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Billet de blog 26 octobre 2016

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En Espagne comme en France, le socialisme du mensonge

Samedi 29 octobre les députés socialistes d’Espagne s’abstiendront lors du vote d’investiture de Mariano Rajoy, chef d’une droite issue du franquisme, lui permettant ainsi de demeurer au pouvoir.

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Il ne pouvait en aller autrement : les caciques du Parti socialiste espagnol (PSOE) ont décidé de permettre au Parti Populaire (PP), cette droite issue du franquisme, de se maintenir au pouvoir.

Les caciques, en effet, car c’est bien ainsi que les ont interpellés les militants du parti massés tout au long de ce dimanche à « Ferraz » devant le siège du PSOE, brandissant des pancartes stipulant impérativement que « No es NO », non à l’investiture de Rajoy, chef actuel de la droite, et portant de graves accusations à l’égard de ces caciques telles que « traitres » et « corrompus ».

Une décision raisonnable

L’autorité suprême du parti, le Comité fédéral, a pourtant tranché en faveur de l’abstention lors du futur vote d’investiture de Rajoy par 139 voix contre 96 ce qui assure cette investiture. Le comité en question n’a pas tardé à recevoir les félicitations du susdit Rajoy, hilare et ironique, pour cette décision « raisonnable ».

De sorte qu’à moins  d’une spectaculaire mais peu probable révolte d’un nombre suffisant de députés refusant d’obtempérer et votant « non », la droite demeurera au pouvoir. Et cette droite n’est pas n’importe quelle droite. Elle est issue de Alianza popular créée en 1976 au lendemain de la mort du dictateur par de fervents franquistes et en particulier par Manuel  Fraga Iribarne, ancien ministre de Franco, qui sera le premier président du PP quand, début 1989, celui-ci remplacera Alianza popular.

Telle est donc la force politique que le Comité fédéral du PSOE vient de maintenir au pouvoir non seulement pour en finir avec la vacance de celui-ci, mais aussi pour éviter de nouvelles élections qui selon toute probabilité auraient été plus désastreuses que les précédentes.

Que va-t-il se passer maintenant? Les caciques du parti seront-ils assez habiles (puisqu’ils ne disposent plus d’aucun crédit, d’aucune autorité morale) pour éviter le marasme absolu, l’écroulement de cet édifice dont les premières pierres furent posées en 1879 par un certain Pablo Iglesias Posse? Rien n’est moins sûr car il semble bien que cette crise comme celle du PS français soit la manifestation la plus évidente de l’intégration définitive de la « social-démocratie » au libéralisme mondialisé, intégration honteuse cependant qui n’ose s’avouer telle et qui de ce fait fonctionne au mensonge depuis longtemps déjà, depuis le début des années 1980 pour ne pas remonter plus avant dans l’histoire. Signalons simplement pour mémoire et en tant que mensonge absolu l’odieux « Pacte de non-intervention » dans la guerre civile espagnole en 1936 proposé par Léon Blum et signé par Hitler et Mussolini.

Mensonges historiques

En Espagne comme en France, donc, l’année 1983 est celle du « tournant de la rigueur » : mensonge historique s’il en fut dont l’origine et le premier terme se trouve à Epinay en 1971 dans la bouche d’un Mitterrand qui a le culot de lancer dans une envolée lyrique autant que cynique :

 Celui qui n’accepte pas la rupture avec l’ordre établi, avec la société capitaliste, celui là, il ne peut pas être adhérent du Parti Socialiste.

Le tournant de la rigueur de 1983 contredit évidemment le discours de 1971 et raffermit définitivement le mensonge en tant que dispositif de pouvoir auquel à recours une caste (comme disait mais ne dit plus Podemos…) pour se maintenir au… Pouvoir.

De sorte que le jeune Felipe Gonzalez en disciple appliqué du « vieux » Mitterrand n’éprouve sans doute pas le moindre scrupule à assener en 1979 pour amorcer son propre virage : Il faut être socialiste avant d’être marxiste. Et ne voit aucun inconvénient quelques années plus tard (1985) devenu chef du gouvernement, à user pour ses vacances en famille du yacht commandé par Franco sur lequel le « caudillo » s’adonnait aux plaisirs de la pêche au gros. Quand on lui fit part de la réprobation des militants et des citoyens, quand son camarade et vice-premier ministre Alfonso Guerra, lui dit qu’il vient de commettre sa première grave erreur, Felipe répond : Le patrimoine de l’Etat ne pouvait être ignoré parce qu’il avait été utilisé par un gouvernant autoritaire.

Franco, ce dictateur sanguinaire réduit à un gouvernant autoritaire et Felipe tout content de se pavaner sur « el Azor » !

L’histoire dudit « socialisme » de part et d’autre des Pyrénées en ces années 1980-90 pourrait être écrite comme l’histoire du mensonge :

Occultation de la maladie, écoutes téléphoniques de journalistes et autres « affaires » d’un côté, corruption généralisée (les romans de Montalban sont très instructifs à cet égard), financement du terrorisme d’Etat des GAL (Groupes antiterroristes de libération) de l’autre, jusqu’au pathétique « mon ennemi c’est la finance » de l’un et le coup de pouce à Rajoy de l’autre concluant sa carrière de « socialiste avant d’être marxiste » dans un conseil d’administration.

La calle

Peut-on conclure de tout cela qu’après tant d’années de mensonges, le socialisme, ce socialisme-là, ne tardera pas à rejoindre à son tour les poubelles de l’histoire ?

En Espagne, quoi qu’il en soit, « la calle », la rue, se prépare à dire non à Rajoy mais non également à celles et ceux qui vont permettre son investiture. La   "Coordinadora 25-S" prépare en effet un nouveau « Rodea el Congreso » (encercle le parlement) comme elle le fit le 25 septembre 2012 (d’où son nom). 

Mot d’ordre de ce rassemblement le jour de l’investiture (samedi 29) : «  Ante el golpe de la mafia, Democracia » (face au coup de la mafia, Démocratie). Quant à nous, de ce côté-ci des Pyrénées, de primaire en primaire… où allons-nous ?

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