Les «sans-dents» dit par François Hollande ou affabulation? Mépris de classe ou humour noir? Seuls son miroir et celui de son ex le savent vraiment. En tout cas, cette expression nous a juste rappelé que certains croquent à belles dents dans la vie. Comme le couple présidentiel se déchirant devant des millions de gens. Déchirure sous-entendant la belle intensité d'une passion amoureuse. Une existence bien remplie sur de nombreux points. Comme d'autres politiques et people. Tandis que nombre de leurs concitoyens, suivant leurs aventures, n’ont rien ou pas grand-chose à se mettre sous la dent. Plus de galères que de plaisirs. Les maux et les images sur papier glacé pour les uns. Pour les autres, les mirages de la démocratie et les maux quotidiens. Rien de nouveau sous le soleil de l'hexagone.
Que veulent les pauvres avec ou sans dents ? Pas de grands rêves. Rarement du genre à "péter" plus haut que leur coeur. Simplement pouvoir - s'ils le désirent- jouir des mêmes choses que les riches. Un boulot intéressant, de bonnes écoles pour leurs gosses, de belles histoires d’amour, des vacances sympas, des grands apparts… La liste est longue des petits détails qui illuminent un quotidien. Des désirs au fond assez simple à comprendre. Nul besoin de noyer son discours avec des éléments de langage appris dans les grandes écoles. Suffit d’un peu d’empathie. Juste ouvrir les oreilles et les yeux. Lâcher un peu la main de ses conseillers en com. Regarder sans filtre officiel.
Il n’y pas de honte à préférer le bonheur. Cette phrase de Camus n’est pas uniquement dédiée aux gens de condition modeste comme lui. Une belle citation transclasses sociales. Elle peut toucher autant un habitant d’un duplex du 6 ème arrondissement de Paris qu’une famille dans un 40 mètres carrés à Bobigny. Qui préfère le malheur ? Peu de gens. Le désir de bonheur : point commun à tous les étages de la société. Et sur toute la planète. Une monnaie universelle.
A part que certains ont beaucoup plus accès à cette monnaie, d’autres peu ou pas du tout. A cause de quoi ? Crise, péréquation, se serrer la ceinture, principe de réalité, inflation, agence de notation… Chaque fois, nos politiques nous assènent ce constat. Vrai ou pas. Crise économique ou financière ? Ni l’une, ni l’autre ? Enfumage pour anesthésier les foules de sans dents ? Nul en économie ( une science molle devenu la Pravda ? ), je ne peux répondre. Mais, comme beaucoup de citoyens, je constate chaque jour que ceux qui nous demandent de nous serrer la ceinture, attendre les beaux jours, l'embellie économique, vivent intensément le présent. Aucun ne crache sur les petits plaisirs qu’offre l’existence. Et ils ont bien raison. « Nous aussi,nous aimons la vie quand nous en avons les moyens. ». Toutes proportions gardées, la phrase de ce grand poète est valable aussi pour des millions de femmes, d’hommes, de gosses. Aimer la vie sans les moyens est-ce possible. Sans doute. Moins compliqué avec les moyens tout de même. Pas que des petits plaisirs à 40 000 € au compteur de taxis.Vivons-nous encore dans le même pays que nos dirigeants ?
Encore une porte ouverte enfoncée. Tout a déjà été dit sur les pauvres. Cette année, ils ont même tous monté les marches de Cannes avec Vincent Lindon. Un acteur très bon et qui me semble d’une grande sincérité. N’ayant pas vu la « Loi du Marché », je ne peux donc donner un quelconque avis dessus. Bon ou mauvais ? A chacun de se faire son opinion. Sans confondre la montée des marches avec un ascenseur social. Bien sûr, il est très important que la fiction s’empare de la misère et des difficultés des êtres en France ou ailleurs. Quelle tristesse de ne subir que les histoires de nombrils localisés dans quelques arrondissements huppés de Paris. Quoi que les bonnes oeuvres intimistes ont une portée universelle.
De Zola à Albert Camus, en passant par Annie Ernaux et Robert Mc William Wilson ( pas doué en ciné, je me suis cantonné à la littérature), nombres d’artistes nous transmettent la douleur et l’existence des plus démunis. Avec talent, ils nous tendent le miroir des fracassés de la société. Toutefois, la fiction ne résout rien. Pas un bouquin, même le plus fort, capable de remplir un caddie de supermarché. Certains artistes sont à leur manière des lanceurs d'alertes. Pas à eux de faire le reste du boulot.
Un énième billet de blog pour dénoncer encore et encore. La critique est toujours facile. Proposer reste beaucoup plus complexe. Mais peut-on constater, sans être immédiatement taxé de poujadiste ou idiot utile du FN, que nombre de nos dirigeants ne s’interdisent pas le bonheur. Ils jouissent ici et maintenant. Qui pourrait d'ailleurs le leur reprocher? Au fond, nous courons tous après ce que Gainsbourg fuyait de peur de le perdre. Faut-il encore le détenir pour avoir peur de le perdre. Avec ou sans dents, chacun a envie de croquer dans les fruits de l’égalité, la liberté et la fraternité. Profiter aussi des bonnes choses de la démocratie. Et rire de tout.