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Billet de blog 23 février 2025

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Vends salut nazi bon état

N'ayant servi qu' en 1942, à Auschwitz.Tout à fait capable de reprendre du service. Suffit d’avoir un bras. Et un cerveau ? Fortement déconseillé. Et un cœur? Déconseillé. Faut simplement un bras droit valide. C'est tout ? Non.Indispensable d'être antisémite, raciste, homophobe, et d’autres qualités de ce genre. Un salut utilisable dès réception. L' envoi par Amazon. Et frais de port gratuit.

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"Si l'écho de leurs voix faiblit, nous périrons"

Paul Eluard 

            N'ayant servi qu'en 1942, à Auschwitz. Tout à fait capable de reprendre du service. Suffit d’avoir un bras. Et un cerveau ? Fortement déconseillé. Et un cœur ? Déconseillé aussi. Faut simplement un bras droit valide. Que ça pour s'en servir ? Non. Indispensable d'être antisémite, raciste, homophobe, misogyne, et d’autres qualités de ce genre. Un diplôme est requis. Lequel ? Un doctorat es haines. Ce salut a perdu un peu de sa valeur. À cause d’une campagne de dénigrement. Depuis quelque temps, il est à nouveau d’usage commun. Dédiabolisé. Disponible très facilement. Un produit de consommation courante. Et banal. Ce salut est utilisable dès réception. Un envoi par Amazon.  Et frais de port gratuit.

      Même l’humour noir a les bras qui lui en tombent. Ici et là, des saluts nazis. Mais pas qu’à ras de trottoir. Des saluts nazis qui ne sont pas issus des sans cerveaux paradant dans les rues. Même si ces gros bras, petit neurone, peuvent être dangereux. Une ou deux fois dans la nuit, j’ai croisé ces grands poètes. Nous n’avons pas pu parler de poésie française. Pourquoi ? Ils n’en lisent pas. Contrairement à certains de ceux jouant avec ces marionnettes qui obéissent au doigt et à la haine. Nulle inquiétude en croisant leurs marionnettistes. En général, des êtres soucieux des codes sociaux. Parfois même issus de grandes écoles. Que se passe-t-il sous leur vernis ?

       Incapable de retenir leur bras. Pourtant, ils savent bien que c’est un geste mal vu. Voire même susceptible de poursuites judiciaires. Malgré tout ce qu’ils savent, ils sont incapable de se retenir. Cela dit, les temps ont changé. Même les dits modérés commencent à basculer dans leur camp. Sans toutefois lever le bras. Si ce n’est sous leur crâne. Submergés;  ils pensent l’être. Finie la douce France de Charles Trenet. Trop de Noirs, trop d’Arabes, les musulmans au four juste avant les Juifs, les homos, les trans, etc. Tout fout le camp. Plus de respect dans ce pays. Faudrait mettre un peu d’ordre. Prêts au salut nazi ? Quand même pas. Mais, à bien y réfléchir;  finalement pas pire que le reste. Peut-être que le salut du pays et du monde passe par ce salut. Ce bras levé pousse-t-il dans de plus en plus de crânes ?

       Pas de quoi en faire un billet. C'est qu'un p’tit geste de rien du tout. Après tout, y a pas mort d’homme. Sauf nous, répondent des millions de cadavres. Des femmes, des enfants, des hommes, tués dans des camps de la mort ou ailleurs. Massacre de masse ponctué par des saluts nazis. Un geste qui a une histoire. Visiblement, ça n’empêche pas certains de faire un salut chargé de crime contre l’humanité. Que suis-je bête d’avoir employé ce terme. L’humanité, c’est dépassé. Comme les lumières. On s’en fout de tout ça. Y a l’intelligence artificielle, les algorithmes, etc. Pas se faire chier avec ces trucs ringards d'humanité et lumières. On est à l'ère de la conquête des étoiles. Qui veut son p’tit salut nazi pas cher ? Livré à domicile.

       Notre salut dans l'humour noir ? Parfois, ça peut aider de rire pour ne pas déranger les larmes. Mais l'humour ne change rien à la réalité. Que faire alors ? Résister. Déjà à l'intérieur de soi. Une grande gageure. Mais déjà un grand pas. Avant de résister en groupe. De quelle façon ? Pas une seule manière. Sans nécessairement invoquer « No Pasaran » ou le « même pas peur ». Pas de honte à être mort de trouille face au retour du pire : le fascisme nationaliste et ses clones religieux. Néanmoins, chacun et chacune libres de réagir comme il et elle veut et peut. Un élément est essentiel dans ce combat. Lequel ?

       Occuper l'espace. Avec ou sans bruit. Ne surtout pas laisser tout l'espace à ces bras levés vers le néant. Occuper le terrain à son petit et grand niveau. Qu'on soit invisible ou visible. Œuvrer avec ses outils, quels qu'ils soient. Travailler pour récupérer une à une les parcelles de lumières perdues. Ils lèvent le bras pour saluer l'obscurité. Et nous haut les cœurs et cerveaux pour accueillir l'aube. Avec dans tous nos gestes, le désir et la volonté de rester debout. Avec nos semblables. Toutes ces solitudes reliées : l'humanité.

        Résister. Plus facile à dire et écrire qu'à faire. Un chantier ouvert qui sera complexe. Surtout face à une machine à obscurcir d'une telle envergure.  Sans doute la première fois que l'humain assiste à une tel mise au pas planétaire des cerveaux. Une mécanique dans laquelle nous sommes aussi pris. Un fil à la patte avec tous nos objets connectés : la servitude volontaire de nos bracelets numériques ? Lutter contre soi et la machine. Une tâche qui ne sera pas simple. Un chantier séparément et ensemble. Et nos divergences ? Pas d'inquiétude : on reprendra le fil de nos conflits et mesquineries de mortels imparfaits. Après l'urgence en cours.

      Gagner le bras de fer contre l'obscurité (s).

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