mustapha kharmoudi (avatar)

mustapha kharmoudi

écrivain

Abonné·e de Mediapart

329 Billets

0 Édition

Billet de blog 10 février 2023

mustapha kharmoudi (avatar)

mustapha kharmoudi

écrivain

Abonné·e de Mediapart

Le plus heureux sur terre

Ce texte-poème est un hommage aux amours passagères, aux amours d'un jour

mustapha kharmoudi (avatar)

mustapha kharmoudi

écrivain

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le plus heureux sur terre
C’était par un été très chaud mais qui savait nous être de douce clémence dans cette clairière où nous avions trouvé refuge

C’était par un été très chaud mais qui nous bénissait d’amour et de douceur là-bas au fin fond de la campagne comtoise
C’était par un été très chaud mais à l’orée d’un village des bois qui avait l'art de toujours se faire discret autant par rudes hivers que de chauds étés
C’était par un été très chaud mais  à l’ombre de grands arbres qui savent prendre soin de ces peuples d'hommes et d'oiseaux qui s'y abritent pour s'aimer
C’était par un été très chaud mais au bord d’un petit ruisseau qui nous rafraîchissait à longueur de journée

Je nous y vois encore comme d'hier comme d'aujourd'hui comme de demain et comme de tous les jours passés et de tous les jours à venir
Je nous y vois encore nous aimer d’un amour aussi insouciant que fragile mais que rien jamais ne saurait abîmer

Je vois sa robe blanche aux mille fleurs accrochée à une branche et qui joyeusement balance au gré des branchages qu'un vent timide effleure de ses douces caresses
Je la vois sortir de l’eau toute nue et qui s’avance avec grâce comme d’un pas de danse
Je la vois remettre sa robe et je vois sa robe qui danse de plus bel, toute excitée de frôler son corps de félin
Je la vois s’allonger à même l’herbe tendre et à l'ombre du plus généreux des platanes
Je la vois me faire signe de m’allonger à côté d’elle
Je la vois qui me prend la main et qui la serre de ses deux mains contre son cœur
Je la vois fermer les yeux et déjà je la sens s’envoler vers quelque douce rêverie

Je l'entends respirer en belle harmonie avec l’eau qui s'écoule en chevrotant de toute sa gaieté
Je l'entends respirer en belle harmonie avec les oiseaux qui n’en finissent pas de déclamer leur amour des plus fervents de leurs gazouillis 
Je l'entends respirer en belle harmonie avec les bourdonnements d’abeilles qui jamais ne cessent leurs interminables rondes au-dessus de nos têtes
Et je la vois qui s'assoupit toute heureuse et qui bientôt penche à se laisser dorloter dans les bras de Morphée

Et longtemps je reste là à ne rien pouvoir faire d'autre que la contempler pendant qu'elle vit loin de moi dans son doux sommeil
Et longtemps je reste là à éprouver un doux plaisir de voir sa robe légèrement frissonner à chaque fois que le ruisseau nous berce d’un frêle souffle de vent frais
Et longtemps je reste là à me dire que je pourrais rester là, pour toujours, à la regarder dormir, envoûté par le charme de son visage que des flots d’ombre et de lumière sans cesse balayent comme d’une magie de théâtre d’ombre
Et longtemps je reste là à frémir de la voir parfois esquisser une ombre de sourire qui semble me dire qu'elle est si heureuse de m'aimer comme je suis si heureux de l'aimer
Je me dis que certainement elle est déjà plongée dans quelque rêve merveilleux, vu qu'elle-même elle est déjà le plus beau de tous mes rêves 

Je rêve de rester là, à la regarder dormir tous les jours du restant de tous mes jours de ma vie, et même de tous les autres jours 'de la vie qu'il me serait possible d'en marauder par-ci par-là
Je rêve d’un pouvoir magique pour pénétrer dans le jardin secret de son sommeil, comme dans ces contes orientaux où nulle frontière ne sépare le réel de l’imaginaire
Je rêve de n’être plus jamais de vie réelle afin de l'aimer jusque dans son propre rêve
Je rêve de n’être plus qu’un personnage qui l’aime telle qu’elle se voudrait être dans son rêve, fut-elle princesse, vagabonde ou tout autre créature merveilleuse

Je fais le vœu que de toute éternité, elle resterait ainsi allongée sans plus jamais sentir le besoin de se relever
Je fais le vœu que de toute éternité, elle resterait ainsi endormie pour toujours, et qu’ainsi mon regard ne verrait plus jamais rien d'autre que son visage et son beau corps ainsi apaisés
Je fais le vœu que de toute éternité, elle resterait ainsi endormie pour toujours, et qu’ainsi mon cœur resterait à jamais ensorcelé par cet amour aussi naïf que puissant
Je fais le vœu que de toute éternité, elle resterait ainsi endormie pour toujours, et qu’ainsi ma tête resterait à jamais tout enivrée par cette présence qui remplit ma vie sans rien laisser de vacant en moi pour quoi que ce soit d’autre
Je fais le vœu que de toute éternité, aucun bruit insolite ne s'avise jamais de la réveiller au risque de mettre fin au plus beau rêve de toute ma vie
Je fais le vœu que de toute éternité, pas le moindre brin de sommeil jamais ne se prenne de me surprendre, au risque de mettre à mal mon vœu le plus précieux

Et puis voilà, comme dans le plus féerique des contes de fées, je vois un papillon voleter au-dessus d'elle avant de se poser sur une des fleurs de sa robe fleurie
Et puis voilà, comme dans le plus féerique des contes de fées, je me hâte de lui confier du plus profond de mon être le vœu le plus précieux de toute ma vie
Et puis voilà, comme dans le plus féerique des contes de fées, au moment de reprendre son envol et sa parade amoureuse, le papillon me chuchote de cœur à cœur que mon vœu est bel et bien exaucé

Et depuis lors, en tous temps et toutes saisons, ce jour-là est resté à jamais présent dans chaque jour de ma vie
Et depuis lors, en tous temps et toutes saisons, il suffit d’un simple battement de cils, et déjà à nouveau ce jour-là me revient aussi clair que le jour-même où je me crois être du jour d’aujourd’hui
Et depuis lors, en tous temps et toutes saisons, il suffit d’un simple clignement des yeux, et déjà cet été-là me revient comme si j’étais encore et toujours au même été
Et depuis lors, en tous temps et toutes saisons, il suffit d’un rien de soupir, et déjà elle est là qui encore et toujours dort et rêve à mes côtés pour mon plus grand bonheur

Et à chaque jour qu’elle me revient en mémoire, tout le temps que je la vois dormir, voici que tout le temps je n'ai rien d'autre à faire de ma vie qu'encore et toujours la veiller 
Et à chaque jour qu’elle me revient en mémoire, tout le temps que je la vois dormir, voici que de me voir tant ému, le temps lui-même s'arrête et s'assoit pour la contempler à mes côtés, sans plus jamais se soucier qu'il revient pourtant au temps que le temps doive toujours passer 
Et à chaque jour qu’elle me revient en mémoire, tout le temps que je la vois dormir, voici que le jour reste à jamais le même jour
Et à chaque jour qu’elle me revient en mémoire, tout le temps que je la vois dormir, voici que l’été est encore et toujours le même été que l'été de ce jour-là
Et à chaque jour qu’elle me revient en mémoire, tout le temps que je la vois dormir, voici que les arbres sont encore et toujours les mêmes arbres
Et à chaque jour qu’elle me revient en mémoire, tout le temps qu’elle dort, voici qu'encore et toujours les oiseaux déclament partout notre bel amour
Et à chaque jour qu’elle me revient en mémoire, tout le temps que je la vois dormir, voici qu'encore et toujours je l’aime plus que tout ce que j’ai aimé de toute ma vie
Et à chaque jour qu’elle me revient en mémoire, tout le temps que je la vois dormir, voici qu'encore et toujours je me dis que quand bien même je ne l’ai connue qu’un seul et unique jour de ma vie, ce petit jour-là parmi le grand nombre des jours de ma vie, ce petit jour-là a suffi pour faire de moi à jamais le plus heureux sur terre

Mustapha Kharmoudi

Illustration 1

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.