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Billet de blog 27 juillet 2015

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Espagne: il n'y a pas que Pablo Iglesias

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En Espagne, il n’y a pas que Pablo Iglesias. Il y a même  des femmes et des hommes aussi populaires que lui et depuis plus longtemps. Bien sûr tout le monde, maintenant, connaît Ada Colau, la maire de Barcelone et Manuela Carmena, celle de Madrid. Mais il est en outre des militants de toujours qui osent dire non à Pablo.

Savoir dire non

Ainsi Diego Cañamero (à gauche sur la photo), Secrétaire général du SAT (syndicat des travailleurs andalou) qui vient de dire deux fois non à la direction de Podemos lui offrant d’abord un poste de sénateur qu’il refuse, puis lui proposant de figurer en bonne position sur la liste de Pablo Iglesias (qui vient d’être confirmé comme candidat à la présidence du gouvernement par 81% des votants d’une consultation à laquelle n’ont participé que 16% des inscrits). Nouveau refus. Mais pourquoi donc ?

Parce que, argumente Cañamero « nous considérons que ce sont les citoyens qui doivent décider. Il ne nous paraît pas correct que les choses se décident dans les bureaux, depuis le haut ». Et de préciser qu’il n’acceptera aucune responsabilité qui serait décidée dans un bureau.

De sorte qu’en compagnie de son « compañero » Juan Manuel Sanchez Gordillo (à droite) il construit à son tour une liste, non pas, dit-il une liste de confrontation mais de complémentarité, de manière à favoriser  le pluralisme politique et cela, précise-t-il, avec humilité et transparence.

 En outre, cette liste ne présentera pas de candidat à la présidence du gouvernement car elle considère (malgré tout ?) que Pablo Iglesias demeure la personne la plus appropriée. Cependant l’intitulé de cette liste, « Utopie et dignité », ne semble-t-il pas sonner comme un avertissement à toute éventuelle dérive de type autoritaire ?

Et il semble bien que l’on puisse compter sur ces deux militants pour ce qui est de la vigilance. Toute leur vie est là pour s’en persuader.

Gordillo

Sans doute connaît-on mieux en France Gordillo, personnage lui aussi médiatique qui, en 1979 fut élu  maire de Marinaleda et fit de ce village, avec ses concitoyens, une « Utopie réalisée ». En 2008 il est élu député de IU (Gauche unie) au parlement d’Andalousie (après l’avoir été de 94 à 2000). Il est en outre membre du Comité national du SAT, souvent en conflit avec IU, il n’a jamais négligé l’action directe, c’est-à-dire l’occupation des terres laissées en friche par les grands propriétaires.

En 2012, avec 400 de ses camarades du SAT, dont Cañamero, et bien sûr, après avoir prévenu les médias, il réalise une « expropriation forcée (expropriación forzada) dans deux grandes surfaces (Mercadona et Carrefour) autrement dit ils prélèvent nourriture et produits de première nécessité qu’ils distribuent aux plus nécessiteux. Toute une vie de lutte, donc, de quelqu’un qui se dit communiste comme le Christ, Gandhi et… Marx !

Diego Cañamero, lui, est avant tout un syndicaliste mais pas de n’importe quel syndicalisme. En effet le SAT se déclare comme un « syndicat de classe, alternatif, anticapitaliste, assembléiste, d’action directe, autonome, indépendant, internationaliste, pluraliste, ouvert, antipatriarcal, confédéral, républicain, nationaliste andalou, de gauche et utopique » (comment ne pas voir que l’on retrouve ici, à quelques formulations près, l’anarcho-syndicalisme de la CNT de 1936).

Lui aussi a été maire de son village, El Coronil, d’où il a mené une multitude d’actions, d’occupations de terres, de créations de coopératives qui lui ont valu condamnations et emprisonnements… Lui aussi a été membre de IU, lui aussi en conflit avec les directions politiques, lui aussi militant prestigieux mais qui vient de dire non au plus prestigieux des dirigeants politiques du moment. Ce qui ne va pas, me semble-t-il, sans soulever quelques questions :

Serait-ce que toute tentative, tout mouvement de transformation sociale nécessite de s’incarner dans un individu auquel la multitude reconnaît des « talents » qui l’inclinent à s’en remettre à lui ?

Juan manuel Sanchez Gordillo est maire depuis 35 ans et député pendant 15 ans. Est-ce que vraiment Marinaleda et l’Andalousie ne peuvent plus se passer de lui ? Et comment ne pas penser qu’après tant d’années au pouvoir et quelles que soient les merveilles réalisées, il ne se sente indispensable, éternellement  indispensable et ne tourne finalement comme le lui reprochent certains de ses concitoyens  au petit Fidel de Marinaleda ?

Canamero

Diego Cañamero, lui, après quelques années de gestion de sa commune a, semble-t-il, préféré revenir à la lutte syndicale mais comment imaginer ces occupations de terres, ces « expropriations forcées » sans Cañamero et comment imaginer le SAT sans lui ?

Quant à Palbo Iglesias il est évident que nul ne lui conteste le leadership, ni Gordillo, ni Cañamero, ni même les initiateurs de Ahora en común, tout juste tentent-ils un rappel aux principes démocratiques en espérant écarter le risque toujours présent du basculement dans le « caudillismo » au nom, évidemment, de l’efficacité.

Serait-ce que la Démocratie, le gouvernement du peuple par le peuple, est un chemin chaotique sur lequel ahanent les multitudes, d’affaissements en soubresauts ?

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