A la mémoire de mon daron qui m'obligeait à écouter Radioscopie,de Jacques Chancel
Fin 2013, nous fûmes nombreux, parmi tes auditeurs, à te souhaiter un bon anniversaire. Comme d'autres, j'égrenais des souvenirs n'intéressant peut-être que moi mais, pour les 50 piges de sa radio préférée, on s'autorisa à se lâcher et trinquer à ta santé. Bref, nous sommes des millions de tous horizons à avoir bénéficié de tes ondes. Et ce n'est pas fini. Chaque jour est un nouveau voyage avec toi. Après quasi un demi-siècle de relations, on peut quand même se tutoyer et échanger franchement. Aujourd'hui, permets-moi de te dire: " Chère France Inter, tu me gonfles !".
Pas un jour sans que tu n'évoques l'Islam. Encore ce matin du 4 mars.
. Bien sûr, quelques-uns avec des cerveaux Play Station, se réclamant de l'islam- sans le représenter-, réussissent à coups de kalaches et de sang versé à faire la une des médias. Donc, très légitime et important que, comme toute la presse, tu t'en empares sur tes ondes. Pour tenter, entre autre actions, d'essayer de remettre la laïcité sur le métier du vivre ensemble républicain. Sans elle, certains religieux carnivores, une croisade toujours sur le feu, boufferaient notre espace vital d'athée ou d'agnostique. Tout à fait normal que tes auditeurs, anxiété sans doute accentués depuis les tueries du mois de janvier, s'inquiètent et s'interrogent à juste titre sur ce sujet. Un sujet " auberge espagnole " où chacun apporte sa version, plus ou moins pertinente. Bien entendu, ton rôle,en tant que radio de service public, est de nous informer de ces questions d'actualité. Et permettre ainsi le débat.
Sauf que, depuis quelque temps, on a l'impression que l'islam est devenu le "marronnier quotidien " de France Inter. Pas que tes ondes dans ce cas là. Tous les médias en sont actuellement très friands. A une époque, on pouvait compter sur la cavale et mort d'un Mesrine, les embouteillages des vacanciers, la vache folle, la mort d'une star, une naissance princière, la coupe du monde de foot, etc, pour faire de l'audience (ancêtre du buzz). Et offrir un grand plaisir commercial à ses annonceurs. Aujourd'hui, la religion musulmane semble avoir volé la vedette à tout le reste de l'actualité.
Cela dit, M'sieur Islam n'est pas toute seul à alimenter la machinerie des médias. De plus en plus souvent, il sort bras dessus, bras dessous, avec M'dame laïcité. Inséparables. Le duo de l'année très prisé. Traqué encore plus que les vedettes de téléréalité ou cinoche. Sont-ils encore amoureux ? Doivent-ils se séparer ? Resteront-ils ensemble ?
Apparemment les têtes couronnées, le salaire des footeux, le bébé de Carla, les folles nuits de Julie à l'Elysée etc, ne font plus le poids médiatique face à ce "nouveau couple" infernal. Les querelles conjugales de Laïc et Islam étalées à longueurs de journée sur la place publique. Leur moindre accrochage disséqué par des spécialistes es spécialités. Chacun, du 7/9 de France Inter au bar du coin en passant par le Ter ou métro, chacun y va de ses pronostics. Vont-ils clasher ?
Tant qu'ils seront traqués, épiés, ils vivront en cavale. Sans répit. Comment voulez-vous que, dans toute cette pression environnante, ce duo puisse établir une relation. Apprendre à se connaître et vivre ensemble. Avec des hauts et des bas comme n’importe quel binôme. Laissons-les s’aimer comme dit la chanson. Ou se chamailler. Se séparer, se rabibocher…Une seule solution pour ça : cessons de les mater par le trou de la serrure.
Chère France Inter, sans vouloir te commander, pourrais-tu nous donc nous lâcher l’oreille avec ces deux-là. Il ne s'agit pas de cesser d'en parler sur tes ondes. Juste peut-être espacer d'espacer un peu plus les moments où tu nous relates leurs mésaventures. Ne les évoquer qu'en cas d'information nécessaire pour tes auditeurs. Même si tu meurs d’envie de les mettre en avant, retiens-toi le plus possible. La Laicité et l'Islam sont assez grands pour se débrouiller seuls; pas besoin d'être surveillés, mis sous pression, par toi et les autres médias. Les laisser souffler un minimum hors micros et caméras. Pas de nouvelles, bonne nouvelles.
Et si, moi aussi, je leur foutais la paix ?
En vieil argot de la fin du XIXe siècle, "gonfler" signifiait "assommer".