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Billet de blog 27 juillet 2015

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Du string au bikini: Cul-I niveau zéro ?

Vouloir faire le bien des femmes est louable. Toutefois préférable de leur demander l’autorisation. De plus, il n’y pas une femme, mais des femmes. Pas un féminisme, des féminismes. L'habit ne fait pas la féministe. Mais important de se méfier des rétrogrades qui sont à l’affût pour revenir en force. Le vieux monde a de nouveaux supporters et supportrices.

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Illustration 1
© Non crédité

 « Il y a une forme de force, qui n'est ni masculine, ni féminine, qui impressionne, affole, rassure. Une faculté de dire non, d'imposer ses vues, de ne pas se dérober.
Je m'en tape que le héros porte une jupe et des gros nibards ou qu'il bande comme un cerf et fume le cigare.»

Virginie Despentes

        Après la polémique née de la subite «stringophobie féministe » de Lou Doillon, la flambée médiatique du bikini de Reims. Le textile fait décidément couler beaucoup d’encre. Sans oublier le voile, si souvent agité dans les médias. Bref, le corps de la femme est toujours aussi vendeur. Et le choix de ses vêtements devenu un enjeu de société.

Tissu dont certains veulent entièrement la tapisser au nom d’une religion, tandis que d’autres souhaitent la dénuder, le plus possible, pour vendre telle ou telle marque. La femme souvent coincée entre les intégristes de Dieu et les marchands du temple de la pub. Mais paraît qu'elle est l’avenir de l’homme. Pas plutôt le paillasson de certains hommes?

 La place de la femme dans notre société suscite fréquemment des polémiques. Surtout depuis que des culs bénits ont repris du poil de la bête. La femme toujours cinquième roue du carrosse de toutes les religions. Ne m’en déplaise, les obscurantistes sont aussi libres de leurs opinions. Même si elles sont scandaleuses. Mais, profitant de cette liberté d’expression, nombre d’entre eux glissent de la polémique démocratique à l’injonction et, peu à peu, tentent d’imposer leur ordre moral. Prêts à  vouloir s’immiscer dans la manière de penser de chaque femme, ses rêves, ses ambitions, sa sexualité, sa manière de se vêtir,… La liste est longue des conseils, suggestions, ordres ; une façon de vivre qu’ils veulent imposer aux femmes. Insidieusement ou avec de gros sabots.

Pas uniquement des machos, des sexistes, des intégristes de toutes religions, facilement repérables, qui  veulent plus ou moins asservir et enfermer les femmes. Certaines féministes, parfois pires ambassadrices du combat féministe si nécessaire en cette période de retour des obscurantismes, cherchent aussi à imposer leur dogme. Etre une vraie féministe, c’est ça. Non, c’est pas comme ça. Mon féminisme à moi est meilleur que le tien. Prouve que tu es une bonne féministe ! Des querelles souvent vives.

De Causette à Causeur, la guerre des féminismes fait rage. Ma préférence allant plutôt  à la « Causette du peuple féminin » qu’à la « Causerie des Lilas » proche du féminisme zemmourien. Un débat de société sérieux qui dépasse le cadre de ces deux hebdos. Débattre n'empêche pas le droit de blasphémer le féminisme. Continuer de rire de tout.

Vouloir faire le bien des femmes est louable. Toutefois préférable auparavant de leur demander l’autorisation. De plus, il n’y pas une femme, mais des femmes. Pas un féminisme, des féminismes. L'habit ne fait pas la féministe. Quoi qu’il en soit ;pendant ces querelles de chapelles, les rétrogrades sont à l’affût pour revenir en force. Sans la moindre hésitation, ils chercheront à remettre en cause les acquis des luttes des femmes. Le vieux monde a de nouveaux supporters et supportrices.

Pourquoi la femme ne bénéficierait-elle pas, comme n’importe quel individu de sexe masculin, du droit à l’indifférence ? Marcher dans la rue ou bronzer dans un square sans avoir à rendre des comptes sur sa tenue. Ne pas être obligée de subir des mains baladeuses dans les transports ou d’autres harcèlements au moindre de ses déplacements. Etre tout simplement une citoyenne, avec des droits et des devoirs, au même titre que n’importe quel autre citoyen. Pas plus, ni moins. Une citoyenne certes promise à un bel avenir – admirablement écrit par un poète. Et si cet avenir commençait déjà par un présent ?

Toutes ses problématiques vestimentaires seraient-elles  liées plus ou moins directement au cul? Du string montré du doigt par Lou Doillon au bikini qui a déclenché une poussée de violence dans un square de Reims. Cacher ou montrer des parties du corps de la femme pouvant générer du désir? Certains religieux, plus radicaux, ne veulent dévoiler que les yeux des femmes, en plus dirigés vers le sol. Pourquoi  cette volonté de calfeutrer le corps féminin ? Pour qu’elle n’excite pas sexuellement un homme ; excepté son époux. Les intégristes religieux et la chanteuse même combat ? La question peut se poser. Elle et eux voulant décider de ce qui est bon ou pas, notamment une tenue correcte, aux autres femmes. Question trop complexe pour y répondre dans un billet d’humeur. Pas un article de fond.

Imaginons un instant que le désir sexuel et le sexe aient disparu de la planète. Thanatos sans  éros. Nos sexes uniquement pour uriner et procréer. Plus du tout des objets de jouissance. Quelle tristesse ! Dans ce monde sans sexe -fort heureusement une fiction-,  ces tissus voilant ou dévoilant créeraient-ils autant de polémiques ? Sûrement pas. Plus besoin de voiler les femmes puisque, sans désir, elles ne peuvent  provoquer le désir chez des hommes qui, eux même, en sont dépourvus. Les gamines de Reims n’auraient même pas «calculé» le  maillot de bains d'une autre gamine - quasiment du même âge-se bronzant. Et le string de Beyoncé ou d’une autre considérée par Lou Doillon comme un simple costume de scène. Bien sûr, ces  «guerres de tissus » ne sont pas liées uniquement à la sexualité. La domination patriarcale est aussi un des éléments important. La dictature du corps de pub parfait peut engendrer des dégâts (l’insulte «physique de déménageur » lors de l’agression du bikini?). La course effrénée à une plastique parfaite, avec la frustration qu’elle génère, quand le rêve ne réussit pas à coller à la réalité. Eros pas seul responsable.

En tout cas, on a  envie de se débarrasser du filtre de la courtoisie et balancer : chacune et chacun devrait s’occuper de son cul ! Formule adressée autant aux  journalistes (les plus malins, critiquant le manque de scrupules de leurs confrères, en profitent pour s’accrocher à la queue de comète du buzz) relayant ces infos qu’aux blogueurs de mon genre qui les commentent. Sans oublier les politiques, les hooligans de toutes les religions, qui se jettent sur tout ce qui est susceptible d’alimenter leur commerce haineux. Si le sexisme, le racisme, l’antisémitisme, l’homophobie, le sexisme, et toute la connerie ambiante, gonflent artificiellement sur le plan médiatique, nous n’y sommes pas étrangers. Pourquoi rajouter une couche de surmédiatisation à des problèmes bien réels ?

Comme  quand nous offrons un large écho aux propos - ni plus, ni moins intéressant qu’une conversation de comptoir-de Lou Doillon ou à l’affaire du bikini qui serait un fait divers (apparemment sans lien avec la religion musulmane). Deux infos qui ne méritaient pas un tel éclairage. Avec les journalistes, nous avons contribué à cet emballement. Tourner sept fois sa souris dans sa main avant de cliquer. Cesser d'être asservi au buzz.

 Si elle le décide li-bre-ment, pourquoi une  femme ne se vêtirait pas comme bon lui semble? Sans avoir à se soucier de l’assentiment des uns, des unes, et des autres. String, pantalon, mini-jupe, voile, salopette, etc; le choix devrait appartenir à celle portant le vêtement. Pas à celui ou celle qui regarde et juge. A propos de regard, personne n’oblige Lou Doillon à visionner des clips avec des femmes trop dénudées à son goût. Ni les obscurantistes à vérifier de visu la taille des jupes croisées dans la rue. A moins qu'ils désirent tant voir ce qui les gêne...A chacune et chacun de balayer devant son regard.

Et foutre la paix aux femmes !

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