La terre entière ne parle que d'une chose : les élections américaines.
Ici, autant tout le monde est très curieux de voir le résultat de demain, autant c'est un peu comme si les Israéliens s'étaient rendus au fait que l'élection américaine ne changera pas la situation d'un coup de baguette magique.
Je fais partie de ceux qui pensent que c'est une bonne chose. Et par la même occasion, je fais partie de ceux et celles qui pensent que l'une des plus grande vertus de Obama est qu'il semble déterminé à laisser Israël se bagarrer avec ses problèmes toute seule comme une grande (ici, on prend l'habitude de parler de la Patrie au féminin...)
Attention... Ce n'est pas que les journaux ignorent la course à la Maison Blanche. D'ailleurs, il y a déjà eu des sondages et des élections « interne » à Israël qui ont donné McCain vainqueur auprès des électeurs israéliens. Mais, pour paraphraser un très grinçant papier de Aluf Benn dans le Haaretz d'hier, les fantasmes de la gauche (Obama est élu, il refuse de céder aux pressions des lobbys Juifs d'Amérique et coupe toute aide financière ou soutien politique avant qu'Israël ait évacué ses colonies et signe un accord frontalier qui permet le retour aux frontières de 67 et la création de deux pays prospères et amis) comme ceux de la droite (McCain est élu, il met en place l'anéantissement du programme nucléaire iranien, kidnappe Ahmadinejad, et avec le soutien d'Israël, en finit avec le Hezbollah et le Hamas pour établir un énorme pays d'Israël qui inclurait le plateau du Golan ainsi que Gaza et que viendraient peupler plein de Juifs Américains enthousiastes) ne se réaliseront pas. La crise financière continuera d'occupant le nouvel occupant de la Maison. Et Israël a du pain sur la planche qu'elle doit se coltiner seule, ou presque.
La solitude, Tzipi Livni en fait l’expérience en ce moment… Elle a pris une décision qui, quelque soit les résultats des élections à venir (dans moins de trois mois!), témoigne de sa stature comme femme politique. En décidant de dire le mot de Cambronne aux trafficotages crades que voulaient lui imposer ceux avec qui elle devait gouverner, elle a posé une limite aux tractations qu'on peut faire dans un gouvernement éternellement en crise. Pour ceux qui n'ont pas suivit: Livni a passé beaucoup de temps (trop diraient certains) à essayer de former une coalition gouvernementale… elle a essayé de plaire à la fois à Ehud Barak et ses demandes de prestiges et aux demandes financières et politiques de Shas (parti religieux orthodoxe) pour finir par refuser de, selon ses propres termes, brader ses convictions pour la chaise de Premier Ministre. Sa décision a eu un effet de panique au parti de Nethanyahu, et on ne peut qu'espérer qu'elle se propagera... le refus de Livni a montré qu'il y avait encore (quelques) valeurs plus importantes que le pouvoir. Et des avis de recherches ont été lancé pour des « hommes politiques aux mains propres », capables de rivaliser avec l'aura dont le public entoure Livni depuis sa décision.
Je vais voter aux prochaines élections. Ce ne sera pas mon premier vote puisque le 10 Novembre je voterais pour le prochain maire de Tel-Aviv. Mais Nadav souligne que les élections nationales seront pour une fois vraiment très intéressante... Livni a décidé de ne pas céder à Shas sur la questions des versements des pensions alimentaires, mais elle a aussi (et surtout !) refusé de dire qu'elle ne négocierait pas sur la ville de Jérusalem. Elle n'a pas dit qu'elle allait rendre la ville sainte, non... Mais elle a dit qu'elle ne pouvait pas promettre de ne pas négocier sur la question de Jérusalem, puisque cela serait un arrêt des négociations. C'est donc qu'elle veut vraiment négocier! C'est donc qu'une négociation est possible! C'est donc le début de l’idée du commencement d'un accord! C'est peut-être le début de quelque chose!
On verra. Mais même si je m'en veux un peu d'être enthousiaste sur une miette pareille, c'est tout de même ce qui s’appelle un peu d'espoir, non?
Parce que faire quelque chose est horriblement urgent. Quelque chose de radical, de fort, de ferme, de décisif et de décidé.
L'évacuation d'une colonie illégale (la ferme des Federmans) a donné lieu à des affrontements entre des jeunes colons et l'armée pendant le week-end. Des jeunes hommes encagoulés jetant des pierres en direction des objectifs font la une des journaux depuis quelques jours: des délinquants Juifs extrémistes qui selon les dires du chef du service de sécurité nationale, pourraient aller jusqu'au meurtre. L'approche du macabre anniversaire de la mort de Rabin rappelle que c'est possible et après tout, il y a quelques semaines de cela seulement, il y a eu la tentative d'assassinat des extrémistes sur Sternhell...
Après l'évacuation de Gaza les colons, eux, se sont rendus compte que c'était possible, que le pays pouvait les retirer des lieux illégaux où ils s'implantaient en toute impunité. Et ils sont en guerre. Et ils sont prêts à tout. Et rares sont ceux qui acceptent de voir que le futur du pays se joue dans ce qui sera décidé par rapport à ces dingues. Vraiment... On pourrait croire que tout le monde comprend que d'avoir des hors-la-loi qui en même temps qu'ils parlent d'anéantir leur propre pays s'il ne soumet pas à leurs règles font leur service militaire et montent en grade c'est un danger qu'Israël ne peut pas se permettre. Mais l'impression diffuse est que trop de temps a déjà été perdu et que la violence ne fait que s'accélérer.
Ça fiche la trouille.
En attendant, l'assassin de Rabin a été interviewé par téléphone derrière le dos des gardiens de sa prison sécurisé. La question de si oui ou non son entretien téléphonique dans lequel il décrit la genèse de sa décision d'assassiner Rabin a provoqué un débat national: diffuser ou ne pas diffuser la voix du criminel? Ce criminel qui est encore pour les utras-extrémistes un symbole guerrier... et pour beaucoup d'autres celui qui a mis fin pour trop longtemps à un quelconque espoir de paix.
Même si en général je suis plutôt en faveur de la censure en ce qui concerne les colons, je trouve la vidéo ci-jointe intéressante... Elle montre la folie à laquelle est confronté le pays d'Israël aujourd'hui. L'extrémisme tranquille, photogénique et souriant. Attention, propagande...