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Billet de blog 10 avril 2008

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

L’ancien président israélien, Moshe Katsav, qui avait démissionné suite à des plaintes déposées par plusieurs femmes pour harcèlement sexuel et viol, a décidé tout juste vingt minutes avant l’officialisation d’un compromis venant à reconnaître l’harcèlement mais pas les viols, de ne pas accepter le compromis. Les tribunaux vont donc à nouveau entendre les témoignages des femmes qui affirment avoir été violées et violentées par le précédent président avant et pendant l’exercice de ses fonctions. Et les contre-accusations de ce dernier, qui soutient qu’il y a un complot à l’œuvre contre lui.

Il y a un an de cela, au moment où éclatait l’affaire Katzav, Haim Ramon, à l’époque ministre de la justice, avait été accusé d’avoir harcelé une jeune officière qui était venue se faire photographier avec lui dans son bureau. Sentant qu’elle était peut-être intéressée par lui, Ramon avait essayé d’embrasser la jeune soldate pendant que le photographe était sorti chercher un rouleau de pellicule. La jeune femme avait refusé le baiser. Ramon n’avait pas insisté et ils avaient d’ailleurs pris une autre photo ensemble. Ensuite, la jeune femme a porté plainte (longtemps après, ce qui avait encore une fois soulevé des accusations de complot contre le ministre) pour harcèlement sexuel.

A l’époque de l’histoire Ramon certaines de mes amies m’avaient raconté comment lorsqu’elles étaient soldates elles avaient eu des aventures avec des soldats plus âgés, plus haut gradés qu’elles. Toutes se mettent d’accord pour dire qu’elles seraient bien en mal de dire qu’est-ce qui était attirant : le pouvoir que les soldats pouvaient avoir sur elles (sur leurs sorties pendant le week-end, sur leurs tours de gardes) ou tout simplement leurs quelques années de plus, leurs faits d’armes au service…

Si les anciens chefs de l’armée étaient jugés selon les critères d’aujourd’hui, ils seraient probablement tous coupables d’harcèlement sexuel au dernier degré. Les mœurs de la société israélienne changent et , oui, en effet, les femmes sont plus protégées, peut-être parfois aux dépends des hommes. Ramon a senti qu’il pouvait tenter sa chance. La soldate était jeune mais elle était majeure. Il a essayé de l’embrasser, elle a refusé. Point. Elle n’a pas dit qu’il avait essayé de la forcer. L’accusation était basée sur le fait qu’un supérieur hiérarchique n’a pas le droit de tenter quoi que ce soit avec un/ une subordonné(e). Par crainte des dérives possibles.

Car l’accusation se fait aussi l’écho de la lassitude des femmes israéliennes face au machisme ambiant. Une société basée sur la possibilité d’une guerre imminente a besoin de femmes dans des rôles bien assignés, non ? Maman, donc et putain à l’occasion.

Anat me raconte que pendant longtemps la seule position dans laquelle les hommes faisaient l’amour aux femmes au cinéma était soit la levrette violente soit le missionnaire mou. Ça la fait rire.

Les jolies filles sont secrétaires des pilotes à l’armée et celles qui insistent pour être dans des unités combatives deviennent la fille de l’unité. Des jolis objets en kaki, qui font office de présence féminine. Et qu’il est bien entendu interdit de toucher. Elles sont souvent les psychologues, les confidentes. Mais gare à celle qui signalerait une irrégularité dans le déroulement d’une procédure : elle doit faire partie du groupe, ou le groupe lui mènera la vie dure. Elle est là pour les soldats, et donc la loi du silence s’applique pour elle aussi.

Certaines deviennent des véritables soldates. Le film Voir si je souris de Tamar Yarom est une collection de témoignages de filles qui racontent comment elles ont lavé des cadavres, tiré sur des enfants qu’elles auraient voulu protéger, fait baisser les yeux à des hommes arabes qui osaient les regarder. Elle ont fait la guerre avec les hommes et comme eux.

L’une d’elles raconte comment parfois, seule avec ses enfants, elle se sent devenir un monstre de haine et de rage. Après ça passe, elle se calme et le retour à la normale s’opère.

Il me semble que les femmes après leur service militaire ont encore les tics des femmes à l’armée. Elles portent des grosses chaussures qui les font marcher comme des petits tanks, elles ont des gestes brusques, souvent masculins. Elles ne se laissent pas faire, sont prêtes à se battre, comme des hommes. Les filles étrangères parlent beaucoup de ça, de comment il est difficile de s’habituer aux codes féminins israéliens. Les codes. Difficile d’en parler sans sombrer dans les clichés rebattus.

En plus, les codes sont différents pour chacun des groupes qui composent la société israélienne.

Une histoire incroyable et vraie : un jeune homme d’une famille religieuse orthodoxe a décidé de faire son service militaire contre le gré de ses parents. Il entre donc à l’armée après des années passées dans un environnement religieux exclusivement masculin, où les journées étaient passées à prier entre hommes. Il rencontre alors les hommes israéliens : brutaux, durs, musclés et prêts à tout. Sous le choc, il demande à être transféré à une unité de filles, expliquant que les hommes israéliens ressemblent plus aux femmes religieuses de sa communauté (celles qui sortent travailler pendant que les hommes prient), et qu’il n’est pas habitué à fréquenter des gens pareils. Le jeune homme a fait son service militaire dans une unité de fille, l’armée étant prête à accommoder ses soldats. Depuis, il se présente comme une lesbienne religieuse dans un corps d’homme.

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