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Billet de blog 23 mai 2025

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Le temps dans sa main

Nue, même habillée.Sous son regard.Personne à des km.Elle est seule.Sous le toit du ciel.Ses racines dans le sable.Signature éphémère. Effacée chaque jour. Par le vent. L'homme passe et repasse.Sur son histoire.Elle est enfermée.Entre les murs de ses yeux. Son gibier de 12 ans.

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Illustration 1
© Roman Opalka


Pour les Indiennes d'hier et d'aujourd'hui

Nue, même habillée

Sous son regard

Personne sur des km

Elle est seule

Sous le toit du ciel

Ses racines dans le sable

Signature éphémère

Effacée chaque jour

Par le vent

L’homme passe et repasse

Sur son histoire

Elle est enfermée

Entre les murs de ses yeux

Son gibier de 12 ans

Viendra-t-il ?

Chaque jour, la même question

La réponse c’est lui

Arrivant quand il veut

À tout moment

Partant quand il le décide

Parfois, elle s’éloigne

Pour sortir de la prison

Partir en cavale

Son regard la suit

Elle accélère le pas

L’homme est toujours là

Elle court

Il ne la lâche pas

Se planquer ?

S’enterrer vivante ?

Ne plus voir le jour et la nuit?

Faire le deuil de l’aube ?

Le ciel est aussi à moi, se dit-elle

Se promettant de ne pas lui laisser

Ni aux autres

Notre terre a été arrachée

À nos chairs

Mais le ciel c’est moi

Tu es nous aussi

Elle les entend souvent

Le chant des étoiles

Berceuse de milliards de mères

L’homme tourne autour d’elle

Sûr de ne jamais perdre

Sa trace

Elle est à bout de souffle

Lui jamais

Elle se rassoit

Assise sur une tombe

Longue

Sans fin

La tombe de son pays

La pluie qui tombe ?

Non

Son crachat

Leur crachat

Sur une fosse commune

Sa nouvelle adresse

Le lui cacher ?

Inutile

Il ne l'atteindra jamais

Trop loin

De ce qu’il peut voir

À des années-lumière

Du regard des hommes

Comme lui

Des hommes qui voient uniquement

Avec leurs yeux

Dans des paupières arides

Des hommes qui ne pourront le détruire

Son nouveau pays

Sous sa poitrine

Elle a tout reconstruit

Sauvant les blessés

Relevé demain

Fait ce que Dieu n’a pas fait

Ni le monde

Elle ne croit plus

En l’un

Ni en l’autre

Tout désormais entre ses mains

Même le temps

Irréductible seconde

La mort, c’est fait

Ne reste plus que la vie

Souffle debout

Elle n’a plus rien à perdre

Ni à gagner

Juste retomber moins

Avancer sur des ruines de chair

Entre des racines de sable

Ses grains de mémoire

Sentir les fantômes à ses côtés

Et le temps dans sa main

L’homme se rapproche

De plus en plus

Jamais aussi près

Elle se lève

Le drone s’immobilise

Au-dessus d’un peuple en poussières

Et d’une bâtisseuse

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