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Billet de blog 4 décembre 2024

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Cette année lasse

Cette année-là, un gouvernement chuta. Mais la chanson sur 1962 ne le mentionne pas. 62 années après : chute d’un autre gouvernement. Nous sommes des dizaines de millions à y avoir assistée. Quasiment en direct. La réalité ou un spectacle ? Chaque fois, l’impression qu’une voix va gueuler : Coupez, on la refait. Comme dans un tournage de film. Pourquoi cette impression?

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M. Pokora - Cette année là (Clip officiel) © PokoraVEVO


                      Cette année-là, un gouvernement chuta en France. Pendant qu’un Premier ministre tombait en France, la sonde Spoutnik 22  tentait de se rapprocher de la planète Mars.  Et le monde continuait de tourner. Mais la chanson sur 1962 ne  mentionne pas l'événement politique. 62 années après , nous assistons à la chute d’un autre gouvernement. Une chanson l’évoquera-t-elle ? On verra bien. En attendant, nous sommes des dizaines de millions à avoir assistés à la chute. Quasiment en direct. La réalité ou un spectacle ? Chaque fois, l’impression qu’une voix va gueuler : Coupez, on la refait. Comme dans un tournage de film. Pourquoi cette impression ? 

            Peut-être parce que nous vivons dans une société d’images. Avec une mise en scène permanente. Avec nos selfies, etc. Nos politiques n’échappent pas à ce phénomène. Rien de plus naturel. Tout le personnel politique vit dans la même époque tout le monde. Tous embarqués sur le même navire. Avec de plus en plus l’impression qu’il n’y a personne à la barre. Tout l’équipage, du bas de l’échelle au capitaine, semble absent. Sans doute occupés à selfiser. Et d'autres courses à l’image. Comme tous les passagers et passagères du navire. Tous et toutes englués dans nos psychés numériques ?

          Le seul à ressentir cette impression ? Je ne crois pas. Suffit d’ouvrir les yeux et de tendre l’oreille. Beaucoup ne voient désormais que la République que comme un spectacle. Avec une mise en scène. Des actrices et acteurs, connus et moins connus, viennent improviser leur spectacle face caméra. Certaines et certains sont meilleurs comédiens que d’autres. De temps en temps, un casting est ouvert. Des têtes sont affichées partout sur le territoire. Et chaque citoyen et citoyenne sommés de choisir les nouveaux acteurs. Comme une sorte de « Starac »  de la République ?

            Caricature ? Mauvaise foi ? C’est possible. Mais mon impression est sincère. Depuis que la com a tout envahi, j’ai le sentiment que la forme est plus important que le fonds. Guère un hasard si les Sciences Po et autres communicants peuvent passer d’un bord à l’autre. Leur boulot est surtout de valoriser une image. Mais sûrement que pour la majorité d’entre eux, ils et elles sont raccord avec les idées à mettre sous les spots. Un éclairage en occupant plus l’espace de lumière que les adversaires. Sans doute la même chose depuis bien longtemps. Le terme «  effet de manche » juste remplacé par «  punch line ». Autre temps, autre mode de propagande.

               On n’emploie plus ce terme ? Je viens de me faire tancer à l’oreillette. Une voix m’indique qu’il faut dire communication ou information. Pourtant, l’un des synonymes de propagande est publicité. Dans tous les cas, il faut convaincre. Plus que ses adversaires. Toutes les élections se finalisent par des chiffres. Pas d’autre alternative que gagner ou perdre. Un nouvel enfonçage de porte ouverte ? Sans doute. Mais on en revient au spectacle. L’objectif est que les acteurs et actrices mises en avant soient les plus plébiscités. Pour occuper le haut de l’affiche. Avec de plus en plus de vues. Et de pouces levés.

           Le spectacle n’est pas fini après la chute. Un autre débute. Les acteurs et actrices vont se relayer partout.  Passant de  plateaux télé en studios de radio. La course aux caméras et aux micros. Obtenir aussi une grande visibilité sur les réseaux sociaux. Une foule d’acteurs et actrices vont commenter, commenter, commenter… Toute la nuit. Et demain matin, au radio-réveil, des commentaires de commentaires, etc. Avec en point d’orgue spectacle. La star du spectacle. Elle prendra la parole demain soir. Et ses propos seront commentés, encore commentés… Le spectacle ne s’arrête jamais. 

             C’est sérieux. La voix me tance à nouveau. C’est du sérieux, m’assène-t-elle. Sur un ton très grave, quasiment martial. Avec quasiment les mêmes intonations que pendant le Covid. Elle s’adresse à moi comme si j’étais un gosse. Mais peut-être que la voix tanceuse n’a pas tort. Secouer le grand gosse qui sommeille en moi et ne se rend pas compte que l’heure est grave. Je vais essayer de faire gaffe. Mesurer le sérieux de la situation. Devenir quelqu’un de responsable. Être à la hauteur de l’enjeu en cours. Un citoyen conscient de la gravité de ce qui vient de se dérouler. Un tournant de notre histoire. Un jour à ne pas prendre à la légère.

          Désolé, Chère Voix, je n’y arrive pas. Une irresponsabilité crasse sans doute due à ma personnalité. Irrécupérable. Et trop souvent dans l’humour noir. Avec en plus cette satanée dérision qui me détourne du droit chemin. En effet, pas un citoyen très sérieux. Je vous l’accorde, Chère Voix. Mon attitude est pathétique. Mais je ne pense pas en avoir le monopole. Ni en être l’initiateur. Guère un hasard si je vois tout ça comme un spectacle. Et loin d’être le seul dans ce pays. Qui a commencé le spectacle pathétique de cette « mise en scène républicaine » ? Pas les électeurs et les électrices. Mais prêtes et prêts à être sérieux. Si leurs représentants le sont autant. La balle républicaine est dans tous les camps.Mais pas uniquement chez les élus. Dans le camp aussi de la majorité de la population de ce pays. Avec peut-être une première proposition.

     De la politique ; moins de spectacle ? 

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