La mer, source de clairvoyance...

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Lorsque Sidi Akadoum, l'un des protagonistes de mon premier roman, "l'Ombre d'un doute", arriva dans la ville de Bent'Joy, il fut subjugué par la mer, lui qui ne connaissait du monde que les incommensurables étendues du désert. "La mer et ses tremblements qui exaltaient une plainte douce et capricieuse, l'intriguèrent" ( P. 23). "Lorsqu'il achevait sa mission quotidienne auprès de sa Majesté, le Prince, à la tombée de la nuit, il grimpait, d'un pas alerte, sur la colline qui faisait face à la grande bleue. Il s'asseyait pendant de longues heures sur le Rocher flou, où il passait son temps à contempler la mer et à méditer". (P. 30).
Pour Sidi Akadoum, la mer était un havre de paix qui agissait sur lui comme un exutoire. Elle le calmait, l’apaisait, adoucissait le sentiment de nostalgie qui étreignait son coeur lorsque, à la nuit tombée, il se retrouvait seul, loin du tumulte du palais et de ses soubresauts. Dans « L’Ombre d’un doute », La mer est source de sérénité et de paix intérieure. Elle est associée à la réflexion, à la méditation et à la clairvoyance. C’est face à l’immense étendue bleue que Sidi Akadoum élabora des stratégies et échafauda des plans pour asseoir son pouvoir sur la ville et ses habitants. J’avais imaginé Sidi Akadoum heureux, face à la mer attrayante, captivante, régénératrice et complice.
La mer originelle...

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Je suis une enfant de la mer. Son bleu tantôt turquoise, tantôt navy, tantôt émeraude, et ses reflets argentés, le jour, et incandescents, la nuit, a pendant de longues années fait partie de mon champ visuel. Elle a profondément imprégné ma mémoire olfactive et mon habitus émotionnel. D’abord à Bougie – Bgayeth, anciennement Saldae, ville côtière, berceau du savoir, située au bord de la Méditerranée où je suis née et j'ai grandi. Durant l’enfance et l’adolescence, période insouciante et bénie, j’étais accoutumée à des lieux où la mer s’offrait nue aux regards candides qui se délectaient devant tant de merveilles aux couleurs de la « mère » Méditerranée : le balcon de la mythique Place Gueydon et sa vue imprenable sur le port, la brise de mer, les aiguades, le Cap carbon, Yemma Gouraya et la jetée.
Puis j’ai vécu mes années d’âge adulte à Alger – Dzayer, ville où, à l’aube de chaque jour nouveau, le ciel bigarré et la mer placide fusent tendrement et gracieusement, loin des yeux inquisiteurs. C’est à cet instant que l’espoir féconde les coeurs meurtris.
J’aime la mer lorsqu’elle m’invite au rêve et à l’imagination. J’aime la grande bleue quand elle fait naître dans mon coeur un brin d’espoir, essence de la vie. J’aime ce vaste espace géographique aux couleurs chamarrées qui me connecte à la nature enchanteresse, m’apaise, me rassure, me fascine, me ravit.
Ma vie loin de la mer
A Paris, l’absence de la grande bleue et de son étendue, les effluves des embruns iodés qui fouettaient mon visage, le spectacle chorégraphique des ondes lumineuses multicolores qui luisaient sur la surface de l’eau, se font ressentir au plus profond de mon être. Ses clapotis sonnent dans mon habitus comme des promesses non tenues. La mer me manque. L’eau, cet emblème de la vie me manquera toujours. Car l’eau est le symbole de la purification. C’est une substance qui humanise, fertilise, rassure, réconforte et participe à la régénération de la vie. Amen d’lamen dit l’adage kabyle. Oui, l’eau, est source de confiance ! Qui de nous n’a pas pataugé sereinement dans les eaux calmes et nourricières de la mer originelle, le lieu de tous les commencements ?
Nadia Agsous
Paris 26/07/2024