Récemment, Christine Lagarde, patronne du FMI, demandait aux négociateurs grecs de se comporter en adultes. Refusant d'évoquer la dette avec ces grands ados immatures. Le mépris affiché d’une femme se débrouillant pour ne pas régler légalement ses «dettes» à la société. Souvent les gens de pouvoir arbore cette espèce de paternalisme. Notamment les financiers et économistes péremptoires. A coups de chiffres (souvent différents d’un spécialiste à l’autre) que vous ne pouvez comprendre, encore moins vérifier, ils vous expliqueront qu’eux sont du côté de la raison. Aucune voie possible en dehors de la leur. La raison économique les a mandatés pour nous manager. Même les plus sympathiques d’entre eux vous regarderont toujours comme un enfant. Un gosse rêveur et tellement hors des réalités.
Pour eux, la Grèce est un sale gosse qui n’a rien compris. A rééduquer. Ce «non» me semble être plus celui d’une rupture de couple. Une rupture vitale pour la Grèce qui l’a déclenchée. Besoin de respirer, sortir au moins un peu la tête de la boue. Pas du tout goût des grands donneurs de leçons, les jesaistout, qui la jugent irresponsable. Pourquoi quitter ainsi le foyer conjugal ? Ca ne se fait pas. Battue et humiliée mais elle doit rester à la maison. Ne pas ruer dans les brancards. Soumise à celui qui l’étrangle. Marcher tête basse. Et juste espérer des temps meilleurs.
L’humiliée a relevé la tête. Et, le regard droit, elle ose remettre en cause le patriarcat économique. Des années que des gens, de gauche et de droite, nous tannent avec la crise et la dette. Même Michel Rocard, pas un dangereux gauchiste, explique que c'est du flan pour augmenter encore plus les trésoreries des banques. A force d'entendre parler de dette et de crise, chacun se sent créancier. Redevable et penaud. Un créancier dont on ne voit jamais le visage. Mais présent partout comme Dieu. La culpabilité religieuse remplacée par celle de la dette ? Pendant ce temps, les affaires continuent. Et,ô miracle,l’argent se multiplie. Multiplication toujours dans les mêmes poches.
Sûr que ma prose à chaud ferait sourire Christine Lagarde ou d’autres adultes - formés par nos grandes écoles. Un billet naïf. Eux balanceraient des chiffres et des graphiques sur power-point puis, front plissé de celui qui à la charge du savoir et des rênes de l’économie, nous détailleraient leurs données jusqu'à la fermeture de notre dernier neurone. Des données interprétables mais qu'ils qualifieront d'incontournables. Pas une science exacte comme lesmaths ou la physique. Comme disait Coluche, quand un énarque te répond à une question que tu lui as posée, tu ne sais plus quelle était ta question. L’enfumage est un sport très pratiqué dans les grandes écoles du pouvoir. Elles forment nombre de docteur es brouillard.
Ca y est, je vire poujadiste. Facile de mettre tout le monde dans le même sac. Un billet péremptoire? C’est vrai qu’ils ne sont pas tous malhonnêtes intellectuellement. Mais les autres parmi eux, différents, se font moins entendre. Cela dit, j’ai du mal à croire en l’économie. Chaque fois, mon détecteur anti-bonimenteurs se met en marche. Sans doute mon athéisme qui m'empêche deme prosterner devant cette religion. Ses prêcheurs ne portent pas de calotte, ni kippa ou de chéchia. Les hommes, transmettant cette religion au bon peuple profane, sont vêtus de costume bien coupés, le visage souvent auréolé d’une barbe taillé au millimètre près, les chaussures pointues. Tandis que les femmes portent des robes de luxe ou des vestes et pantalon a rayures grises, des talons hauts, etc. Arrête avec tes caricatures ! Bien sûr que que je caricature mais ces images correspondent peu ou prou à l’image des « adultes de nos démocraties » qui viennent nous apporter la bonne parole économique à la télé. Souvent, les journalistes les interrogeant sont issus du même sérail, le même look. Et nous, tels de grands gosses, buvons leurs paroles sans sourciller. L’adulte, oeil sérieux, un dossier à la main ou devant lui sur un plateau télé, a toujours raison. Chacune de ses phrases ciselée et égrénée religieusement. La parole venue d'en haut. Pas un hasard s’il est invité. Leur r€ligion plus puissante que celle du Livre ?
Où va mener cette fronde grecque ? Je ne s’en sais rien. Et aucun chiffre à proposer. Pas crédible, ni adulte, chère Christine Lagarde. En tout cas, quoi qu’il avienne,; un grand merci au peuple grec d’avoir mis un coup de pied dans la suffisance de ces autoproclamés adultes. Malgré leurs difficultés au quotidien, les grecs ont su résister. Faire descendre ces donneurs de leçons élevés au grain bancaire de leur pied de stal économique. Ne pas céder à la pression de tous ces économistes, financiers, politiques qui ont la science infuse. Une science qui infuse le plus souvent dans des coffres numérotés.
Peut-être que je ne suis pas assez adulte pour m'occuper d'histoire de grandes personnes. Faudrait laisser parler les grands de ce monde entre eux. Ils ont les outils. Alors que nous, idiot économique du village planétaire, nous sommes incultes. Notre champ de vision trop limité pour avoir voix au chapitre. Contrairement à celui des politiques, financiers, banquiers, etc, qui voient à très long terme. Des visionnaires dépassant notre maigre horizon. Pas dans le même temps que les simples citoyens. Ni dans le même monde.
Nikos Kavvadias, dans son chef d’œuvre « Le Quart », évoquait « L’Europe au cul défoncée ». Des échanges de marins sur la vie, les femmes, la misère, les joies… Propos sans filtre sous des nuits avec ou sans étoiles. Eux aussi réduits à l’esclavage sur toutes les mers du monde. Soumis aux puissants de leur époque. Que reste-t-il à ceux qui n’ont plus rien ?
Leur nom et NON.