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Billet de blog 27 février 2011

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DE LA GUERRE DE L’IRAK À LA RÉVOLUTION DE JASMIN. L’INIQUITÉ DE LA DÉSINFORMATION.

NICOLAS SARKOZY CLONE DE TONY BLAIR. LE POUVOIR NÉFASTE DU SPIN

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NICOLAS SARKOZY CLONE DE TONY BLAIR. LE POUVOIR NÉFASTE DU SPIN

L’histoire se répète avec une troublante similarité.Le 27 avril 2004 cinquante deuxdiplomates et hauts fonctionnaires britanniques signaient une lettre ouverte àTony Blair dans le quotidien The Guardian pour protester contre la guerre en Irak et les dangereusesconséquences qui en résulteraient. Mardi 22 février 2011, un groupe de diplomatesfrançais publie dans Le Monde, sous le pseudonyme Marly, une lettre adressée à Nicolas Sarkozydénonçant : La voix de la France a disparudans le monde. Sept années séparent ces deux interventions, lescirconstances sont différentes, le fond demeure le même. Il s’agit de l’abus depouvoir d’un chef de gouvernement, ses excès dans la poursuite de ses ambitionspersonnelles au détriment du bien général, et les désastres qui en résultentpour la diplomatie et la politique étrangère, en particulier au Proche et auMoyen Orient, de deux grandes nations qui rayonnaient sur le monde.

Il ne faut guère s’en étonner si l’on songe àl’admiration sans bornes que porte Nicolas Sarkozy à Tony Blair, son mentor. Ila dès le début, comme lui, annoncé Une République irréprochable, écho de la célèbre phrase : pluspur que pur, de Blair. Comme lui, envue de réformes entreprises au nom de la modernité, il s’est comporté demanière cavalière envers la Constitution, méprisant et humiliant les grandesinstitutions de l’État qui assurent la stabilité et le bon fonctionnement d’unedémocratie. Comme Blair, surnommé le Caniche de Bush, il s’est prosterné aux pieds du présidentaméricain afin de recevoir sa bénédiction et d’en tirer à l’avenir desbénéfices personnels. Blair et Sarkozy ne sont pas des hommes d’état, ce sontdes entrepreneurs qui se servent de la fonction publique afin de parvenir à lacrédibilité et au prestige d’un pouvoir qui les font membres d’un clubexclusif, et leur permettent de bâtir des réseaux d’affaires et une fortunepersonnelle. Ils s’entourent non d’experts avisés qui puissent les guidersagement dans leur fonction, mais de sinistres aventuriers ambitieux, ces spindoctors, maîtres manipulateurs, quiélevés au rang de conseillers, veillent et oeuvrent dans l’ombre au bon renomde leur maître et seigneur, auquel ils vouent totale dévotion et adulation.Shakespeare eût brillamment décrit les sombres manœuvres de ces éminencesgrises, qui de Londres à Paris, ont tissé, et tissent encore, leur toile dedéception. Seuls les noms changent, il faut substituer Henri Guaino, AlainMinc, Claude Guéant à Alastair Campbell et Peter Mandelson, surnommé LePrince des Ténèbres.

L’ancien Premier Ministre britannique John Major s’estinsurgé en 2003 contre de qu’il nomme : La pornographie de la politique dans son pamphlet L’Érosion duGouvernement Parlementaire. Il y dénonce des dégâtsimmenses faits à la politique…La manipulation de l’information est lapornographie de la politique. La désinformation corrompt tout ce qu’elletouche. C’est la déception du peuple par le Gouvernement élevée au rang d’une institution.Ce sont des sondages et des statistiques que l’on fausse et présenteavantageusement. Ce sont des chiffres de dépenses annoncés, puis sans cesserévisés. Ce sont des résultats dont on refait le bilan suivant l’actualité.C’est le bouc émissaire qu’il faut toujours dénoncer afin de s’innocenter.C’est proclamer ce qui noir être blanc, tout cela en l’espace d’une journée detravail. Il poursuit : Lesystème démocratique parlementaire s’appuie sur le fait que le parti au pouvoirreconnaisse la nature temporaire de son autorité et n’en abuse pas... Il sembleque le Premier Ministre (Tony Blair), n’ait pas bien compris l’importanceet le pouvoir de nos traditions, coutumes et conventions, qui ont façonné aucours des siècles les valeurs de notre système, et en ont établi ses limites etses équilibres de forces. Il ajoute : Lenouveau Parti Travailliste, méprisantapparemment l’histoire de notre nation, a détruit des sièclesde valeurs institutionnelles. Des réformes constitutionnelles malencontreuses et à moitié formulées ontété précipitées au nom de la modernité. Ce sont des changements qui menacel’essence même de la Constitution et affaiblissent et appauvrissent la libertéet la démocratie. L’obsession du Nouveau Parti Travailliste pour la désinformation,le style, l’impression immédiate a servi son image avec grand succès. Cependant elle a desservià l’occasion les plus habiles de ses adeptes. Et notre système politique en asouffert. L’importance accordée aux apparences et à la communication de l’imagea fait naître la méfiance du peuple envers le gouvernement.

Cette cinglante analyse faite il y a sept ans reflèteexactement la situation actuelle de la France. Et la lettre des diplomatesdissidents français se fait l’écho des craintes et de l’indignation de leurshomologues britanniques. Il est clair, disent-ils,que le président n'apprécie guère les administrations de l'Etat qu'il accabled'un mépris ostensible et qu'il cherche à rendre responsables des déboires desa politique. C'est ainsi que les diplomates sont désignés comme responsablesdes déconvenues de notre politique extérieure. Ils récusent le procès qui leurest fait. La politique suivie à l'égard de la Tunisie ou de l'Egypte a étédéfinie à la présidence de la République sans tenir compte des analyses de nosambassades. C'est elle qui a choisi MM. Ben Ali et Moubarak comme "pilierssud" de la Méditerranée…Or, à l'écoute des diplomates, bien des erreursauraient pu être évitées, imputables à l'amateurisme, à l'impulsivité et auxpréoccupations médiatiques à court terme.Ils poursuivent en déclarant sinistrée l’Union pour la Méditerranée, essentielle à lapoursuite d’une politique de paix au Proche et au Moyen Orient, dont ilsdénoncent le Manque de cohérence. Notre politique au Moyen-Orientest devenue illisible, s'enferre dans des impasses et renforce les cartes de laSyrie…Notre politique étrangère est placée sous le signe de l'improvisation etd'impulsions successives, qui s'expliquent souvent par des considérations depolitique intérieure. Qu'on ne s'étonne pas de nos échecs. Nous sommes àl'heure où des préfets se piquent de diplomatie, où les "plumes"conçoivent de grands desseins, où les réseaux représentant des intérêts privéset les visiteurs du soir sont omniprésents et écoutés.

Outre Manche, la lettre dans le Guardian en 2003déplorait la politiquequ’avait suivi Tony Blair, enproche collaboration avec les États Unis, dans le conflit israëlo-palestinien et en Irak. Elle dénonçait l’abandon deprincipes qui pendant près de quarante ans ont guidé les efforts au niveauinternational afin de restaurer la paix en Terre Sainte, ainsi que l’annonce des nouveauxplans d’Ariel Sharon et du Président Bush, illégaux et unilatéraux, quiauraient de sanglantes conséquences tant pour Israël que pour la Palestine… Cetabandon de principes intervient à un moment où le Royaume-Uni est dépeint danstout le monde arabe, à tort ou à raison, comme associé participant à uneoccupation brutale et illégale de l’Irak.Pour justifier cette intervention Tony Blair avait non seulement porté un fauxtémoignage devant le peuple et le Parlement en mentant sur l’existence desarmes de destruction massive, falsifié des documents émanant des Services del’Intelligence, mais joué sur la psychose populaire de la peur de l’Islam etdes extrémistes dans une politique anti-terroriste sécuritaire savammentorchestrée et entretenue par des propos sectaires et inflammatoires, reprise enFrance par Nicolas Sarkozy.

En 2003 la France avait alors fait l’admiration de toutle monde arabe après la déclaration de Dominique de Villepin à l’ONU le 14février, où ses mots, inspirés et inspirateurs, avaient fait naître un nouvelespoir. Il y a une alternative à la guerre et à la barbarie afin de promouvoirdes intérêts politiques, économiques et culturels, elle s’appelle ladiplomatie. Cet art de traiter avec les autres peuples avec égard et respect,de créer avec eux des liens de confiance en usant de patience et en laissantagir le temps. D’être à l’écoute en essayant de comprendre leur pensée, leursmoeurs et leurs coutumes, et par là même de faire naître un échange et des’enrichir mutuellement. Cet art a fait la gloire de la France, dont la langue,dans la rigueur de sa logique et sa subtilité de syntaxe, en été le meilleurdes instruments pendant des siècles. La corruption du langage de ladésinformation en fausse les prémices. Albert Camus l’a dit Mal nommer leschoses c’est ajouter au malheur du monde. Etdans le roman visionnaire de George Orwell, 1984, la réduction du langage étaitconsidérée comme une fin en soi. La Newspeak,cette dénaturation systématique dulangage, ainsi que le trucage de l’histoire et la surveillance constante descitoyens par une autorité suprême toute-puissante dans un état policier, BigBrother, constituait l’un des moyend’entraver la liberté individuelle en déniant au peuple l’accès à la véritéainsi qu’à la mémoire collective.

Et voici que l’exemple vient d’Outre Méditerranée, où lesmoyens de communication modernes dont se servent les gouvernements répressifspour leur propagande et leur lavage de cerveau, sont mis au service de larébellion de ces peuples arabes que personne ne voulait entendre, ou jugeaitcapable de prendre ses responsabilités et s’auto gouverner. Ils se sont dressésd’eux-mêmes, d’une révolte née de l’indignation devant l’injustice etl’oppression, et ont fait advenir ce miracle de démocratie : unerévolution pacifique. Quelle leçon ils donnent à l’Occident imbu de lui-même,qui cherche à imposer la démocratie par la force des armes en Irak et enAfghanistan, avec les résultats désastreux que l’on connaît, dénoncés dans lalettre des diplomates britanniques à Tony Blair. Les Irakis, peuple d’ancienneculture et de civilisation raffinée, maintenant irrémédiablement détruites,auraient trouvé en eux-mêmes, en temps voulu, la force, le courage et lamanière de déposséder Saddam Hussein de son pouvoir tyrannique. Les Tunisiens,les Égyptiens, et maintenant les Lybiens, l’ont démontré.

Que cessent alors l’hypocrisie et la désinformation desgouvernements des Bush, Blair et Sarkozy qui ne voient dans ces pays, riches deressources humaines autant que naturelles, que des terrains d’exploitationpotentielle de pétrole ou autres gisements, et de succulents contrats. Et queles éminences grises du président français cessent de proclamer leurs théoriesfumeuses et leurs idées suspectes sur l’existence de l’Union pour laMéditerranée, qui devrait être d’abord un rassemblement autour de valeurs et deprincipes communs dans la préservation culturelle et écologique de cette Marenostrum, tout autant que d’intérêtscommerciaux, socio et géopolitiques. La corruption, qui fleurit maintenant aucœur même du présent gouvernement français sur un terreau rendu fertile par lepouvoir anti-démocratique et anti-constitutionnel de la désinformation, estnauséabonde. La Ministre des Affaires Étrangères, Mme Alliot-Marie, se rend enTunisie en pleine révolution afin de faciliter l’investissement immobilier deses parents à Gammarth, sur un site classé. Cette réserve de beauté naturellecomprenait un site maritime, et une forêt de pins centenaires irremplaçables.Ils ont été abattus pour faire place à un complexe immobilier de 20 hectares autour d’une marina dans un paysqui compte déjà de nombreux sites de plaisance. Tout cela dans le but non defaire croître l’économie du pays de manière équitable respectueuse de sonpeuple et de l’environnement sur cette terre antique. Mais afin de satisfairela jouissance dispendieuse et la cupidité de la société de consommation, plusparticulièrement il semble, de la gent politique française, et de servir lesfins du dictateur tunisien Ben Ali, l’un des piliers avec Moubarak, à ce jourl’homme le plus riche au monde, de l’Union pour la Méditerranée, tous deuxnommés par Nicolas Sarkozy, le Président du pays des Droits de l’Homme.

MONIQUE RICCARDI-CUBITT

www.arcadiamundi.eu

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