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Billet de blog 2 octobre 2012

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Oxmo Puccino, maître à bord de son "Roi sans carrosse"

"L'enfant seul se méfie de tout le monde, pas par choix, mais dépit, pense qu'en guise d'amie Son ombre suffit "Définitivement, Oxmo Puccino n'est pas de ceux qui font la queue pour humer un peu d'air du temps ni épouser la servilité (autrement appellée diktats) des codes et des postures qui l'accompagne.

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"L'enfant seul se méfie de tout le monde, pas par 
choix, mais dépit, pense qu'en guise d'amie 
Son ombre suffit "

Définitivement, Oxmo Puccino n'est pas de ceux qui font la queue pour humer un peu d'air du temps ni épouser la servilité (autrement appellée diktats) des codes et des postures qui l'accompagne.

Sur une orchestration à dominante acoustique, il assume décomplexé la quarantaine qui pointe et même s'installe. Laquelle n'est pas l'occasion d'une crise identitaire multiforme, encore moins le signe avant-coureur d'une retraite qui tarderait à venir où se faire accepter.

Figure du rap français qui pousse depuis quelques années – sans se perdre –  les portes des synthèses musicales, il nous revient avec cette nouvelle livraison, « Roi sans carrosse », et y confirme son rôle d'éclaireur dont nous apprécions à la fois la constance et la mesure.

Econome, le rappeur se refuse à la juxtaposition de "punchlines" assises sur de lourdes basses qui, si elles peuvent être l'expression d'une créativité certaine voire réelle, ne suffisent pas toujours à faire tenir les images ensemble de manière cohérente. Oxmo, pourtant rompu à l'exercice, leur préfère le temps long et la résistance de textes qui défient les années, trompent l'oubli... et font ainsi obstacle à l'usure du temps.

Parmi ces invitations musicales, éclairées par cette prose sobre, lapidaire, qui éclaire la partition comme un phare veille sur le port, nous retenons plusieurs titres dont les accents mélancoliques sont autant de témoignages de lucidité.


Parfois
s'ouvre sur ces mots limpides : « être libre c'est sortir d'une prison pour une autre, personne ne t'aime c'est aussi ça être pauvre ». Verdict doux-amer qui sert d'assise pour décrire la difficulté pour tout homme de conquérir sa liberté une fois jeté dans le Monde.

Pam-Pa-Nam nous raconte Paris au rythme de cordes toniques, pour ne pas dire sensibles.

La danse couchée assure la pause « sensuelle » de l'album où grâce à la puissance d'évocation de l'auteur le charme entre en scène sans opérer les détours attendus ou prévisibles propres au genre.

Le vide en soi parle avec pudeur de l'absence et de ce temps qui nous sépare de ce qui a été et n'est plus, tristesse qu'il nous faut trouver les moyens d'apprivoiser et qui ne doit pas nous détourner de ce que nous avons sous les yeux ou près de nous, et exige une attention au moins égale.

Dans Un an moins le quart, un vibrant hommage est rendu à « tous les pères de famille ».

Roi sans carrosse esquive la possibilité que des personnages puissent être grands sans posséder les attributs qu'on leur prête communément.

L'endurance « tranquille », voilà le secret de cet artiste que chacun s'accorde à considérer aujourd'hui comme un fabuleux conteur des fissures urbaines et des mouvements de l'âme.

Si le roi n'a pas trouvé son carrosse, nous lui accordons une énième couronne.

Nicolas Dutent

Pour revoir le concert donné le 17 Septembre à la Maroquinerie par Oxmo et ses invités :

http://liveweb.arte.tv/fr/video/Oxmo_Puccino_la_Maroquinerie/

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