Billet de blog 11 janvier 2015

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COMMENT LA FRANCE EN EST ARRIVÉE LÀ, ou  LA FIN DE L’ESPRIT SOIXANTE-HUITARD.

Devant l’horreur absolue, les mots sont impuissants. Tout comme les massacres en Afrique, en Ukraine, en Irak, en Syrie, à Gaza, le meurtre prémédité de la rédaction et des employés de Charlie Hebdo ce mercredi 7 janvier,  engendre la nausée et le vertige.

Mais nous sommes en France, sur le sol français, et il faut se demander non QUI, COMMENT, mais POURQUOI ces deux jeunes hommes en sont arrivés à tant de haine aveugle et meurtrière. Car, selon les principes et les lois de la République, AVANT d’être Arabes et Musulmans, ils sont d’abord, et avant tout FRANÇAIS ! Ce privilège devrait leur conférer un statut dans la société, leur inspirer un idéal de vie, leur ouvrir des portes, or il n’en est rien. Les Français, issus de l’immigration de l’ancien empire colonial français, continuent d’être considérés, et traités, comme des citoyens de  seconde classe. Ils ne jouissent pas du même statut que les émigrés des pays européens : Manuel Walls, d’origine espagnole par exemple, ou Nicolas Sarkozy, de sang- mêlé Juif de Salonique et Tisgano-Hongrois. Tous deux d’ailleurs coupables dans le milieu politique, en compagnie de Jean-Marie Le Pen, de Brice Hortefeux, de Claude Guéant,  et d’autres, d’attiser dans ce pays la tension sociale, la haine xénophobe et raciste par leurs propos inflammatoires.

Il est trop facile de stigmatiser le Front National, alors que les politiques en mal de vote, tel Sarkozy, leur font la cour quand ils leur plaisent, et les dénoncent comme loup garous quand  ils jouent sur la peur. Ce massacre chez Charles Hebdo ne ressort pas tant de l’idéologie  des Jihadistes, mais de la violence, de la haine, des incohérences internes, et externes, de la politique intérieure et étrangère de la France, de l’Europe, de l’Occident en général. 

Le sens du sacré participe du transcendantal, et est inhérent à toutes cultures. Il l’était en Occident, et en France en particulier, il y a encore peu de temps. Au nom de slogans aussi creux que vains, Il est interdit d’interdire, de la libéralisation des consciences et des moeurs, prônée par Mai 68, la France n’a plus de valeurs morales. Ses dirigeants, de droite comme de gauche, censés les représenter, vivent dans  un monde de vaudeville hollywoodien de mauvais goût, et de bas étage. De sordides histoires entachent leur crédibilité. Dominique Strauss Kahn est accusé de proxénétisme dans ce que l’on nomme par un euphémisme délicat et hypocrite, des parties fines, et d’agression sexuelle. Nicolas Sarkozy trempe dans plusieurs affaires troubles de financements illégaux, d’abus de confiance, d’actions frauduleuses. Quant à vie personnelle, donc publique en tant que Président, à peine installé à l’Élysée, il divorce de la femme qui l’avait fait élire et le quitte, pour épouser un ancien mannequin reconverti en chanteuse, dont le passé rock’n roll est aussi sulfureux que celui de son époux, et dont la cupidité et le constant désir d’autopromotion lui sont égaux. François Hollande incarne tout l’égocentrisme, toute la médiocrité de pensée fumeuse et contradictoire, de la génération des soixante-huitards.  Père de ses enfants, il se refuse au mariage avec Ségolène Royal, pour s’embarquer dans une longue relation adultère avec une femme qui le soutient dans son ascension au pouvoir.  Puis il la répudie pour un nouveau modèle –l’attrait de la chair fraîche -, Valérie Trierweiler épanche  alors son fiel dans un livre vengeur et dénonciateur, qui la rend millionnaire !

L’IMAGE DES ÉLITES POLITIQUES FRANCAISES EST DÉPLORABLE. Dans leur course au  pouvoir,  ils s’abreuvent d’injures entre eux, et tout un chacun les opposant. Point besoin de mentionner Nicolas Sarkozy, passé maître du genre. Pour tous ceux, dotés un tant soit peu d’humanisme, de valeurs morales, de sensibilité, voire de spiritualité, cette situation est insupportable.  Le dieu Mammon règne suprême, à droite, comme à gauche. L’apparence l’emporte sur la substance, François Hollande, le socialiste incarnant la transgression sociale, fait des courbettes à toutes les têtes couronnées d’Europe et d’ailleurs, dont il peine pourtant à suivre le protocole et l’étiquette. Son prédécesseur, Nicolas Sarkozy, s’était incliné devant les potentats tyranniques du Moyen-Orient, Kahdafi et Bashar el Assad, dans son propre intérêt, plutôt que celui de la France qu’il était censé représenter.

Comment une jeunesse, marginalisée pour ses origines, discriminée pour ses croyances, peut-elle s’y retrouver et s’identifier ? Leurs congénères plus chanceux, tel Rachida Dati, ne leur offrent qu’une image de cupidité, de recherche de publicité et d’autopromotion, de manque d’idéaux civiques et moraux. Le blasphème est offensant pour tout croyant QUELQUE SOIT SA FOI, mais il reflète sur le blasphémateur plus que sur le blasphémé. Dire, au nom de la liberté d’expression, que le blasphème est un principe républicain, est rabaisser la République à son niveau le plus bas et le plus détestable, et l’éloigner de ses vraies valeurs.  Dans une  société véritablement libre, égale et fraternelle, en accord avec les principes républicains, L’OFFENSE CAUSÉE AUX AUTRES DOIT ÊTRE PRISE EN COMPTE. C’est une règle ÉLÉMENTAIRE de respect mutuel, d’entente tacite, de maturité d’esprit, sinon de simple intelligence, que la mondialisation a élargi au village global. Ce n’est pas par la peur qu’il faut régner, elle engendre la haine,  mais bien  par l’amour fraternel, agape, caritas, que la société changera. Cette tolérance et ce respect des autres sont prônés par TOUTES les philosophies humanistes et religieuses, des cultes antiques orientaux et occidentaux, au Bouddhisme - tant à la mode dans les cercles intellectuels français - aux grandes religions monothéistes issues du Judaïsme, le Christianisme et l’Islam. Suivons donc le conseil du Dalaï-Lama, Restez dans votre religion, ce faisant vous apprécierez et respecterez celle des autres.

Or cette laïcité française, tant invoquée, semble donner lieu non à la tolérance, mais à un athéisme intolérant, virulent et blasphématoire, qui engendre la violence dans sa propre violence. La France a perdu trace de son passé, c’est une maladie de l’âme qui gangrène toute la société. La France a une histoire tellement plus riche et plus diverse, plus universelle que celle, imposée par les modes de pensée contemporains, qui la voient débuter en 1789, si ce n’est en 1968 ! Connais toi toi-même, et tu connaîtras le secret des Dieux,  la formule delphique et socratique est oubliée dans cette France vidée de sa substance et de sa dimension spirituelle. Quand un ministre de la Culture, Frédéric Mitterand, déclare à l’inauguration d’une exposition biblique à l’UNESCO, avoir découvert la Bible dans les films de Cecil B. de Mille ! Quant ce même ministre, accompagné d’un ancien ministre de la Culture, Jack Lang, quitte la représentation de l’opéra de Gounod, Mireille, dont le mysticisme chrétien de Frédéric Mistral lui déplait, il est légitime de se demander quelle CULTURE ils représentent ! Suite à des actions citoyennes, aussi intempestives que virulentes, des tribunaux administratifs interdisent l’exposition de la crèche de Noël dans les endroits publiques. L’absurdité de vouloir éradiquer TOUTE RÉFÉRENCE RELIGIEUSE au jour anniversaire de la naissance du Christ relève de Clochemerle, le roman satirique de Gabriel Chevallier ! De quelle CULTURE s’agit-il donc si dans l’histoire des arts français et européens,  l’on ne peut plus se référer et transmettre la tradition chrétienne, ou classique, qui les a inspirés ?  Ainsi le percevait ce professeur britannique, don à Cambridge, exprimant son désarroi au micro de France Inter à propos de la culture contemporaine française :  Où sont vos Mauriac, où sont vos Claudel? Paul Claudel était aussi diplomate. Il pratiquait l’élévation de l’esprit, la courtoisie, les bonnes manières, qui sont respect et tolérance des autres et de leurs idées.

La France a donné l’exemple de cet art de la diplomatie pendant des siècles. Où est passée cette ancienne gloire, cet art de vivre poli et raffiné ? Le règne de Sarkozy à l’Élysée, et celui de Bernard Kouchner au Quai d’Orsay en ont détruit les derniers vestiges. Un seul homme se recommande encore de cette grande tradition, Dominique de Villepin, décrié et jalousé par ses pairs français, mais grandement respecté et admiré dans le monde entier, en particulier au Proche et au Moyen-Orient, depuis son intervention à l’ONU en février 2003 contre la guerre illégale en Iraq. Il serait le seul à pouvoir mener à bien une mission conciliatrice sur ces situations interculturelles très délicates, et potentiellement explosives, au niveau national et international. Le monde politique français fait la sourde oreille à tous ses articles, à tous ses messages prophétiques, à toutes ses analyses pertinentes et lucides sur la situation catastrophique à laquelle la France, l’Europe, l’Occident, le monde entier court. Quand la France se décidera t-elle à entendre la voix de la raison ? Elle s’enlise dans un dangereux marasme décadent, que glorifient deux expositions sur Sade en cours à Paris.  La première, au Musée d’Orsay, est monstrueuse de complaisance, d’absence de rigueur intellectuelle et méthodologique, non seulement par le sujet lui-même, mais par l’accumulation - dénuée de toute logique, et de tout principes didactiques visuels et historiques - d’œuvres d’art déjà présentées dans une autre exposition au même musée en 2013, L’Ange du Bizarre. Cette répétition ad nauseam des horreurs et perversions dont est capable  la nature humaine, est une forme subtile de propagande d’une pensée unique, qu’il faut dénoncer pour son rôle nocif et corrosif. Le sous-titre le révèle : Attaquer le soleil. Certains d’entre nous en aiment la splendeur, la lumière et la chaleur, certains d’entre nous s’y abreuvent, s’y fortifient et s’en réclament, certains d’entre nous savent que l’homme est un géant dont, certes, les pieds sont dans la boue, mais dont le regard est tourné vers les étoiles, certains d’entre nous lèvent les yeux vers le ciel, et refusent de patauger dans la boue…

Aussi pour rendre hommage aux victimes de cette fusillade meurtrière, la France s’est détournée du blasphème et de la transgression, et a retrouvé sa spiritualité dans le besoin de réconfort et de transcendance. Les cloches de toutes les églises, et de toutes les cathédrales de France, ont sonné le glas en ce jeudi 8 janvier, jour de deuil national. Les notes exaltées du Requiem de Mozart, de Fauré, de Verdi, de Gounod, ont résonné sous leur voûtes. Dans les mosquées, à la prière du vendredi, les imams ont condamné la violence meurtrière. Maintes personnes venues manifester leur sympathie dans la rue ont ressenti la réalité intemporelle des vers mystiques du poète métaphysique anglais du dix-septième siècle, John Donne :

Nul homme est une île,

Seul et isolé,

Tout homme appartient au continent,

Celui de la race humaine.

Si une seule motte de terre, emportée par la mer, se détache,  l’Europe est amoindrie,


Comme si avait disparu un haut lieu,

Ou comme si l’avait été la demeure de ton ami

Ou bien la tienne.


Toute mort humaine me diminue,

Car j’appartiens à la grande famille humaine,

Pour ce, je n’envoie jamais quérir pour qui sonne le glas,

Car je sais qu’il sonne, et pour toi, et pour moi.

FAUT-IL ATTENDRE UN DÉSASTRE POUR SE TOURNER VERS DIEU ET RETROUVER LA LUMIÈRE ?  LA FRANCE, ET LE MONDE ENTIER, S’ARRÊTERONT-ILS À TEMPS AU BORD DE L’ABÎME ?

MONIQUE RICCARDI-CUBITT

10 janvier 2015

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