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Billet de blog 31 mars 2018

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Rêveries

J'aime marcher. Seule ou avec mon chien. Il me vient des idées idiotes, utiles ou tout simplement je pense à des choses qui me font du bien. Une question insoluble entre quatre murs trouve sa réponse à l'air libre, comme si mon cerveau se sentait opprimé, enfermé doublement, dans mon crâne, et dans l'appartement.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Ce matin, je me suis promenée, emmenant mon chien, mon coach, dans mes rêveries.

A vrai dire je rêve tout le temps. Mes enfants, quand je leur lisais un livre, me disaient

"Alors, encore en train de rêver?". Ils auraient voulu que je sois à cent pour cent

avec eux. Cependant depuis toutes petite, je trouve mon imaginaire, bien plus gratifiant

que la vie ordinaire.

Et donc, vers huit heures (j'ai un peu paressé ce matin, car je ne me suis pas encore

habituée au changement d'heure), nous sommes sortis.

Mis à part quelques religieux se pressant pour aller à la synagogue, personne, mais,

par contre beaucoup de chats. Il faudrait, qu'un jour, j'écrive un article sur

ces chats là. Je n'ai jamais vu des félins aussi agressifs!

Ici et là, des tâches noires sur le sol, mon chien, Rémi, renifle

mais ne s'attarde pas. Vous qui me lisez en France, vous

ne pouvez pas comprendre, comment les trottoirs se sont-ils

salis, brûlés, ainsi? 

C'est que c'est la fête de Pessah. Les religieux ont

brûlé dans des tonneaux en fer, tout ce qui n'était pas

cacher pour Pessah. Avec la complicité de la 

Mairie.

Avec Rémi, j'ai appris à marcher vite, et quelques fois,

il va si vite, qu'il déboule de l'autre côté du passage à

piétons. 

Souvent je pense aux primo-arrivants, pour qui notre

langue et notre culture sont encore étrangères.

Le mot "débouler", par exemple, comment l'expliquer.

Alors en marchant, je me suis mise dans la peau d'un prof,

et j'ai décidé que la meilleure manière était de faire entrer

mon chien, brusquement, dans la salle de classe.

Quelques fois un choc peut être salutaire et imprimer

durablement la mémoire.

Puis, de nouveau dans mes rêveries, je me suis dis,

que le mieux était de leur demander d'ajouter "dé" à un

verbe qu'ils venaient d'apprendre. 

Et là, dans mon esprit, un élève a dit "Démonter".

C'est là qu'on voit comment le français est une langue

déroutante. Monter un meuble, monter l'escalier mais,

démonter un meuble, mais pas démonter l'escalier,

car ce n'est pas l'inverse.

De là on parlait du géant suédois des meubles, et je

me suis rendue compte, en passant devant les magasins

fermés, qu'il n'était pas sûr qu'ils connaissent son nom.

Puis je me suis rappelée de cet enseignant, à Marseilles,

qui leur passe des films muets de Charlie Chaplin.

Comme il le dit dans l'interview de France Culture,

"Dans certains endroits il n'y a jamais eu de cinémas,

et dans d'autres ils ont été détruits par la guerre".

Mais un film muet parle à tout le monde.

Je me suis remémorée une vidéo de Médiapart, je pense

des Détricoteuses, dans laquelle elles me donnaient la

réponse qui m'avait manqué, lorsque mon fils aîné

m'avait dit "Pourquoi une femme à qui l'on demande

si elle est malade, répond je le suis"?

Très bonne question, que je ne me suis jamais 

posée...

La langue française est un langue de domination,

en fait les hommes, à un moment donné, ont décidé

que le masculin l'emporterait aussi ici.

Avant on disait, attention à vos oreilles,

"Je la suis". Mais c'était il y a 300 ans.

En fait, apprendre une langue, c'est plonger dans

son passé.

Dehors, j'aime bien essayer de lire tout mot

écrit en arabe. Comme j'apprends cette langue,

je peux comparer avec les autres langues que

je connais. Le français, par exemple, est une langue

écrite alors que lorsqu'on lit en arabe, on lit

comme-ci on parlait. On ne prononce

pas toujours la fin des mots. Très déroutant. 

Je remarque que, souvent, ce qui est écrit en

hébreu n'est pas traduit en arabe. En Israel,

il y a deux langues officielles. Mais si c'est une

interdiction ou une injonction, c'est toujours

traduit. La langue n'est-elle pas une forme de 

domination?

Quelques fois, c'est traduit en partie, je passe

souvent devant des arrêts d'autobus et tant qu'on se contente

de lire les horaires des autobus, ça va, mais plus 

on continue la lecture, moins c'est traduit!

L'autre jour, mon coach et moi avons vu 

des tonnes de pommes de terres sur des palettes,

devant une synagogue. Ce qui m'a fait sourire est

le papier que quelqu'un avait collé dessus:

"Interdiction de prendre ces pommes de terre!"

Non seulement, beaucoup de ces religieux 

ne travaillent pas, mais en plus ils refusent de 

partager...

Je vis dans deux pièces et demi, qui comporte

aussi deux balcons.

Un jour je rentrais à pied du travail, et je me 

demandais comment faire passer le canapé,

dans l'autre chambre. Les déménageurs l'avait

fait passé par la porte de ma chambre, mais

maintenant, une bibliothèque se trouvait

juste à côté, empêchant la sortie du meuble.

Je me compare souvent à un cheval qui rentre à 

l'écurie, mes pieds savent où aller, ce qui

laisse à mon cerveau plus de temps pour penser.

Tout à coup, j'ai pensé, mais je peux le passer par

le balcon! 

Quand je trouve une solution à un problème donné,

je suis vraiment contente, c'est comme quand je

réussis un quiz en math.

A vrai dire je vois mieux les choses dehors.

Quand j'ai du réorganiser ma chambre, il m'a suffit

de me promener et de ne penser à rien et à tout.

Au retour, je savais comment bouger les meubles.

Pour finir, je dirais que, sollicités comme nous le sommes,

pouvoir rêvasser, est un vrai luxe!

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