Cesser de parler politique à table ? Pourquoi s’entêter à évoquer ce spectacle médiatique des politiques, si souvent affligeant. Une perte de temps. De plus, le ton peut monter très vite, même entre bons amis. Surtout lors de soirée arrosées où les esprits s’échauffent. On peut devenir très con, insultant, de mauvaise foi pour avoir le dernier mot. Qui ne s’est pas énervé un jour sur ce sujet ? Je ne suis pas le dernier à tomber dans ce genre d’excès. Certains se sont même brouillés après des débats politiques entre la poire et le fromage. Des familles déchirées à cause de votes aux antipodes. Pourtant il y a nombre de choses nettement plus intéressantes et sexy que ce spectacle affligeant. Pas pire ennemis de la politique que ses acteurs ?
Une journée sans que les actes et propos des politiques soient relayés par la presse. Cette initiative de David Dufresne me semble pertinente. Elle peut secouer nos habitudes. Rien qu’une fois par semaine ne pas donner la parole aux politiques professionnels. Une journée sans éléments de langage, baratins, course à l’égo, etc, ça nous ferait des vacances. Une idée poujadiste ? Bien sûr que tous les politiques ne sont pas pourris. La plupart même, du maire de village au député abattant un gros boulot pour sa circonscription, sont honnêtes et sincères. Mais pas toujours ceux qui ont les honneurs de la presse. Surtout en ce moment de pré-présidentielles où un grand nombre d’entre eux nous imposent leur show en boucle. Un show souvent pathétique et très égocentré.
Ne pas relayer ces bateleurs est loin d’être un acte antipolitique. Au contraire, c’est offrir la parole à d’autres politiques. Les moins connus, les plus efficaces pour changer le monde au quotidien. Pas besoin de dépenser des sommes colossales pour dîner avec eux. Il suffit de les arrêter dans un marché ou une rue pour s’entretenir avec eux. Petites mains de la démocratie qui font de la politique tous les jours. L’honneur de la démocratie c’est eux. Pas les coureurs de selfie pour le JT ou ceux qui bénéficient des passe droit de la République. La plupart ne bénéficiant pas, comme nos anciens présidents de la République et autres ministres, d’un argent de poche – en plus de ce qu’ils perçoivent- et d’autres privilèges réglés par les contribuables. Qui est le plus assisté entre un ancien chef d’Etat recevant des millions d’Euros par an et un bénéficiaire du RSA ?
Cet espace médiatique, libéré une fois par semaine, pourrait être consacrée à d’autres citoyennes et citoyens de ce pays. Ceux qui ne fréquentent par la presse people ou les dîners du siècle. Les « sans éléments de langage», coiffeur, maquilleuse, chauffeur, conseillers en com… La majorité de ce pays. Évoquer par exemple la vie culturelle, hors des grosses vitrines habituelles. Cette culture qui, sans négliger les autres outils, est une véritable arme de combat contre tous les obscurantismes. Comme par exemple évoquer le travail de l’espace Pandora, agitateur poétique depuis une trentaine d’années au pied des tours des Minguettes; la poésie pour niveler par le haut. L’activité de cette association et d’autres en France me semble plus intéressante que la dernière formule à buzzer de tel ou tel politique. Pas que la culture pouvant bénéficier de ces heures ainsi libérées. Toutes les initiatives citoyennes occultées par la comédie de la course au pouvoir.
Un pays où nombre d’actions, jour après jour, permettent de construire le présent. Des actes concrets loin des micros et des caméras. Pas des vrais gens comme d’aucuns les surnomment. Encore une formule cache réalité. Qui a déjà rencontré des fausses gens ? Ce sont juste des citoyennes et des citoyens avec leurs qualités et leurs défauts. Œuvrer dans l’ombre ne garantit pas l’intégrité. En tout cas, ils ne viennent pas nous regarder tous les jours, les yeux dans les yeux au JT ou en couverture de Paris Match ou l’Obs, pour nous dire qu’ils ont changé. Eux n'ont pas le temps de prendre la pause photo avec tout le boulot en cours. Chaque jour est un chantier concret. Changent-ils plus le monde que les actrices et acteurs récurrents de la politique sous les feux des projecteurs ? Sans aucun doute. La course aux médias de certains politiques est devenu un travail à plein temps. Juste là pour assurer le service commercial de leur entreprise. Contrairement à toutes ces femmes et hommes - sans livre à vendre ou fonction à briguer- offrant encore ses lettres de noblesse au politique. Merci à eux !
Et une journée sans médias ?